Les cons
santé qu'il ne le seront plus jamais. Après, les premières années sont dures pour notre apprenti-esclave parce qu'il est pas habitué à travailler si ardu et à vivre avec si peu. Mais au bout d'un moment, il se surprend lui même à sourire en pensant que demain c'est vendredi et que le Maitre, qui est un bon chrétien, leur fait distribuer du poisson. Évidemment, au Mozambique, il mangeait du poisson plusieurs fois par semaine, et de la viande plusieurs fois par mois. Mais il sourit parce que la mémoire humaine accorde une énorme importance au passé proche et une faible importance au passé lointain. Et puis, le voilà qui commence à bien connaître la propriété au fil des années Les petits bleus viennent lui demander conseil, et vla-t-y pas qu'un matin, il se trouve être satisfait de son existence.
Maintenant, la question à cent mille balles: Est
bien
ou
mal
? Est ce bien d'arriver à tirer de la satisfaction d'un crime dont on est la victime ? Est ce mal d'enfin ne plus souffrir ? Doit-on s'efforcer de regarder la réalité en face, se rendre compte tous les jours des atrocités dont on est victime, et s'interdire le moindre regard conciliant à ces fils de pute dans leur grande case blanche, doit on rester à l'affut de la moindre chance de se sortir de cette situation infamante, si possible en tranchant la gorge à un maximum d'esclavagiste dans la foulée. Ou doit on essayer de trouver la paix dans les conditions du moment; faire avec ce qu'on a; vivre au mieux dans la misère, pour soi et les siens ?
En deux mot: Faut-il relativiser ou absolutiser ? Évidemment, je veux dire « absolutiser » au sens propre, pas au sens de boire de la vodka de supermarché
Voila à quoi ça me fait penser.
Hé hé, je viens de me rappeler d'un truc. Pourtant c'est un truc qui m'est arrivé quand j'avais 17 ans mais j'y avais pas pensé depuis une éternité. Faire un parallèle avec l'assertion du paragraphe précédent sur la mémoire
Contexte : Je venais de débarquer de la Réunion J'étais en 1ère, dans un internat rempli de caeras et... et de... ben c'est tout, quasiment. L'internat était situé en pleine cambrousse, on était complètement coupés du monde normal du Lundi au Vendredi, pour ceux qui avaient la chance de rentrer le week-end. Moi, certains week-ends, j'allais chez un oncle qui habitait dans la périphérie d'Orleans.
Je m'étais rendu compte que 80 % des gars fumaient du shit et/ou du tabac pur (les fumeurs de tabac pur uniquement équilibrant les fumeurs de shit uniquement). Évidemment, enfermé à l'internat, le fumeur qui avait fini son paquet le jeudi soir était en chien jusqu'au week-end. Moi je fumais pas, alors j'ai eu une idée, pour les potes. J'allais m'acheter un paquet ou deux le week-end que je garderais sur moi, pour dépanner les potes en galère. Sympa le mec, non ? Comme je suis pas la chatte à ta mère non plus, je taxais deux francs la clope. Les paquets de 20 coutaient genre 25 francs donc je devais vendre plus de 1 F pour pas y perdre, et je voulais pas m'emmerder avec des centimes.
Les enfants ! J'étais obligé de ramener au moins 10 paquet toutes les deux semaines. 5 par semaine qui partaient, et clope par clope. Le jeudi soir c'était le pire. Y avait vingt personne qui m'attendaient toujours à la sortie de la cantine. Et mine de rien, je me faisait un peu de thune avec. Genre 50 balles par semaine, mais c'est pas mal, cinquante balles quand t'as 17 ans.
Comme les gars avaient pas toujours deux franc sur eux, j'ai acheté un petit carnet pour noter à qui je lâchais mes clopes à chrome. Mon premier carnet ! Jusqu'à maintenant, quand on me demandait à quand ça remontait cette manie d'avoir toujours un carnet et un stylo dans ma poche arrière droite, je répondais que j'avais pompé l'idée à un de mes profs de français, François Dufeu, gloire-à-son-Nom. En fait, je lui ai juste pompé l'idée d'écrire quelque chose qui aurait un peu de durée de vie dedans en plus des comptes de mon petit commerce, listes de courses et autres détails triviaux. Mais le carnet, je l'avais déjà Chattatamère ! Comment j'avais pu oublier ça ?
Le plus ouf c'est que je m'en suis rappelé en cours d'écriture du paragraphe. Au départ, je voulais juste raconter mon deal de tabac.
Sinon, aujourd'hui j'ai fait un grand tour de longboard dans mon quartier.
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