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Les Derniers Jours de Pompéi

Les Derniers Jours de Pompéi

Titel: Les Derniers Jours de Pompéi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sir Edward George Bulwer Lytton
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était environné d’un brouillard dont la forme s’épaississait en s’approchant des arbres voisins. La ville paraissait ce qu’elle nous paraît après dix-sept siècles, la Cité de la Mort {36} .
    L’océan lui-même, cette mer sereine et sans marée, était presque aussi paisible, si ce n’est que de son sein profond s’exhalait, adouci par la distance, un faible et régulier murmure, comme la respiration de son sommeil. Cette mer embrassant, pour ainsi dire, de ses bras recourbés la terre verte et belle, semblait presser avec volupté les villes qui dormaient sur ses bords, Stabies {37} , Herculanum et Pompéi, ces filles chéries des flots.
    « Vous sommeillez, Stabies, s’écria l’Égyptien en jetant un regard sinistre sur les cités, l’orgueil et l’ornement de la Campanie : vous sommeillez !… Plût aux dieux que ce fût du sommeil éternel de la mort ! Telles que vous êtes, joyaux de la couronne de l’empire, telles ont été les villes du Nil. Leur grandeur a péri ; elles dorment parmi les ruines ; leurs palais et leurs temples sont devenus des tombes, le serpent se glisse sous l’herbe de leurs rues, le lézard habite leurs salles solitaires. Par cette loi mystérieuse de la nature, qui humilie l’un pour exalter l’autre, vous vous êtes élevées sur leurs ruines : toi, orgueilleuse Rome, tu as usurpé la gloire de Sésostris et de Sémiramis ; comme une voleuse, tu t’es revêtue de leurs dépouilles. Et ces villes, esclaves de ton triomphe, que je vois à mes pieds, moi, le dernier fils des monarques oubliés, je les maudits, ces villes, réservoirs de ta puissance et de ton luxe qui pénètrent partout. Le temps viendra où l’Égypte sera vengée ; le temps viendra où le coursier du barbare aura son râtelier dans la Maison d’Or de Néron ; et toi, qui as semé le vent de la tempête, tu recueilleras la moisson de l’ouragan et de la désolation. »
    Pendant que l’Égyptien prononçait une prédiction que la destinée a accomplie d’une manière si terrible, jamais image de plus sinistre et plus solennel augure ne s’offrit aux rêves du peintre et du poète. Les lueurs du matin, qui communiquent même leur pâleur aux joues de la beauté, donnaient en quelque sorte à ses traits majestueux et nobles les couleurs de la tombe ; à voir ses cheveux noirs qui retombaient en masse autour de lui, sa robe lugubre longue et dénouée, ses bras qu’il étendait du haut de la tour, ses yeux étincelants où perçait sa joie sauvage, on eût dit un homme moitié prophète et moitié démon.
    Après ce coup d’œil jeté sur la ville et l’océan, il reporta ses regards sur les vignes et sur les prairies de la riche Campanie. La porte et les murs de la ville, anciens et d’une construction semi-pélasgienne, ne paraissaient pas en borner l’étendue. Des maisons de campagne, des villages, s’élevaient de chaque côté sur les flancs du Vésuve, dont la montée n’était pas alors aussi escarpée ni aussi rapide qu’à présent : car, de même que Rome elle-même est bâtie sur un volcan éteint, de même et avec une égale sécurité, les habitants du Midi occupaient toute la partie verte et couverte de vignes d’un volcan dont ils croyaient le feu intérieur désormais en repos. À partir de la porte, on apercevait une longue rue de tombeaux de diverses grandeurs et d’une architecture variée. C’est par là que, de ce côté, on arrive encore à la ville. Au-dessus de toutes choses apparaissait le sommet nuageux de la terrible montagne, dont les ombres plus ou moins noires découvraient des cavernes tapissées de mousse et des rochers de cendres attestant les dernières explosions, et qui auraient pu en prophétiser de nouvelles à ses habitants, si les hommes n’étaient pas aveugles.
    Il eût été difficile de deviner en ce temps et en ce lieu pourquoi les traditions environnantes s’étaient revêtues d’une couleur si sombre, pourquoi dans ces plaines si souriantes, à plusieurs milles à la ronde, de Baia à Misène, les poètes avaient imaginé de placer le seuil de leurs enfers, leur Achéron et leur Styx fabuleux ; pourquoi dans ces champs Phlégréens {38} , alors ornés de joyeux pampres, ils voyaient le théâtre de la bataille des dieux et des géants pour la victoire du ciel, si ce n’est que le sommet nu et aride rappelait à leur esprit les traces de la foudre de Jupiter. Mais ce n’était ni le faîte escarpé du volcan

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