Les Dieux S'amusent
paysans, il fut ramené
ensanglanté chez son père. Avant de mourir, il eut le temps de murmurer à
Thésée :
— Je n’ai jamais attenté à ton honneur. Pardonne à la
coupable, comme je lui ai pardonné.
Thésée comprit tout ; accablé de remords et de chagrin,
il quitta Athènes et se réfugia chez un de ses amis, Lycomède, qui régnait sur
un État voisin. Lycomède lui fit d’abord bon accueil. Quelques jours après, cependant,
alors que les deux hommes se promenaient ensemble le long d’une falaise, Lycomède,
sans raison apparente, poussa brusquement Thésée, qui s’écrasa sur les rochers
et mourut sur le coup. On explique généralement le geste de Lycomède par la
crainte qu’il aurait éprouvée de voir Thésée répandre dans toute la Grèce les
idées démocratiques et subversives qu’il avait mises en application à Athènes. Cette
explication contient sans doute une part de vérité ; mais le comportement
de Lycomède avait une autre cause, plus profonde, que je me réserve de dévoiler
dans un chapitre ultérieur.
Phèdre, Hippolyte et Thésée étant morts, le rideau
pouvait-il être tiré sur cette sanglante tragédie ? Eh bien, non, pas
encore. Car une troisième divinité de l’Olympe, Diane, n’avait pas dit son
dernier mot. Elle avait toujours éprouvé, je l’ai dit, une prédilection pour
Hippolyte, et fut donc très affectée par sa mort prématurée. Ne doutant de rien,
elle alla trouver son frère Apollon, dieu de la médecine, pour lui demander de
rendre la vie à Hippolyte. Apollon ne pouvait rien refuser à sa sœur, mais il
ne souhaitait pas se mêler personnellement de cette affaire. Il chargea donc
son fils Esculape, le plus grand médecin de toute la Grèce et de tous les temps,
d’essayer de ressusciter Hippolyte. Esculape y consentit et y parvint. Mais, en
accomplissant cet exploit, il avait signé sa propre perte. Deux des plus grands
dieux de l’Olympe, les propres frères de Jupiter, Neptune et Pluton, ne
pouvaient en effet tolérer la résurrection d’Hippolyte : Neptune parce qu’il
avait lui-même condamné Hippolyte à mort, et Pluton parce qu’il craignait de
voir Esculape multiplier les interventions de ce genre, et dépeupler ainsi peu
à peu le royaume des morts. Neptune et Pluton allèrent donc trouver Jupiter et
le prièrent instamment de punir Esculape d’une manière exemplaire. Jupiter dut
se ranger à leurs arguments et foudroya Esculape.
Ce fut au tour d’Apollon de s’indigner de la mort de son
fils.
N’osant s’en prendre directement à Jupiter, ni même à
Neptune et Pluton, il se vengea en perçant de ses flèches plusieurs des
Cyclopes qui, sous les ordres de Vulcain, avaient fabriqué la foudre de Jupiter.
Pour comble d’ironie, c’était ces mêmes Cyclopes qui avaient fabriqué les
flèches dont Apollon les frappa. Craignant de voir Vulcain tirer à son tour les
conséquences de cet attentat, et soucieux de ne pas voir se prolonger cette
espèce de vendetta olympienne, Jupiter décida de punir lui-même Apollon : il
lui retira toutes ses attributions divines et le chassa de l’Olympe. Nous
verrons plus loin que cet exil d’Apollon allait être à l’origine de la guerre
de Troie.
15. Nouveaux exploits et mort d’Hercule
Contrairement à
thésée, Hercule ne s’était pas assagi en prenant de l’âge. À
peine son douzième travail terminé, il se lançait, pour son propre compte cette
fois, dans de nouvelles aventures et accumulait d’innombrables victoires sur
des taureaux, des monstres, des dragons et des géants. Sa force surhumaine, sa
peau de lion, sa massue et ses flèches empoisonnées le rendaient pratiquement
invincible. Il n’hésita pas à s’en prendre parfois aux dieux eux-mêmes et se
battit ainsi un jour contre Apollon, un autre jour contre Mars. Chaque fois, ce
fut son père Jupiter qui dut intervenir pour calmer les esprits. L’une de ses
aventures devait cependant le brouiller pour de bon avec un dieu puissant.
Le Géant Antée
Antée était un Géant, fils de Neptune et de la Terre. Comme
la plupart des fils de Neptune, c’était un individu peu recommandable. Posté
dans une forêt, il arrêtait tous les voyageurs et les défiait à la lutte en les
prévenant que, s’il était vainqueur, il les tuerait pour les dévaliser. Les
combats tournaient toujours à son avantage, non seulement parce qu’il était
très fort, mais aussi parce que, si par hasard son adversaire parvenait à
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