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Les dîners de Calpurnia

Les dîners de Calpurnia

Titel: Les dîners de Calpurnia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Diwo
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générosité.
    Malheureusement pour lui, le peuple n'avait ni pou->oir ni légitimité. Son attachement ne protégeait pas Méron contre les menaces des notables.

    Tigellin, certes, ne les minimisait pas mais le danger existait : chaque petit complot découvert entretenait la frayeur obsessionnelle de l'Empereur devenu une sorte de bête traquée, prête à recourir aux moyens les plus féroces pour se défendre :
    - L'Empire libéral devient une tyrannie ! dit Sevurus en apprenant que de nombreux sénateurs et patriciens, simplement suspects, avaient été mis à
    mort ou condamnés à se suicider.
    - Le dernier en date, je l'ai appris aux thermes ce matin, est Antistius Verus, ajouta Celer. Je crois que tu le connaissais.
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    - C'était un homme droit et intégre. Je doute qu'il ait pu être mêlé à
    quelque conspiration. Il était de surcroît trés ‚gé.
    - Les circonstances de sa mort ont été particuliérement dignes, m'a-t-on raconté. Acculé au suicide aprés une dénonciation, il a refusé de léguer une partie de sa fortune à Néron, préféré distribuer son argent à ses esclaves et partager entre eux tout son mobilier. Il ne s'est réservé que trois lits mortuaires : l'un pour lui-même, les deux autres pour sa fille qui s'est suicidée en même temps _ que lui et pour une vieille tante qui vivait sous son toit et ï qui ne voulut pas lui survivre.
    - C'est épouvantable ! s'écria Calpurnia. Surtout s'il n'est pas coupable.
    Et nous, sommes-nous à^l'abri d'une telle injustice ?
    - Aucun Romain, ma petite, n'est aujourd'hui à l'abri. Je ne me suis heureusement jamais mêlé de politique et je vous conseille d'en faire autant. Une chosenous préserve encore : je ne suis ni aristocrate ni sénateur, et nous vivons maintenant assez retirés depuis que je n'ai plus à
    me rendre chaque jour à la Domus. Vous qui allez aux thermes et aux spectacles, soyez prudents. Parlez le moins possible... Et puis, si le sort d'Antistius Verus m'est 4 réservé, je ferai comme lui : rien n'ira à
    Néron, je I m'arrangerai pour vous partager mon bien.
    "
    - Mais Sevurus, mon maître, il n'est pas imaginable que je vous survive si vous deviez vous suicider ! dit Celer.
    - Moi non plus ! ajouta doucement Calpurnia.
    Les yeux mouillés de larmes, le vieil architecte les regarda. Il ouvrit la bouche pour les dissuader mais il se ravisa. Il savait que Celer, le fidéle compagnon b‚tisseur, et la douce Calpurnia parlaient vrai et que tous deux le suivraient, sans hésiter, dans un geste devenu presque j banal à Rome.
    Puis il se reprit et s'écria : |
    - O˘ cette folie nous conduit-elle ? qu'est-ce qui nous " pousse à
    imaginer le pire comme s'il était probable ? Rien ne nous menace, mes enfants. Je n'ai aucune envie de m'ouvrir les veines et préfére boire ce soir tranquille- ï
    ment une coupe de bon vin. A propos, Valerius vient-il dîner ?
    - Oui, avec Martial que j'ai invité.
    - Fort bien, Calpurnia. Couronnons donc notre journée par une petite fête.
    Vois s'il reste quelques truffes de celles que nous a apportées mon ami Catilius. Tu sais que je les aime avec des úufs. Aprés notre triple suicide j'ai bien envie de ressusciter.
    Ceria, la vieille intendante, bonne cuisiniére et maîtresse de maison aussi autoritaire que dévouée, entra dans l'atrium et demanda de l'aide :

    - Coccius est trop maladroit et j'ai une amphore à ouvrir.
    Celer se leva et rapporta l'amphore dont le goulot était obturé par un bouchon de liége. Il lut l'étiquette accrochée au col et annonça : "
    Biterrois 60 ".
    - C'est un bon cru, dit Sevurus. Excellent choix puisque ce soir nous faisons la fête !
    La soirée fut ce qu'elle promettait. Martial, qui avait rejoint la villa, était un poéte plein d'esprit. Le voisin de Valerius, comme tout bon Romain, aimait les bavardages et potinait avec légéreté. Ses épigrammes poétiques avaient du succés mais il n'ignorait pas qu'il s'agissait d'un genre dangereux et s'arrangeait pour ménager Néron, son protecteur, et plus encore Tigellin. Lorsqu'il était question d'eux, ses piéces rimées de huit ou dix vers se limitaient à une aimable moquerie aussitôt rattrapée par un compliment. Les deux maîtres de l'Empire n'en prenaient pas ombrage. Ils pensaient au contraire que ces satires qui, au demeurant, ne les gênaient pas, constituaient aux yeux de l'opinion une preuve de leur libéralisme.
    - Le menu sera simple : chevreau, asperges, úufs aux truffes et

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