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Les fiancés de Venise

Les fiancés de Venise

Titel: Les fiancés de Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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jaunâtre sur un monceau de dossiers, livres et journaux qui vivaient en bonne entente avec les restes du déjeuner : une assiette contenant des morceaux de légumes et de petits os, une coupelle remplie d’olives, un verre à vin et une fiasque. À la vue de l’ Osservatore Romano grand ouvert, Tron déduisit que le curé avait l’habitude, comme nombre de célibataires, de prendre ses repas en lisant la presse. Une légère odeur de viande grillée se mêlait aux exhalaisons amères de l’encensoir et aux émanations piquantes de la lampe.
    Dès qu’il entra, le père Maurice se leva.
    —  Buon giorno , dit-il. Que puis-je faire pour vous ?
    En raison de ses origines françaises, le prêtre ne roulait pas les r à l’italienne, mais les prononçait du fond de la gorge, comme les personnes cultivées du nord de la péninsule. Ses yeux vifs examinèrent avec attention le visiteur qui esquissa une révérence polie.
    — Je suis le commissaire Tron. De la questure de Saint-Marc.
    — La police vénitienne ? s’étonna-t-il.
    La question n’avait pas beaucoup de sens, mais quelque chose semblait l’avoir troublé.
    — Oui, confirma Tron en s’efforçant de le rassurer par un sourire.
    Le père Maurice ouvrit grands les yeux.
    — Qu’est-ce qui me vaut le plaisir de votre visite ? Oh, pardon ! Asseyez-vous, je vous en prie.
    Il ôta une pile de journaux de la seconde chaise placée près de la table et la posa sans prendre garde sur l’assiette contenant les restes de grillade. Le commissaire se demanda si la jeune fille était également chargée du ménage dans la sacristie.
    — Signora Saviotti m’a confié que vous connaissiez Mlle Slataper.
    Le prêtre lui jeta un regard méfiant.
    — Cela dépend du sens qu’on donne à « connaître ». Disons qu’elle fait partie de ma paroisse. Mais qui est cette signora Saviotti ?
    Le commissaire esquissa un sourire poli.
    — La femme de ménage de Mlle Slataper. Elle m’a aussi rapporté que vous discutiez de temps à autre avec elle.
    Il haussa les épaules.
    — Mlle Slataper est originaire du Frioul ou, plus exactement, de la même ville que ma mère. Peut-être pourriez-vous m’expliquer d’abord la raison de votre venue ?
    Tron avait toujours jugé préférable, dans ce genre de situation, de ne pas y aller par quatre chemins.
    — Mlle Slataper est morte.
    Le prêtre sembla tout d’abord de ne pas comprendre. Quand les paroles de Tron eurent atteint son cerveau, il pâlit.
    — Que s’est-il passé ?
    Sa voix jusque-là sonore se réduisait à l’état de murmure.
    — Ce midi, signora Saviotti a retrouvé Mlle Slataper poignardée dans son appartement.
    Le père Maurice s’empara de son verre et but d’un trait le reste de vin rouge. Puis il demanda :
    — S’agit-il d’un cambriolage ? Je veux dire : est-on entré par effraction ?
    Le commissaire secoua la tête.
    — Rien ne paraît manquer. L’appartement n’a pas été saccagé ni la serrure forcée.
    — Avez-vous déjà une piste ?
    — L’enquête vient tout juste de commencer.
    Le prêtre semblait s’être ressaisi.
    — En quoi puis-je vous aider ?
    — Signora Saviotti m’a appris qu’Anna Slataper était fiancée. Toutefois, elle n’a jamais eu l’occasion de rencontrer ce monsieur. Elle ne connaît pas non plus son nom.
    Le Français eut un sourire en coin.
    — Un tel tact honore signora Saviotti. Mais Anna Slapater n’était absolument pas fiancée.
    — Comment pouvez-vous en être aussi sûr ?
    — Elle me faisait l’aveu de ses péchés, commissaire.
    — Comment ? Elle a reconnu que… ?
    Tron s’interrompit en voyant le prêtre froncer les sourcils. À l’expression dans ses yeux, il devina qu’aucune puissance au monde ne parviendrait à lui faire rompre le secret de la confession.
    — Excusez-moi, mon père. C’était une question stupide.
    Le visage du prêtre resta impassible. Après quelques secondes de silence, il dit :
    — Nos relations ne se limitaient pas au confessionnal. Je ne pense pas trahir mes engagements en vous rapportant les propos qu’elle m’a tenus en dehors de l’isoloir.
    Tron se pencha au-dessus de la table.
    — Que vous a-t-elle raconté ?
    — Peu de chose, malheureusement. Je sais juste que, pour garder la tête hors de l’eau, elle vendait au départ des frittolini 1 sur la place Saint-Marc. Elle n’a arrêté qu’après avoir fait la connaissance de cet homme.
    — Vous

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