Les Filles De Caleb
de Marie- Anne, approuva. Alice serait la naissance de leur renaissance.
Pour les Fêtes, ils décidèrent d’aller à Saint-Stanislas. Retenu par la maladie de Célina, Caleb n’avait pu venir à Saint-Tite. Emilie s’était bien gardée d’avertir ses parents. Elle voulait les surprendre. Ils passèrent Noël à Saint-Tite et arrivèrent à Saint-Stanislas la veille du Jour de l’An. Avec toute la famille, y compris Alice. Célina leur ouvrit la porte et faillit s’évanouir.
«Tu parles d’une idée, Émilie. Tu aurais dû me prévenir. J’ai même pas assez de manger. »
Émilie fut blessée.
«Entrez! Entrez!» Caleb venait de pénétrer dans la cuisine. «On pensait qu’on aurait des Fêtes tranquilles rapport à la santé de ta mère pis rapport que Napoléon était le seul qui pouvait venir. Ça, c’est une maudite belle surprise! Pis on va tout de suite tuer une grosse oie.»
Il regarda longuement sa fille et l’enserra dans ses bras.
«Qu’est-ce qui t’amène, ma fille?
— Ovila pis moi, on avait juste envie de recevoir la bénédiction paternelle.
— J’vas vous bénir, moi, j’vas vous bénir. Au moins dix fois pour toutes les années que j’ai manquées.»
Célina s’étendit pendant qu’Ovila et Caleb allèrent abattre l’oie. Émilien suivit, Caleb lui avait confié l’énorme responsabilité de s’asseoir sur l’oiseau à la gorge tranchée pour l’empêcher de courir partout. Émilien détesta sentir l’agitation de la volaille qui agonisait sous son poids.
De retour à la maison, Caleb invita chacun de ses petits- enfants sur ses genoux.
«Toi, tu es la plus grande. Tu dois être Rose.
— Non, moi c’est Marie-Ange.
— Marie-Ange. Es-tu aussi sage que ton nom?
— Non. J’ai jamais été sage.»
Caleb éclata de rire. Émilie, qui avait les mains pleines de sang et de plumes, se retourna et acquiesça.
«Celle-là, pâpâ, on peut dire que son nom est pas mal menteur. Marie-Ange a bien changé depuis qu’elle était p’tite. Elle a déjà été sage. Mais ça a changé quand Louisa est morte.»
«D’abord, toi tu dois être Rose.
— Oui.
— Pis tu as quel âge Rose?
— Douze et demi.
— Tu es pas bien grande pour ton âge. Vas-tu encore à l’école?
— Oui.
— Tu dois être savante astheure. Veux-tu faire une maîtresse d’école comme ta mère?»
Émilie posa son couteau assez violemment sur le comptoir pour attirer l’attention de son père. Il semblait avoir oublié les problèmes de Rose. Caleb la regarda, étonné, puis il se souvint. «Euh... ma belle Rose, peux-tu aider ton vieux pépère? J’ai pas la mémoire des noms pis j’ai pas la mémoire des âges. Marie-Ange, elle, elle a quel âge?
— Presque onze. Pis lui, tu le connais. C’est Émilien. Il a huit. Pis la p’tite gênée, c’est Blanche. Elle, elle a six.
— Presque sept, répliqua Blanche, offusquée.
— Moi, j’ai cinq ans plus deux mois moins un jour, dit Paul. Je suis né le premier novembre en neuf.»
Caleb, Émilie et Ovila éclatèrent de rire. Paul les regarda et se demanda s’il avait dit quelque chose de drôle. Caleb l’attira à lui et le jucha sur ses genoux.
«Tu es fort en calcul, toi, mon bonhomme. Je gagerais que tu vas travailler dans une banque quand tu vas être grand.
— Non, pépère. J’vas être un prêtre.
— C’est une bien bonne idée ça. Tu auras pas de problèmes pour compter les hosties, pis pour compter l’argent de la quête, pis pour compter les indulgences.
— Pis Paul, pâpâ, est bon en dessin. Il sait déjà écrire toutes ses lettres pis même des mots.
— Tu es comme ta mère était. Même p’tite, ta mère disait qu’elle serait maîtresse d’école. Es-tu aussi têtu qu’elle?
— Je suis pas têtu, mais moman dit toujours que je fais à ma tête.
— Moi aussi, moman me dit ça, renchérit Blanche.
— Pis moi aussi, dit Marie-Ange, d’un air nonchalant.
— Pis l’autre jour, Paul pis moi on a été dans la rue, enchaîna Blanche. Tu vois pépère, Paul pis moi, on a fait à notre tête. Moman nous avait dit de pas y aller. »
Caleb fronça les sourcils et les regarda sévèrement tous les deux. Il prit
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