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Les Filles De Caleb

Titel: Les Filles De Caleb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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toute la ligne de son corps sur le cadre de la porte et gémit.
     
    Chapitre quatrième
    1913-1918
     
    32.
    Ovila vécut les funérailles de son père. Jamais funérailles ne furent plus douloureuses. Il avait longuement cru que la mort de Louisa était la pire mort qu’il aurait à affronter. La mort de Louisa avait goûté la révolte et l’absurde. Celle de son père était aussi amère que le regret, le remords, l’impuissance et la certitude de vivre le reste de sa vie avec un immense besoin de pardon. La mort de son père avait déterré tous les «si»: si j’étais venu la veille...si j’avais pu être autre chose que sa déception...s’il avait pu compter sur moi...si...
    Avec sa famille il quitta le cimetière pour se rendre directement chez le notaire. Là, il connut la honte. L’humiliation. De chez les morts, son père lui avait crié son rejet. Ti-Ton, le petit Emile, héritait de la totalité du patrimoine et devait assumer la garde de sa mère jusqu’à la fin des jours de celle-ci. À Ti-Ton aussi la responsabilité d’Ovide. Edmond, Oscar et Télesphore touchaient chacun de l’argent. Et à Emilie revenait tout l’argent qu’Ovila n’avait jamais mérité.
    Le visage d’Émilie s’était empourpré au même rythme que celui d’Ovila s’était décoloré. Ovila se leva et les pria tous de l’excuser. Émilie, pas encore remise de ses émotions, partit derrière lui. Pendant leur triste sortie, le notaire avait toussoté pour essayer de se donner une contenance. Félicité, la première, parvint à se ressaisir.
    «Vous êtes sûr que vous avez bien lu?
    —        Certain, madame Pronovost. Il y a pas d’erreur.
    —        On vous remercie.
    —        Il y aurait un p’tit détail...»le notaire se racla la gorge. «Feu votre mari a fait des arrangements avec moi, qui suis comme vous le savez, son exécuteur testamentaire, pour que l’argent déposé au nom de sa bru ne puisse être touché par ...euh...personne d’autre qu’elle.
    —        Il a rien laissé à Rosée pis à Eva?
    —        Non, rien.»
    Félicité se leva, imitée par ses fils. Elle remercia froidement le notaire, plus mal à l’aise de le voir mêlé à des histoires de famille que choquée ou même étonnée par le testament, et sortit précipitamment. Aussitôt dehors, elle remarqua que la calèche d’Ovila était partie. Elle corrigea aussitôt ses pensées. La calèche d’Émilie était partie. Ovila l’avait toujours considérée comme sienne, mais tout le monde savait que c’était la calèche d’Émilie. Défraîchie, mais bien à elle.
    Émilie pleura durant tout le trajet. Ovila n’avait pas desserré les dents. Sa petite veine bleue lui battait à la tempe. Il regardait devant lui, conduisant à peine plus rapidement qu’habituellement. Émilie craignait qu’il pense qu’elle avait fomenté cette «punition» — parce que c’en était vraiment une — avec son beau-père. Ovila lui demanda de cesser de pleurer, à moins évidemment qu’elle pleure la mort d’un homme qui l’avait beaucoup aimée, elle. Émilie ne répondit pas, se contentant de se moucher bruyamment.
    «Écoute, ma belle brume, le père a suivi sa conscience. C’est dur à avaler, mais le père a suivi sa conscience. »
    Il n’ajouta rien, visiblement trop ému. Émilie lui dit enfin qu’il y avait quelque chose d’injuste dans ce testament. Qu’elle lui remettrait la part qui lui revenait. Ovila leva le ton et lui défendit de le faire.
    «J’ai pas besoin de cet argent-là. J’vas en gagner assez pour faire vivre ma famille.»
    Rendus dans la rang du Bourdais, Ovila, au lieu de se diriger vers leur maison, prit le chemin du lac. Émilie ne fit aucun commentaire. Elle irait où il voulait la conduire. S’il avait besoin d’être au lac, alors elle l’y suivrait.
    «Émilie, faut que je te parle.»
    Ils étaient bien assis dans le chalet. Émilie s’était installée près de la fenêtre. Elle fit comprendre à Ovila qu’elle l’écoutait. À travers de lourds sanglots, il lui dit que c’en était fini de la vie de chantiers. Qu’il avait maintenant plus de trente ans et qu’il devait cesser de jouer aux Indiens. Qu’il avait sept enfants qu’il adorait, quoi qu’elle en pensât, et qu’il avait bien l’intention de rester près d’eux et de leur mère. Il lui jura, sur la tête de son père, qu’il redeviendrait comme avant... Qu’elle devait lui faire

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