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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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hurlait :
    –  Mes frères, mes enfants, soyez preux ! Souvenez-vous de ce que je vous dis : «  L’homme ne doit pas se fier en sa force ni en celle de sa Chevalerie ni en celle de ses chevaux, mais en la grâce de Dieu, car les hommes font la bataille, mais Dieu donne la victoire ! » Avant ! Avant !
    Ces paroles, Tristan les avait entendues. La lumière se fit : Isaïe (503) . Ah ! Là là… N’était-ce pas singulier que cet ennemi des Juifs utilisât les exhortations d’un de leurs prophètes ?
    Sous la carapace des solerets, les minces semelles des souliers de basane absorbaient l’humidité des herbes et glissaient parfois dans la boue. « Pourquoi ai-je pris une lance ? » Ce serait un combat de près, un grand treu suivi d’un immense trépassement. Une guisarme ou un vouge, moins lourd, eût été plus maniable. Il voyait grandir les croix rouges. Cimetière en marche. Il n’avait plus peur. Peut-être les vierges à leur premier sang éprouvaient-elles des sensations pareilles aux siennes : inquiétude, ébahissement, fièvre et fierté. Il se sentait aussi lucide, cohérent. Ce glaive 302 était lourd, certes : il ne le porterait pas longtemps sur son épaulière. Le tenant des deux mains, la dextre sur la prise, la senestre devant l’agrappe, il serait contraint de percer un ventre, un cœur avant que de s’en défaire. Saleté de guerre… Alors, il empoignerait Teresa et férirait du Goddon, à moins qu’il ne fût percé d’une sagette. Car les archers, soudain, se mettaient à tirer, obscurcissant le ciel de toutes leurs empennes.
    Des hommes tombèrent, hurlèrent d’être navrés et parfois piétinés par des compères ou leurs chevaux. La pluie de mort continua pour s’interrompre quand les frondeurs castillans du roi Henri lancèrent sur les premiers rangs de Goddons leurs grêles de galets et de billes de fer, effondrant 303 les heaumes, les bassinets et les cuirasses. La pluie de sagettes recommença. Pour une fois, les Gallois ne les fichaient pas en terre mais les tiraient de leur carquois. Pour une fois, le fait de piéter dans une herbe glissante tout en bandant le long bow altérait la précision de leur tir.
    « Je vis encore. Je vis toujours ! »
    Tristan se sentait poussé en avant. Quelqu’un hurla : « Messire ! » et il se dit : « Paindorge ! » L’écuyer avait bien fait d’écourter sa lance par le haut et par le bas : il se merveillait de son équilibre même si, devant se déhancher vers la dextre, il accélérait les battements de son épée contre sa genouillère, son cuissard et sa grève. Les croix adverses grandissaient. Il voulut clore son bassinet – il en était grand temps. Impossible : la lance et l’écu suspendu par la guige à son épaule senestre lui interdisaient ce mouvement simple et réconfortant. Eh bien, il s’en passerait ! Combien d’archers ? Quelle importance 304 …
    « Leurs traits volent plus dru que la neige ne tombe ! »
    Mais la neige ne tuait pas. Neige-suaire. Il faisait beau. Le printemps frémissait après un hiver de plomb.
    On ne meurt pas au printemps. On pense à l’amour. À ses délices.
    « Ils s’approchent sans crainte et, dirait-on, sans haine. Des hommes déjà sont morts. Mon voisin vient d’être percé d’une sagette. Pas moi. Pas moi !… Des chevaux en face… »
    La haie des archers s’ouvrait. Des chevaux bardés de fer, de mailles. Des chevaux bien portants pour supporter ces coquilles ! Des chevaux lourds, comme invincibles.
    Galop. Course des hommes. Ils n’étaient plus qu’à dix toises… Moins ! Les Goddons, eux aussi avaient écourté leurs lances. Ils avaient eux aussi du courage à revendre.
    –  Arriba ! Arriba !
    Les frondeurs, stimulés par Henri, élinguèrent une fois encore (504) .
    « Que ceux qui ont des lances les tiennent puissamment, bien afusellées 305 . » Où avait-il entendu cela ? Combien de lances en avant ? En face, il y en avait aussi. Et aussi des genetoires 306 . Il n’était plus temps de prier. Et pourtant… Cette immense rumeur ! « On va galer 307  ! » Reprendre son souffle et rester droit, fermement.
    Et voilà, il y était enfin. Fracas des armes. Il y était. Il en était : le fer d’un alénas venait d’effleurer son bassinet. Le heurt de la bataille de Guesclin en avant et d’Audrehem en arrière était si rude, si impétueux qu’il faisait plier les rangs anglais commandés par Lancastre, Chandos et

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