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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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de charpie, l’autre un flacon au bouchon de bois taillé en pyramide.
    –  Pourquoi fais-tu cela, Shirton ? Ne crains-tu rien à secourir un ennemi ?
    La générosité de l’archer émouvait Tristan plus encore qu’il ne le laissait paraître. Depuis toujours, il lui était apparu comme un homme simple et secret, apparemment naïf mais profondément sagace. Il apercevait maintenant, tout au fond de ce cœur généreux, une infinité de nuances qu’il avait jusque-là ignorées.
    –  Un ennemi, messire ?
    Sans peut-être en référer à Calveley, Shirton avait accepté allègrement de secourir Paindorge. Bien mieux : sa crainte d’enfreindre des commandements verbaux ou tacites se changeait visiblement en un sentiment de plaisir capiteux de la même espèce que celui éprouvé par Tristan.
    –  Les bannières changent, les hommes sont les mêmes. Il est dommage qu’ils se refusent à le comprendre… parce que leurs suzerains s’y opposent et les molestent sans vergogne… Allons, messire, ne tardez pas à soigner votre écuyer !
    Shirton fit deux pas à reculons :
    –  Guéris, Robert ! Guéris pour me faire plaisir.
    Paindorge ne put lui répondre : terrassé de soulagement et de souffrance, et les paupières closes, il savourait la joie de se savoir sauvé.

VII
     
     
     
    De la vesprée à l’aurore, les captifs subirent les rumeurs d’une célébration qui, pour être simple, champêtre et justifiée, n’en ulcérait pas moins leurs cœurs. C’était une nuit de clair de lune, un immense dais de cristal pétillant d’étoiles, elles aussi en liesse. La splendeur des astres incita les ménestrels aux voix souvent efféminées à chanter les mérites du prince de Galles et de ses chevaliers. Bien qu’absents, les archers eurent même droit à leur chanson à boire, et ce fut Chandos certainement, qui la chanta malement, heureux qu’elle eût été reprise au loin par les piétons de la Grande Ile.
    What of the bow  ?
    The bow was made in England
    Of true wood , of yew-wood
    The wood of English bows
    So men who are fre e
    Love the old yew-tre e
    And the land where the yew-tree grows (513) .
    Peu à peu les voix et les flambeaux s’éteignirent.
    La fraîcheur de l’aube désengoua les convives les plus vigoureux. Ils s’en allèrent dormir un tantinet, mêlant à leurs voix avinées le bruit de leurs rots et de leurs pets.
    On apprit par Shirton que Guesclin, absent, avait participé au repas et qu’il dormait sous le pavillon du captal de Buch 335 . Nul ne s’en indigna, pas même Audrehem tourmenté par on ne savait quoi. Sous sa barbe blanchoyante, on devinait un teint plombé par une veille interminable et des affres qui n’avaient cessé de s’aggraver lorsqu’il avait entendu les répliques de Pèdre et du prince de Galles, l’un, exaspéré, voulant occire tous les pri sonniers, l’autre exigeant du nouveau roi de Castille, soit une retenue dans ses propos vengeurs, soit le respect de leurs engagements. Le meurtre de Lopez Orozco avait été la première infraction aux promesses données au prince de Galles. On décelait dans leurs voix pourtant lasses, une animadversion qui laissait augurer des querelles furibondes. Édouard, désormais, exécrait Pèdre et celui-ci – qui s’érigeait malgré les évidences en vainqueur de Nâjera – se disait peut-être que seul avec ses hommes, il eût obtenu la victoire. Un vent de discorde soufflait.
    –  Nous avons dormi comme des routiers, Castelreng.
    –  Qui sommes-nous, messire ? Ne sommes-nous pas devenus des routiers quand nous sommes entrés pernicieusement en Espagne ? N’avons-nous point tout commis pour qu’on nous haïsse ?
    Tristan se sentit jugé défavorablement. Il n’en eut cure. Sans s’accommoder de sa male chance, il la trouvait méritée. L’état de Paindorge le rassurait : l’écuyer avait dormi d’un sommeil profond sur l’herbe fraîche, et pour éviter d’être incommodé par le froid, il avait conservé son armure déséperonnée, moins la grève disjointe de son pied blessé. La navrure ne présentait aucun indice d’infection. L’enflure, bleuie par la violente pénétration du fer dans la chair, était de celles que tout homme d’armes avait coutume de voir sur soi-même ou sur d’autres.
    –  Je regracie la Providence, dit l’écuyer, de m’avoir imposé cette épreuve. J’enrage, cependant, de ne pas savoir où sont Lebaudy, Lemosquet et les chevaux.
    –  S’ils

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