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Les fils de la liberté

Les fils de la liberté

Titel: Les fils de la liberté Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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regardé le chien et tu as eu un soupir exprimant un sentiment comme une femme en éprouve rarement pour un chien.
    — Peuh ! fit-elle dépitée. Et alors ? Je n’ai pas le droit de penser à lui ? Tu vas me dire que, ça aussi, ça ne me regarde pas ? Je n’ai pas le droit de me demander comment il va, comment sa famille l’a reçu, s’il considère être rentré chez lui ?
    — S’il reviendra ? acheva-t-il.
    Il ôta ses lunettes et passa une main sur son visage fatigué.
    — Il reviendra, affirma-t-elle. Il n’abandonnerait pas son chien.
    Cela fit rire son frère, ce qui acheva de l’horripiler.
    — En effet, il reviendra sans doute, convint-il. Et s’il revient avec une épouse, petite sœur ?
    Il avait retrouvé une voix douce et elle se tourna à nouveau vers la fenêtre pour ne pas lui montrer son trouble.
    — Si c’était le cas, cela vaudrait peut-être mieux pour toi comme pour lui, Rachel. Tu sais qu’il a du sang sur les mains.
    — Et que voudrais-tu que je fasse ? Que j’épouse William ?
    Il y eut un bref silence, puis Denny demanda sur un ton légèrement perplexe :
    — William ? Tu as des sentiments pour lui ?
    — Je… oui, bien sûr, je ressens de l’amitié pour lui. Et de la gratitude.
    — Moi aussi, pourtant l’idée de l’épouser ne m’avait jamais traversé l’esprit.
    Elle pivota sur ses talons et le fusilla du regard.
    — Tu es vraiment très agaçant. Ne pourrais-tu pas te retenir de te moquer de moi ne serait-ce qu’un seul jour ?
    Il s’apprêtait à répondre quand un bruit à l’extérieur attira l’attention de Rachel. Elle se tourna à nouveau vers la fenêtre et écarta le lourd rideau. Son souffle se condensa sur la vitre et elle l’essuya avec sa manche d’un geste impatient juste à temps pour voir une chaise à porteurs s’arrêter devant l’auberge. La portière s’ouvrit et une femme en descendit. Elle était vêtue de fourrure et semblait pressée. Elle tendit une bourse à l’un des porteurs et courut vers l’entrée de l’auberge.
    — Voilà qui est étrange, murmura Rachel.
    Elle se tourna vers son frère puis vers la petite pendule de leur chambre.
    — Qui rend des visites à neuf heures du soir la nuit de Noël ? Ce ne peut pas être une Amie, tout de même ?
    Les quakers ne célébraient pas Noël, et n’hésitaient donc pas à circuler en ce jour sacré, mais les Hunter n’avaient encore aucune relation avec la Société des Amis de Philadelphie.
    Un bruit de course dans l’escalier empêcha Denzell de répondre et, l’instant suivant, la porte de la chambre s’ouvrit à la volée. La femme se tenait sur le seuil, aussi blanche que sa fourrure.
    — Denny ? dit-elle d’une voix étranglée.
    Denzell se leva d’un bond comme si on avait glissé une braise dans ses culottes, renversant l’encrier.
    — Dorothea !
    Il traversa la chambre en une seule grande enjambée et serra fougueusement dans ses bras la nouvelle venue.
    Rachel était pétrifiée. L’encre coulait de la table sur le tapis. Elle se dit vaguement qu’elle aurait dû faire quelque chose mais ne bougea pas. Puis elle se rendit compte que sa bouche était grande ouverte et la ferma.
    Soudain, elle comprit l’impulsion qui poussait certains hommes à blasphémer à voix haute.
     
    Rachel ramassa les lunettes de son frère et attendit qu’il s’arrache à l’étreinte de la femme en fourrure. Dorothea. La voici donc… Mais n’est-elle pas aussi la cousine de William ? William lui avait parlé d’elle en chemin pour Philadelphie. Elle s’était trouvée dans la maison quand Denny avait pratiqué l’opération… Mais, dans ce cas, Henry Grey était le frère de cette femme ! A leur arrivée cet après-midi, elle s’était cachée dans la cuisine. Contrairement à ce qu’avait cru Rachel, ce n’était donc pas par sensiblerie ni par peur mais pour ne pas se retrouver face à face avec Denny alors que celui-ci s’apprêtait à réaliser une intervention particulièrement délicate.
    Cela la mit dans de meilleures dispositions à l’égard de la nouvelle venue, bien qu’elle ne soit pas encore prête à la serrer dans ses bras et à l’appeler « ma sœur ». La femme non plus d’ailleurs, qui ne semblait pas avoir remarqué sa présence.
    Denny la lâcha enfin et recula d’un pas même si, à son visage rayonnant, il était clair qu’il se retenait de ne pas se jeter à nouveau sur elle.
    — Dorothea, que fais-tu

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