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Les fils de la liberté

Les fils de la liberté

Titel: Les fils de la liberté Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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parapets et dans les tranchées de Bemis Heights si nécessaire.
    Ian émergea brièvement du brouillard matinal pour prendre un morceau de pain grillé.
    — Arnold l’a emporté, m’informa-t-il. Oncle Jamie est déjà parti avec les tirailleurs. Il m’a demandé de vous dire qu’il vous verrait ce soir, et qu’en attendant…
    Il se pencha sur moi et déposa une bise sur ma joue. Puis il me sourit d’un air effronté et disparut à nouveau.
    Mon estomac était noué, autant par la peur que par l’excitation contagieuse autour de moi. Les Américains formaient une bande déguenillée et disparate mais ils avaient eu le temps de se préparer. Ils savaient ce qui les attendait et quels étaient les enjeux. La bataille serait décisive pour la campagne du Nord. Soit Burgoyne en sortait victorieux et poursuivait sa marche, prenant en tenaille l’armée de Washington près de Philadelphie entre ses forces et celles du général Howe, soit son armée d’invasion serait battue, auquel cas les troupes de Gates pourraient se déplacer vers le sud pour aller prêter main-forte à Washington. Tous les hommes en étaient conscients et le brouillard semblait galvanisé par leur impatience d’en découdre.
    Selon la position du soleil, il était environ dix heures du matin quand le brouillard se dissipa enfin. Les tirs avaient commencé un peu plus tôt, brèves explosions sporadiques au loin. Je supposais que c’étaient les hommes de Daniel Morgan qui tiraient sur les détachements. Jamie m’avait expliqué la veille qu’ils avaient pour mission de viser les officiers, les soldats portant des gorgerins en argent. Je n’avais pas fermé l’œil de la nuit, imaginant le lieutenant Ransom et la petite plaque en métal brillant sous sa gorge. Dans la poussière de la bataille, dans le brouillard… J’avais la gorge tellement serrée que je n’arrivais même plus à boire de l’eau.
    Jamie, lui, avait dormi avec la concentration têtue du guerrier mais il s’était réveillé au beau milieu de la nuit ; il tremblait, sa chemise trempée de sueur malgré la fraîcheur. Je ne lui avais pas demandé de quoi il avait rêvé. Je lui avais tendu une chemise sèche et l’avais forcé à se rallonger, sa tête sur mes genoux, lui caressant les cheveux jusqu’à ce qu’il ferme les yeux. Cependant, je doutais qu’il se soit rendormi.
    Cette fois, les tirs étaient plus soutenus. Ils nous parvenaient par saccades mais les salves étaient répétées. Il y avait des cris, vagues et lointains ; il était impossible de deviner qui criait quoi et à qui. Puis il y eut la détonation d’un canon britannique ; une explosion qui fit taire tout le monde dans le camp. Une pause, et la vraie bataille éclata, les tirs et les cris ponctués de coups de canon. Les femmes étaient blotties les unes contre les autres ou, la mine sombre, rassemblaient leurs affaires, au cas où il nous faudrait fuir.
    Vers midi, un silence relatif retomba sur le camp. Etait-ce terminé ? Nous attendîmes. Au bout d’un moment, les enfants gémirent qu’ils avaient faim et une sorte de normalité tendue reprit le dessus. Il ne se passait plus rien. Nous entendions des plaintes et des hommes blessés appelant à l’aide mais on ne nous amena personne.
    J’étais prête. Je disposais d’une petite carriole tirée par une mule. Elle était chargée de bandages et de matériel médical ainsi que d’une tente que je pourrais monter au cas où il me faudrait effectuer une opération chirurgicale sous la pluie. La mule entravée non loin paissait calmement, indifférente à la tension et au tumulte guerrier.
    Vers le milieu de l’après-midi, les hostilités reprirent et, cette fois, les civils qui attendaient dans le camp et les carrioles de cuisine commencèrent à battre en retraite. Des deux côtés, les échanges d’artillerie étaient assez fournis pour que les canonnades continues forment un grondement de tonnerre constant et que j’aperçoive un immense nuage de fumée noire s’élever des hauteurs. Il n’avait pas vraiment une forme de champignon mais je ne pus m’empêcher de penser à Hiroshima et à Nagasaki. J’affûtai mon couteau et mes scalpels pour la énième fois.
     
    Le soir approchait. Le soleil disparaissait à l’horizon, teintant la brume d’un orange terne et menaçant. Venu de la rivière, le vent se levait, soulevant le brouillard de terre et le faisant tournoyer en grosses volutes.
    Des nuages de fumée noire

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