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Les fils de la liberté

Les fils de la liberté

Titel: Les fils de la liberté Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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doucement le muscle sous-jacent. Nouer la petite artère digitale avec deux autres vaisseaux suffisamment grands. Sectionner les dernières fibres et fragments de peau retenant le doigt. Détacher celui-ci.
    Le métacarpe me resta dans la main, blanc et nu comme une queue de rat.
    J’avais fait un travail propre et net mais je ressentis une brève pointe de tristesse en déposant le petit morceau de chair sur la planche. Je revis soudain Jamie tenant Jemmy à peine né, comptant un à un les minuscules doigts et orteils, son visage ravi et émerveillé. Son père aussi avait compté ses doigts.
    — Tout va bien, chuchotai-je autant à lui qu’à moi-même. Tout va bien, ça cicatrisera.
    Le reste fut vite fait. J’ôtai les fragments d’os avec le forceps, débridai la plaie de mon mieux, enlevai les morceaux d’herbe, de terre et même un petit bout de tissu enfoncés dans la chair. Il ne me restait plus qu’à nettoyer les lèvres de la plaie, à couper la peau en excès et à suturer. J’appliquai une épaisse couche d’onguent à base d’ail, de feuilles de chêne blanc et d’alcool sur toute la main, l’enveloppai dans du tissu ouaté et de la gaze, puis dans un bandage serré en lin et en pansementsadhésifs pour réduire le gonflement et encourager le majeur et l’auriculaire à se rapprocher.
    Le soleil était presque levé. La lanterne au-dessus de ma tête semblait pâle. L’effort de concentration et la fumée des feux me brûlaient les yeux. Dehors, les officiers se déplaçaient parmi les hommes pour les réveiller et les préparer à affronter la journée… et l’ennemi.
    Je posai la main de Jamie sur le lit près de son visage. Il était pâle mais pas exsangue et ses lèvres étaient roses et non bleues. Je plongeai mes instruments dans un bain d’eau et d’alcool, soudain trop épuisée pour les désinfecter convenablement. J’enveloppai le doigt amputé dans un bandage en lin sans trop savoir qu’en faire, puis le laissai sur la table.
    — Debout là-dedans ! On se réveille !
    Les cris rythmiques des sergents étaient ponctués de variantes humoristiques et des réponses crues des soldats extirpés de leur sommeil.
    Je ne me donnai pas la peine de me déshabiller. S’il y avait des combats aujourd’hui, je serais contrainte de me lever bientôt. Mais pas Jamie. Je n’avais pas à m’inquiéter pour lui. Quoi qu’il arrive, il ne se battrait pas.
    Je dénouai mes cheveux avec un soupir d’aise. Puis je m’allongeai sur le lit de camp à ses côtés, blottie contre lui. Il était étendu sur le ventre. Je voyais la petite bosse ronde de ses fesses musclées sous la couverture. Je posai ma main dessus et les pressai.
    — Fais de beaux rêves, murmurai-je.
    Puis je laissai la fatigue m’emporter.

22
    Séparé à jamais de mes amis et de ma famille
    Le lieutenant lord Ellesmere avait enfin tué un rebelle. Peut-être même plusieurs bien qu’il ne puisse jurer que ses tirs aient atteint leur cible ; certains étaient tombés mais n’étaient peut-être que blessés. En revanche, il était sûr pour celui qui avait attaqué le canon britannique avec un groupe d’autres insurgés. Il l’avait pratiquement fendu en deux d’un coup de son sabre de cavalerie. Il ressentait depuis un étrange engourdissement dans le bras et ne cessait d’ouvrir et de refermer sa main gauche pour s’assurer qu’elle fonctionnait encore.
    Il n’avait pas que son bras d’engourdi.
    Les jours qui suivirent la bataille furent essentiellement consacrés à l’évacuation des blessés du champ de bataille, à l’enterrement des morts et à la récupération des forces de chacun. Ou de ce qu’il en restait. Les désertions allaient bon train ; il y avait un flot constant de disparitions. Un jour, ce fut toute une compagnie de soldats du Brunswick qui fit défection.
    Il assista à plusieurs enterrements, les traits figés, observant ces hommes et ces garçons qu’il connaissait être confiés à la terre. Les premiers jours, ils ne les avaient pas enfouis suffisamment et ils durent écouter toute la nuit les hurlements et les grondements des loups se disputant les dépouilles qu’ils avaient déterrées. Le lendemain, ils enterrèrent à nouveau ce qui restait des corps, plus profondément.
    La nuit, un feu brûlait tous les cent mètres tout autour du camp car les tireurs américains profitaient de l’obscurité pour abattre les sentinelles.
    Il régnait pendant la journée une

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