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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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planchettes renforçant les capitons joints avec des cordelettes prélevées sur de vieux câbles retressés et suiffés. Afin que l’ensemble de ces défenses fut impénétrable, le baron avait sacrifié quelques cottes de mailles : le cou, le poitrail et les flancs de Marchegai et Veillantif en seraient couverts sous les étoffes ajustées.
    — Ah ! Père, dit Ogier, si nous pouvions…
    Le vieillard s’immobilisa sur les marches :
    — Que veux-tu dire ?… Que vas-tu me proposer ?
    — Vous proposer ? Rien… J’aimerais que vous puissiez venir à Chauvigny. Vous avez l’œil prompt et bonne mémoire. Vous sauriez mettre un nom sur chaque visage – ou peu s’en faudrait – adoncques, parmi les prud’hommes et l’assistance, vous reconnaîtriez les traîtres mieux que moi !
    Godefroy d’Argouges secoua la tête. Un long soupir sortit du heaume. À travers les minces ouvertures, Ogier fut dévisagé bien en face, profondément. L’éclat et le défi qu’il avait vus naguère dans les yeux de cet homme y brillaient à nouveau :
    — J’y ai pensé mais, mon gars, outre que ma présence là-bas, ne pourrait passer inaperçue – même si j’ai vieilli, même si je laissais pousser ma barbe comme un Templier –, il me faut veiller sur Gratot… Quant à toi, y as-tu songé ? Tu ne peux aller à Chauvigny que comme un manant ou un chevalier aventureux… Il te faut un écu sans rien dessus et de couleur…
    — Noire.
    — Hé oui.
    Après s’être recueilli un instant, le vieillard appuya sa main osseuse sur l’épaule de son fils.
    — Une sorte d’orgueil, parfois, bouillonne en toi…
    « Lui aussi ! » songea le garçon.
    — … tout autant que l’idée de vengeance… Méfie-t’en… Je voudrais que ta vie soit au moins aussi longue que la mienne, mais dans le bonheur en toute chose… Et cette guerre contre les Goddons, je la crains pour toi.
    — Père !… Une vie se mesure à son poids, nullement à sa longueur. Je me soucie peu de l’étendue de la mienne !
    Ogier mentait à peine. Il ajouta, cependant :
    — Mais j’espère qu’elle sera bien pleine… Dieu l’emplira à sa convenance.
    — Dieu !… Je crois que si l’on attend tout de Lui, on n’obtient jamais rien. Et ceux qui Le servent au mieux sont parfois les victimes des plus affreux païens qui soient… Tu l’as vu avec Gerbold… Qui prendras-tu pour te rendre à Chauvigny ?
    — Thierry et Raymond s’il revient de Bretagne… et mon chien.
    — Crois-tu que ce long chemin en vaudra la peine ? Ce complot peut être ajourné. Montfort nous en a dit fort peu… Comment savoir où ces traîtres se réuniront ?
    « Pourquoi dit-il cela ? Souhaite-t-il me retenir ?… A-t-il peur ? Pour lui ou pour moi ?… Le voilà qui baisse la tête… »
    — Comment vous nourrirez-vous ?… Je ne puis rien te donner…
    — Je sais, Père. J’ai encore une escarcelle pleine… S’il le faut, en chemin, je publierai mes chapitres [209] . À les offrir à tous venants, je pourrai gagner quelques harnois, quelques chevaux et les vendre pour subsister. Dès maintenant, Aude pourrait me broder une emprise noire… avec un poing dessus en signe de vengeance… Il ne m’en faut pas plus !
    Ogier riait, ne prenant guère ses paroles au sérieux. Godefroy d’Argouges pinça les lèvres :
    — Je t’avais retrouvé et tu vas repartir… Ce coup-ci, je vais me sentir bien seul !
    — Père, nous vivons en ces murs comme des lions en cage. Souvenez-vous de ce que Gerbold disait de vous naguère : ex ungue leonem [210] … Souvenez-vous-en toujours !
    Ogier se courrouçait, et pourtant, la certitude d’aller à Chauvigny pour y entamer sa vengeance lui donnait du baume au cœur.
    — Je vous vengerai ! Après avoir estoqué Blainville, je retrouverai Roland de Sourdeval, qui vous a malmené. Et les deux juges : Amaury de Lôme et Michel de Fontenay… Je les occirai !… Et si je connaissais les noms des presbytériens qui ont dit sur votre corps vivant la prière des morts…
    Suivie de Thierry, Aude s’approcha :
    — Mon frère, Gerbold nous avait dit leurs noms. Il me semble que tu les connaissais : Huguequin d’Étreham et Adhémar de Brémoy… Ils sont au manoir de Blainville…
    — Et bénissent les méfaits de ces mécréants !… Mais, mon fils, prétendrais-tu châtier des clercs ?
    La question contenait du défi, de l’irrévérence à l’égard des deux moines et

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