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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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plocs, des fuites.
    Le sol s’arrondit, se bossua et s’éleva. Les pieds s’y enfonçaient sans trouver un appui. La robe d’Adelis frémissait aux grands soupirs du vent qui plaquait, ridait sa camisole sur sa gorge, hurlupait ses cheveux et lançait contre son visage clair des grains agaçants et durs.
    — Toute cette chaleur amènera un orage… Peut-être pas ce soir mais demain… Il est en train de fourbir ses éclistres… Cette pente est rude, Adelis. On y patauge sans guère avancer… Donnez-moi votre main.
    — Non.
    — Soit… Nous arrivons.
    Bien que la nuit, visitée de nuages longs et bouffis, fût devenue bleutée puis résolument noire, devant eux s’élevèrent soudain des lueurs d’aube.
    — C’est là… Vous allez la voir.
    Quelques pas encore et ils furent au sommet de la dune.
    La mer apparut, immensément nacrée, incroyablement douce à leurs yeux larmoyants, léchant, léchant toujours dans un gémissement mousseux le sable du rivage.
    — Nous y sommes.
    Adelis s’était arrêtée, les paumes appuyées sur ses seins, frissonnante de surprise et d’émoi, noire et vivante oriflamme dans ses amples vêtements. Avec une extase d’enfant, elle regardait cette eau mouvementée dont les crêtes se fracassaient sur le rivage nu, brodant et rebrodant les mêmes festons d’hermine, lentement, mollement, passant de la violence lourde à la caresse, du grondement au friselis comme on passe de l’ardeur à la langueur et du frisson au spasme. La nuit semblait de perle et de velours obscur.
    — Voilà, dit Ogier, guère enclin à parler. Vous l’aurez vue enfin. C’est maintenant qu’elle est la plus belle.
    Ils étaient face à face comme des adversaires, et pourtant rien ne les opposait : ils partageaient le même enchantement.
    — C’est beau.
    — Oui, c’est beau.
    . Choses vaines que ces mots enchâssés dans un silence au goût de sel et d’incertain pendant lequel Ogier pensait : « Si tu voulais… » et où Adelis baissait la tête comme une pucelle prise en faute. Mais en faute de quoi ?
    — Venez… Descendons la voir de près…
    Il lui offrit sa main et s’étonna qu’elle l’eût acceptée. Cependant, avant de se laisser entraîner, elle regarda ces mamelons de sable, autour d’eux, si blancs sur le fond sombre du ciel, qu’elle dit en riant :
    — On croirait voir de gros tas de farine.
    Une goutte de lumière – une larme peut-être due au vent ou à son émoi – illumina ses yeux ; sa voix prit un accent inconnu, grave et pointu, presque enfantin quand elle avoua :
    — J’ai envie de courir droit devant.
    Elle se libéra et descendit la dune. Elle courait. Il la suivit à grands pas, attiré par le mouvement de ses hanches et la rondeur de son corps lorsqu’elle se baissa pour retirer ses sandales. Sa course devint pure et dansée ; il savait qu’il ne l’avuait plus d’un regard neutre ou amusé, mais avec l’attention soutenue d’un chasseur.
    Elle s’arrêta, saisit une poignée de sable et s’étonna :
    — Oh ! qu’est-ce qui vient de sauter après avoir chatouillé ma paume ?
    — Une puce… Plus grosse que celles que nous connaissons sur terre !… Regardez à vos pieds : elles sautent, elles dansent… comme vous !
    — Il est doux, dit-elle en reprenant du sable.
    C’était vrai qu’elle n’en connaissait pas la douceur ; qu’elle n’avait jamais connu la douceur. Elle désigna l’eau vivante et pâle :
    — Je veux la toucher… la voir mieux… J’aimerais m’y plonger.
    C’était parfois ce qu’il pensait à la vue d’une femme. C’était ce qu’il éprouvait maintenant.
    L’incomparable et vivante senteur des flots enveloppait Adelis.
    Le vent continuait de plisser sa jupe et comme elle la relevait pour piétiner l’écume blanche, il envia ce vent qui, intime et hardi, s’insinuait en elle.
    L’eau fluait, écumait et disparaissait, sucée, absorbée par le sable avec un grésillement tendre. Ogier regardait ces chevilles que léchaient les vaguelettes, et ces jarrets laiteux, imaginant les jambelets de fraîcheur qui vacillaient autour. Bientôt, Adelis releva sa robe au-dessus des genoux et avança résolument vers le large.
    — Holà !… Prenez garde : il y a des creux… On perd pied par ici… De plus, elle doit être froide !
    Il reçut un rire pour réponse :
    — Que non !… Elle est tiède à souhait… Vous devriez venir.
    Il hésita. À quoi bon, pour rien ,

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