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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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Ogier s’était attendu à un consentement sans ambages : «  Tu l’as » ou : « Je te l’accorde. » Cette question aiguisa sa méfiance. Était-il possible, cependant, qu’Isambert eût été contaminé par la truandaille au point que son appui semblait aventuré ? Il fallait pourtant que ce tonsuré lui permît d’avoir accès à la maison du chévecier !
    — Je ne vous dirai pas ce jour d’hui, mon père, pourquoi je requiers votre assistance. Je veux savoir si je peux compter sur vous quelle que soit l’importance du service que je vous demanderai. Aucun danger, je crois, ne vous menacera.
    Sur la peau déjà luisante du visage, Ogier vit perler la peur. Frère Isambert eut une expression de fatigue profonde et, les mains jointes sur son crucifix :
    — Savais-tu que Blainville serait à Chauvigny ? Es-tu venu pour te revancher ?… Mais comment ?… Je sais que tu m’épargneras. J’ai commis des erreurs. Je m’en repens chaque jour.
    Ogier eut un sourire impitoyable :
    — Sachez-le, et souvenez-vous-en : j’ai échangé mon nom contre celui d’Ansignan, en Fenouillet. Un seigneur de la Langue d’Oc l’a porté. Mon écu est peint à ses couleurs. Les juges m’ont donné du Fenouillet. J’ai accepté ce nom patrenomique [328] . Ne l’oubliez pas.
    — Mais tu restes Ogier.
    — Certes. Vous m’avez baptisé ainsi. Je ne puis renoncer à tout. D’ailleurs, les Ogier se comptent par milliers.
    — Que Dieu te garde. Que veux-tu de moi ?
    — Mes intentions ne vous concernent aucunement. J’ignorais, en quittant Gratot, que je vous reverrais… Mais s’il vous venait quelques démangeaisons de traîtrise, sachez que votre bure ne me fait pas plus d’effet que les hauberts ou les armures de mes ennemis !
    — Qu’exiges-tu de moi ?… Parle ! Finissons-en.
    — Je n’exige rien, je demande… Trouvez-vous samedi à votre convenance sous les voûtes de Saint-Léger. Vous le savez : la montre des heaumes et des écus y aura lieu. Je vous y chercherai et vous dirai ce que j’attends de vous.
    Et comme, craintif ou furieux, le moine, pour s’apaiser, tortillait sa cordelière, Ogier sourit :
    — Ne tremblez pas ainsi dans votre froc !… Que craignez-vous ?… Votre compère nous regarde et s’inquiète ? Dites-lui que je me confessais à vous pour Ramonnet… À Dieu, saint homme !
    Frère Isambert, d’un pas chancelant, rejoignit son compagnon et l’entraîna vers la cité. Il parlait précipitamment, levait parfois les bras, en proie à une agitation dont il viendrait à bout non pas en agrippant son crucifix étrange, non pas en lampant un pichet de bon vin mais à genoux devant la Croix.
    — Qui était-ce, messire ? demanda Thierry.
    — L’ancien chapelain de Gratot. Mon père vous en a quelquefois parlé… Je crois bien qu’il sert Blainville et que son zèle n’a d’égale que sa frayeur pour ce démon !
    Raymond, pensif, releva la tête et cracha :
    — Vous avez retrouvé un chapelain couard, moi, j’aimerais retrouver Adelis… Vous parlez de frayeur en vous ébaudissant ; son absence à elle me subvertit [329] et je n’ai pas le cœur à rire.
    Il avait raison. Ogier oublia l’insolence du regard et du ton :
    — Thierry, tu vas veiller sur nos chevaux. Toi, Raymond, saute sur Marcepin et bats les prés autour de la lice… Je vais chercher à pied dans Chauvigny… Le premier qui la trouvera l’amènera ici… Viens, Saladin, et à bientôt, j’espère.
     
    *
     
    Rien ! Quinze ou vingt passants abordés au hasard des rues dans lesquelles il marchait, précédé de son chien : commères à l’œil vif, sergents du guet, jouvenceaux dont la grâce d’Adelis eût pu attirer les regards ; aucun d’eux n’avait remarqué la présence d’une dame blonde en robe rouge et safran, bien atournée, et visiblement étrangère à la ville.
    — Il vient en Poitou tant de gentes dames, ces jours-ci !
    — Il y a tant de mouvement, messire !
    Non, toujours non. Ogier se rassurait en pensant que Raymond ou Thierry, ce dernier sans avoir bougé, avait sans doute retrouvé leur compagne.
    Accoudé à la muraille du chemin d’accès au château de l’évêque, il regarda les champs qui s’étendaient plus bas. Dans le fourmillement des besogneux, Raymond allait au trot, devant les échafauds. Il arrêtait Marcepin pour questionner un homme. « Rien… Qu’est-elle devenue ? » Peur et déconvenue lui serrèrent le

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