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Les fleurs d'acier

Les fleurs d'acier

Titel: Les fleurs d'acier Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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la Grande Ile, n’y est-il pas demeuré ? Pourquoi est-il revenu sur notre sol où, pour lui, la menace est partout ?
    On poussa doucement la porte ; c’était Aude. Ils ne l’avaient pas entendue approcher.
    — Tiens, tu viens aussi !
    — C’est Père qui m’envoie.
    — Notre homme semble mieux, si c’est ce qu’il veut savoir.
    Ogier soupira, soulagé qu’elle ne les eût pas surpris, Adelis et lui, dans une attitude équivoque. Elle considéra Montfort sans détestation ni bienveillance :
    — Qu’allons-nous faire de lui ?
    — Une idée mûrit en moi, ma sœur. Et si tu veux qu’elle aboutisse et nous sauve, par conséquent, va prier pour cet homme.
    Il lui en voulait de s’être immiscée dans son entretien avec Adelis. Il ne se sentait enclin ni à l’indulgence ni aux explications, et pour se soustraire au mécontentement d’Aude et au déplaisir – plus justifié sans doute – d’Adelis, il quitta la chambre et descendit dans la cour.
    Par l’ombre qui sur l’herbe jouxtait la sienne, il sut que sa sœur l’avait suivi et voulait lui parler. De quoi ou plutôt de qui  ? sinon d’Adelis. Il ne se détourna pas. « Que va-t-elle penser ? » Au fond, Aude avait agi précautionneusement davantage par habitude que par curiosité malsaine. Se sentant épiée depuis cinq ans, ses gestes étaient ceux d’une fille devant laquelle, à chaque instant, le malheur pouvait jaillir. C’était sa mauvaise conscience à lui qui le mettait en rage. Mais était-ce mal qu’Adelis l’intéressât à ce point ?
    « A-t-elle envie de moi ? »
    Même au cas où leurs désirs eussent été semblables, cette similitude n’eût rien résolu. Le passé d’Adelis les séparait, un passé dont il ignorait presque tout et préférait absoudre afin de la maintenir au niveau qu’il lui avait donné.
    Aude s’éloigna sans mot dire. Peut-être avait-elle voulu l’entretenir de Thierry.
    — Alors, Ogier, comment va ? demanda de loin Bressolles.
    Le maçon tenait un seau dans chaque main.
    — Que portez-vous là-dedans ? Du plâtre ou de la farine sale ?
    — Du salpêtre… J’ai passé ma matinée à gratter les murs des caves et des étables. Votre père a du soufre… et je sais préparer le charbon de bois.
    Ogier comprit et approuva de la tête. Bressolles devait être inquiet pour avoir songé à tirer parti de cette poudre noire dont ils avaient vu les effets destructeurs sur le beffroi de Robert Knolles, la dernière nuit de siège, à Rechignac.
    — Faites pour le mieux, Girbert.
    — Sait-on jamais…
    Contournant la tombe de sa mère, Ogier grogna :
    — Peu me chaut qu’Aude aime ou méprise Adelis.
    C’était faux. Une pensée lui tira un sourire :
    — Après tout, si Thierry fleurette avec elle, ça l’occupera !
     
    *
     
    Il dormit une grande partie de la journée. Le soir, alors qu’il abreuvait les chevaux en compagnie des hommes, Bertine parut sur le seuil de l’écurie :
    — Messire Ogier, votre père vous demande… Il est auprès du Breton.
    — J’y vais… Raymond, Thierry, Jourden, continuez sans moi.
    Il vit que la servante était prête à le suivre, et qu’elle y renonçait à regret.
    « Toi, ma belle, sitôt que j’en aurai le temps… »
    Il se hâta.
     
    *
     
    Jean de Montfort avait repris conscience. Sur le banc, à son chevet, un bouillon fumait dans le hanap qu’Isaure venait d’apporter.
    — Ah ! messire duc, dit-elle, vous allez guérir.
    Le Breton grommela : « Vous croyez ? » Il avait perdu sa pâleur. Le linge de son épaule était brun de sang sec. Ogier souleva les couvertures et vit la bande ceinturant le torse teintée de rouge : la navrure suintait toujours. Peut-être eût-il fallu coudre les lèvres de la plaie. « Il va devoir rester près de nous un bon mois… si ce n’est davantage ! » Il effleura des doigts le front du blessé en s’attendant à le trouver brûlant. Sa tiédeur le rassura. Levant les yeux vers son père, il voulut obtenir son avis quand Isaure l’en empêcha :
    — Soulevez-le, messires, que je glisse un chevet [159] dans son dos.
    Ils soutinrent Montfort et perçurent un soupir de douleur tandis qu’Isaure lui présentait le hanap :
    — Buvez, monseigneur ! C’est un brouet de poule avec des herbes.
    En dépit des périls, soucis et privations, elle était enjouée, grassouillette. Sa coiffe, d’une blancheur de craie, gonflait de partout tant elle y avait, sans

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