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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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interrogea Audrehem.
    – Certes ! Ils durent s’apprêter en silence, les gardes leur étant complices.
    Tristan vit le gros Arnoul taper sur l’épaule de Guesclin.
    – Ha ! Ha ! Compère… Nous toucherons davantage lors des partages… Revenons nous coucher… Bonne nuit !
    On attendit l’Archiprêtre. On envoya quelques cou reurs à sa rencontre. Ils revinrent seuls, plongeant Guesclin et ses compères dans la perplexité.
    Pendant deux jours, certains routiers se livrèrent à leur habituel plaisir : la rapine. La bonne gent de Béziers put voir, du haut de ses murailles, des maisons devenir cendre et des bestiaux, des volailles sacrifiés sur l’autel de la malefaim pour des milliers d’hommes pourtant repus de mangeailles et de buveries incessantes. Le vin suscitait des litiges, les litiges des querelles, les querelles des provocations, les provocations des échauffourées à l’issue desquelles on ensépulturait parfois des hommes. Bourbon disparut deux jours. À son retour la rumeur prétendit qu’il était allé visiter son cousin Anjou à Carcassonne, ce qui semblait improbable et même, affirma Tristan, infaisable. Les Grands soutinrent – en l’absence de Guesclin – qu’il avait pris soin d’informer les Aragonais de la singularité de l’ost qui allait affronter les armées de don Pèdre.
    Et l’on repartit. Narbonne étant bien bastillée, on campa loin des murs. On attendit encore l’Archiprêtre et l’on devina enfin qu’il ne viendrait pas, ce qui satisfit Tristan et son beau-père.
    Entre Narbonne et Perpignan, on vit arriver en grand bobant – armures de fer, bannières, chevalerie de trente ou quarante seigneurs – quelques Aragonais qui, usant de l’apparat guerrier, signifiaient tacitement que l’on pénétrait dans leur royaume. Le roi Pierre IV le Cérémonieux, justifiant son surnom, se faisait représenter par don Alfonso, comte de Dénia, son cousin germain Connaissait-il Bourbon ? Ce fut vers lui qu’il mena son cheval. Tristan put lire du mécontentement sur la face de Guesclin et de la fureur chez tous les prud’hommes, tandis que le cousin de la défunte reine Blanche, pour assouplir ces premières solennités, présentait son alter ego en termes élogieux :
    –  Messires, evvous 267 l’homme dont vous avez certainement ouï-parler, la Fleur de notre Chevalerie : Bertrand Guesclin.
    Le comte sourit sans s’incliner. On eût dit que sa cuirasse de fer l’en empêchait. Il ne desserra pas ses mains des rênes cloutées d’or pour un geste de bienvenue : d’un coup d’œil il avait vu l’ost français et jugé ses meneurs.
    –  Que era buen caballero de armas ! dit-il à l’un de ses suivants dont la hautaineté égalait la sienne.
    C’était un homme à la peau bistrée, la face ceinte d’un filet de barbe brune, la lèvre supérieure assombrie de poils finement taillés. Son harnois n’avait rien à envier à ceux qui sortaient des armureries de France.
    – Nous allons nous, Français, vous apporter la victoire !
    Dans l’ombre du bassinet où il semblait sommeiller, le regard de Dénia s’illumina pour pénétrer celui de Guesclin qui se mit à ciller des paupières.
    – Pour colorer et embellir notre fait, messire comte, nous enverrons des messages 268 au roi Pèdre, l’excommunié, l’ami des Juifs et des Mahoms !… En êtes-vous d’accord ?
    Dénia parut évaluer, sur ces mots, l’orgueil et la condescendance du Breton. Un sourire glissa sur sa bouche :
    – Messire, ce serait envoyer ces chevaucheurs à la mort.
    Il semblait peu disposé à s’exprimer davantage. Il acceptait Guesclin et ceux qui l’entouraient – prud’hommes vaniteux et malandrins débonnaires – avec une répugnance évidente. Ce fidalgo 269 devait détester les rustiques. Alors, s’agissant d’une armée qu’on eût dite assemblée par Belzébuth lui-même…
    – Messire Guesclin, et vous aussi, messires chevaliers, cette guerre sera laide. Charles, que vous appelez le Mauvais, s’est accointé à don Pèdre. Il s’est engagé à le soutenir de ses forces, de ses finances et de sa personne. Il est…
    – Ha ! Ha ! trancha vigoureusement Guesclin. Ses forces ? Le Mauvais n’en a point… Ses finances ? Son trésor est à sec !… Sa personne ? Il n’a jamais ostoyé. Non seulement il se gardera de commencer, mais il n’osera jamais se mêler d’une guerre perdue d’avance !
    Jusque-là, aucun des prud’hommes de

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