Les fontaines de sang
celles avecque lesquelles le dit traictié a été fait par nous et par le dit maréchal ; item que nous mettrons tout notre pouvoir à emmener avec nous hors dudit royaume l’Arceprestre et aussi à mettre hors du dit royaume tous les gens du dit Arceprestre, etc. » Paris, 13 août 1362. (Archives du royaume, section historique, carton J 603-58 – et dom Vaissette : Histoire du Languedoc, tome II, page 316.)
Comme on peut le constater, une des toutes premières préoccupations des signataires pour la France était de purger le royaume d’Arnaud de Cervole et de ses routiers. Quant à l’expression « sur ce fait de nouvel »-figurant au commencement du traité, elle s’explique par l’existence d’une convention précédente, signée à Clermont-Ferrand par le comte de Trastamare et Arnoul d’Audrehem sur le passage des Compagnies en Espagne (579) .
Pierre IV d’Aragon s’accointait au Trastamare pour détrôner à frais communs le roi Pèdre :
Le roi d’Aragon : Nous vous promettons à vous, don Henri comte de Trastamare, de vous aider à conquérir le royaume de Castille bien et réellement, à condition que vous nous donnerez et serez tenu de nous livrer en franc et libre alleu, ave investiture royale, la sixième partie de tout ce que vous gagnerez au royaume de Castille, là où nous serons de notre personne, ou représenté par un de nos vassaux. Et tout de même que nous sommes tenus de vous aider à conquérir ledit royaume, ainsi serez-vous tenu vous-même de nous aider à l’encontre de tout homme au monde, et ce, avec ce que voit, aurez conquis, et à être l’ami de nos amis et l’ennemi de nos ennemis. Écrit de notre main à Monzon, le dernier jour de mars, l’an 1363.
Et moi, don Henri, je vous promets, sire roi, que j’accomplirai de bonne foi tout ce que je dois accomplir à votre égard, selon qu’il est dit par vous ci-dessus. Écrit de ma main, le jour que dessus. – Rex Petrus. – Moi le comte.
Ce pacte était destiné à demeurer secret. En effet, le Trastamare ne devait point ruiner son crédit en Castille ; Pierre IV ne devait par paraître rompre avec son frère don Fernard dont il avait autorisé naguère les prétentions au trône de Castille et qu’il sacrifiait délibérément à un aventurier, son ennemi. L’infant s’était opposé violemment à toute alliance avec le Trastamare. Il avait été soutenu, dans le conseil même du roi, par un grand nombre d’Aragonais qui voyaient avec jalousie g randir la faveur du bâtard castillan ; mais ses efforts avaient été vains et il ne dissimulait pas son dépit.
« Il fallait beaucoup d’assurance et une hardiesse en quelque sorte prophétique pour songer en ce moment au partage de la Castille », écrit Prosper Mérimée, à ce propos, dans son d on Pèdre. « Au contraire, l’ascendant de don Pèdre paraissait plus irrésistible que jamais. Jamais conquête ne sembla plus loin de se réaliser. Pendant que l’hiver suspendait les hostilités, il s’était ménagé un puissant auxiliaire. Il suffisait que la France se montrât favorable au roi d’Aragon pour que l’Angleterre en prît ombrage et fût disposée à soutenir l’ennemi déclaré de ce prince. »
Vers la fin de l’année 1362, des ambassadeurs castillans s’étaient rendus en Guyenne, auprès du prince de Galles, sous prétexte d’une concertation ayant pour objet le refoulement des Compagnies, mais en réalité pour lui proposer une alliance avec leur souverain. L’ébauche de cette alliance datait de 1358. On l’avait célébrée à la cathédrale Saint-Paul de Londres le 22 juin 1362. Elle fut conclue à Bordeaux au commencement de 1363 et ratifiée par Édouard III, le 1 er février suivant.
Voilà ce qu’il est important de savoir avant quelques autres données sur l’engagement des Français et des Compagnies en Espagne.
Il fallait un routier
Pour conduire des hommes de sac et de corde hors de France, il fallait évidemment un homme de leur espèce. Et davantage : un homme qu’ils pussent admirer et considérer comme un compère. Ce fut Guesclin.
Il avait le « culot », l’absence de scrupules, le goût du mal, la vanité de l’infliger. De plus, on lui fit savamment miroiter l’attrait d’une guerre sainte contre les Juifs et les Sarrasins. Il n’en fallait pas plus pour embraser son imagination. Quelque cruelle et ignoble qu’elle se présentât à son esprit, cette guerre serait juste.
Dans son
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