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Les fontaines de sang

Les fontaines de sang

Titel: Les fontaines de sang Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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frayeur que j’ai eue qu’ils l’occisent ou la violent, j’ai compris que je tenais à elle.
    – Elle t’aimera toujours plus que tu l’aimeras. L’autre t’amourait d’une façon divine.
    Le même mot ! Tristan s’en trouva ébahi.
    – Je te sais bon gré de me parler ainsi.
    – Je te serai bon gré de n’oublier point l’autre.
    *
    Ermeline accoucha d’un garçon robuste et brailleur qui reçut le nom de son père : Amaury. Luciane proposa que l’on restât quelques jours dans les murs pour que la jeune mère eût de bonnes relevailles. Tristan l’en dissuada :
    – Vos geôliers attendaient des compères conduits par le frère d’Herbault. S’ils sont nombreux, nous succomberons. Ermeline elle-même, dans son état, ne serait pas épargnée. Nous devons nous hâter, au contraire. Quitter Ganne vélocement.
    –  Nous irons lentement à Gratot, dit Ogier d’Argouges.
    Guillemette, toujours vouée à l’expédience, toujours vive et parfois souriante, malgré son deuil, s’adressa à Thierry et Paindorge :
    – Vous en savez autant que moi : Ermeline ne peut chevaucher sur une selle d’homme. Faites-lui une sorte de sambue 100 afin qu’elle garde ses jambes serrées. Luciane et moi préparerons de la charpie. Il faut prévoir des saignements.
    – Nous nous reposerons sitôt qu’elle le voudra.
    – Oui, mon petit Robert, ricana Tiercelet en frappant Paindorge sur la nuque pour une colée imaginaire. Tu veilleras sur la noble dame et sur le fruit de ses entrailles.
    Puis, abandonnant son acerbité pour sourire, de sa bouche édentée, aux captives impatientes de quitter Ganne :
    – Dames, savez-vous aller à cheval ?
    – Moi, oui, dit Marie de Giverville.
    Elle était brune, courtaude, enjouée, âgée de vingt-deux ans peut-être.
    – Je sais aussi, dit Béatrix d’Orbec, une jouvencelle rousse au visage rond, taché de son.
    – Je ferai de mon mieux, assura, rieuse, Adèle de Champsecret, qui était blonde avec des yeux de jais dans un visage fade.
    Tristan lui donna quarante ans et fut heureux que le seigneur de Gratot s’y intéressât plus qu’aux autres.
    – Et Ermeline ? demanda Thierry.
    – Je sais me tenir à cheval, dit la jeune femme en apparaissant, son fils dans ses bras, enveloppé d’une chemise. Mais qui portera mon enfant ?
    –  Moi, dame, dit Thierry.
    Elle s’inclina et ses yeux brillèrent. Ceux de Luciane également.
    – Vous sentez-vous, m’amie, capable de chevaucher ?
    – Il le faut.
    Tiercelet entraîna Paindorge :
    – Viens. Ce châtelet semble avoir été abandonné bien avant que les Navarrais en prennent possession. Nous l’allons visiter en hâte avant d’assembler les chevaux.
    – Qu’espères-tu trouver ?
    – Moult choses utiles. Ce serait marmouserie que de les laisser à d’autres.
    Quand la petite troupe quitta Ganne au pas lent des chevaux, elle emportait, enfardelés 101 sur les roncins de sa suite, les ajustements de fer des Navarrais, leurs armes, leurs vêtements de dessous, la nourriture et la boisson dont ils n’avaient point fait usage ainsi qu’un plein bissac de pièces de toute espèce – écus, florins, esterlins, marcs -, de la vaisselle d’or, un eucharistial d’argent rehaussé de perles et de diamants, quelques chandeliers et une grosse croix d’émail champlevé. Ogier d’Argouges s’était opposé à cette roberie ; sa fille, au contraire, s’en était montrée bien aise. Tiercelet, qui refusait que ce trésor retournât aux Navarrais, avait fait preuve de détermination : ce butin, c’était la juste réparation du préjudice commis contre les six otages. Et c’était entre elles qu’il le faudrait partager.
    – Et puis, messire Argouges, avait-il déclaré, oubliez-vous que si Raymond s’est fait occire à Cocherel et Matthieu à Ganne, c’est à cause des Navarrais ? Oubliez-vous que si nous n’étions intervenus à temps, ces malandrins auraient mené nos gentilfames à Chierbourc où là, nous ne les aurions pu sauver ? Rengainez vos scrupules : ils ne sont pas de mise.
    –  Il a raison, avait dit Thierry à son beau-frère.
    Sur cette approbation, l’on était parti pour La Pommeraye afin d’y prendre les autres chevaux. Tristan avait sellé Hermine pour Luciane avant de se jucher sur Alcazar – non sans avoir, préalablement, confié Coursan et Malaquin à Paindorge.
    Il avait pris plaisir à cheminer devant. Seul. Parfois il caressait le garrot du

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