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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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gens de Cour. Déjà, on préparait les carrosses, attelait en hâte
les chevaux, emportait les bagages les plus précieux.
    Monsieur le maréchal de Turenne trouva la
reine en pleurs puis rencontra un Mazarin d’une grande pâleur sous ses fards
mal répartis, tel que le laissait la surprise totale de la défaite de Bleneau.
    Néanmoins, en homme d’État ayant déjà affronté
de graves crises et d’autres exils précipités, il tentait d’envisager les
événements avec lucidité :
    — Monsieur le maréchal, le prince de
Condé ne doit en aucun cas s’emparer de la personne du roi.
    — Certes, monsieur le cardinal.
    — Quels sont les effectifs de l’armée de
la Fronde ?
    — D’après nos espions, dix mille.
    — D’après les miens, qui sont plus
nombreux et espions de métier, ils sont douze mille au moins, et quinze mille
au plus.
    Un court silence s’installa, puis le Premier
ministre questionna avec anxiété :
    — Combien d’hommes, en votre armée ?
    Le maréchal balança un instant, puis :
    — En comptant généreusement, quatre mille.
    — Alors nous avons perdu. Il faut quitter
Gien, détruire le pont sur la Loire et se retirer à Bourges.
    Turenne sursauta :
    — À Bourges ?… Un nouveau roi de
Bourges, tel Charles VII ?… Mais quelle ville ouvrira ses portes à un
roi battu qui fuit l’avance des factieux ?… Quel seigneur ambitieux, et
ils le sont tous, acceptera de tout risquer pour sauver un roi qui n’a de royal
que le titre ?…
    Le cardinal Mazarin réfléchit un long moment, puis :
    — Vous avez raison, monsieur le maréchal.
Mais que pouvons-nous faire ?
    — Il faut que la Cour et le roi, ainsi
que vous-même, demeuriez à Gien. Quant à moi, je vais affronter le prince de
Condé.
    — À un contre quatre ?
    Turenne hocha la tête :
    — Je vais d’abord tenter de ralentir son
avance. Et après de le vaincre, ou de mourir.
    — Nissac est avec vous ?… Il n’était
point à Bleneau ?
    — Nissac est à mes côtés. Avec tous ses
canons et la manière particulière de s’en servir qui est la sienne.
    Bien que légère jalousie lui coûtât de faire
tel aveu, Turenne ajouta, afin de raffermir le cardinal en ses nouvelles
dispositions :
    — Le comte de Nissac est le seul général
des deux armées, la Royale comme la Frondeuse, qui n’ait jamais été vaincu. Cela
explique pour partie qu’il soit follement aimé de ses canonniers qui pour lui, et
lui seul, réalisent grands prodiges. Pour les mêmes raisons, il inquiète la
Fronde et particulièrement le prince qui, pour l’avoir commandé, connaît sa
grande valeur. Monsieur le prince nous livrera bataille avec appréhension et, pour
l’avoir quelquefois éprouvée, je sais combien elle est mauvaise conseillère.
    Le cardinal Mazarin fut rendu soudainement
tout optimiste en entendant ces paroles tant elles étaient dites d’un ton calme
par le seul rival, au plus haut niveau, du « Grand Condé ».
    Turenne… Nissac et ses canonniers…
    « Avec de tels homme, je peux espérer
vaincre », songea Mazarin, impressionné, tout de même, par l’inégalité des
deux armées : quatre mille de ses cavaliers, fantassins et canonniers
allaient livrer bataille à douze mille, peut-être quinze mille des meilleurs
soldats de la Fronde commandés par leur plus brillant général.
    Nissac… Turenne…
    Le premier éveillait chez lui le sentiment de
l’aventure qu’il ne connaissait point, et ne connaîtrait jamais. Un général qui
bouleversait l’usage de l’artillerie, un comte de très ancienne noblesse qui, avec
ses Foulards Rouges, se conduisait en chef de bande bien-aimé du peuple et
admiré des belles dames, un homme, enfin, qui lui avait sauvé la vie et
repoussait avec hauteur toute proposition de récompense.
    Le maréchal de Turenne, soldat d’exception, qui
avait failli… mais par amour pour la trop belle duchesse de Longueville, ce qui
constituait sérieux et pardonnable motif.
    L’idée que ces deux hommes extraordinaires
allaient sans doute tomber dans les heures à venir créait chez le cardinal des
sentiments opposés et cependant complémentaires.
    Qu’ils meurent pour une cause dont il fut, et
demeurait sans doute, le plus ardent défenseur, flattait le cardinal. Que ces
hommes disparaissent le menait au bord d’une grande impression de vide. Mais
dans tous les cas se renforçait en lui le sentiment qu’à rallier de tels
soldats, la justice lui faisait

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