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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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ardent petit marquis, et que tout autre est son ambition. Aussi, devant
que de l’aider, voyons comme il se bat.
    Le marquis se battait en bel effet puisqu’il
blessa aussitôt un Condéen au visage et un autre au bras, avec un courage que l’obstination
rendait émouvant.
    Mais les Condéens, qui se trouvaient peut-être
hommes sans qualité en l’armée du prince, ne faisaient point montre d’un grand
enthousiasme au duel d’autant qu’ils avaient remarqué les foulards rouges aux
cous des compagnons du jeune fou qui leur cherchait mauvais parti.
    Aussi préférèrent-ils se retirer au grand
galop de leurs chevaux.
    Rosissant de fierté, le jeune Henri de
Plessis-Mesnil, marquis de Dautricourt, revint vers le comte de Nissac qui l’attendait
sans que nul signe, sur son visage, puisse indiquer les dispositions en
lesquelles il se trouvait.
    Le marquis remit l’épée au fourreau en disant
d’une voix forte et virile :
    — La chose est faite et l’affaire
entendue.
    — De quoi parlez-vous donc, monsieur ?
demanda Nissac.
    Le marquis perdit pied aussitôt pour entrer en
état de grande confusion :
    — Mais… Les Condéens, dont un officier, tout
de même !… Les voilà durablement défaits et en fuite.
    Le comte de Nissac se gratta la joue d’un air
dubitatif.
    — Ah ça, monsieur, parleriez-vous de ces
quatre soldats bien vieux qui pourraient être vos grands-pères et ont le bras
trop débile pour tenir une épée ?
    Le marquis eut un haut-le-corps.
    — Mais… Général… Monsieur le comte… Enfin,
il n’en est point ainsi. Ils avaient trente ans tout au plus.
    Nissac hocha la tête.
    — La chose est parfaite ! Si vous
les voyez de près et dites qu’ils ont trente ans quand je jurerais, moi, qu’ils
en avaient quatre-vingts, alors tout est en grande simplicité.
    — Mais encore, monsieur le comte ?
    — C’est moi qui suis bien vieux ! Merci
de votre franchise, marquis, car mes trop amicaux compagnons qui ne voulaient
point que je m’alarme ne m’avaient pas encore entretenu de mon grand âge et des
dérèglements qu’il entraîne. À présent, j’irai en la vie sans plus d’illusions !…
Je m’en vais demander audience au roi et le prier de me donner pension de vieux
soldat : une soupe au lait, un verre de vin, tabac pour ma vieille pipe en
terre, bonne place sous le manteau de la cheminée de mon château…
    — Monsieur le comte ! répondit le
marquis, hésitant entre stupéfaction et profond chagrin d’avoir ainsi alarmé
son général.
    Puis, tandis que le comte de Nissac fouillait
en un sac de cuir attaché à l’arçon de sa selle, le marquis prit conscience des
visages souriants qui l’observaient et en fut tout décontenancé, ne sachant s’il
devait y voir sympathie en raison de l’injustice qui lui était faite ou, ce qui
eût été beaucoup plus grave, ironie méprisante.
    C’est alors que le comte, un foulard rouge à
la main et qu’il venait à l’instant de sortir du sac de cuir, dit au jeune
homme :
    — Approchez votre cheval au côté du mien,
monsieur.
    N’osant deviner le traitement qu’on lui
réservait peut-être, si ses grandes espérances devenaient réalité, le jeune
homme approcha son cheval de celui du comte si bien que les deux hommes se
trouvaient botte à botte, mais face à face.
    Nissac adopta un ton sinistre qui ne laissait
rien présager de bon :
    — Henri de Plessis-Mesnil, marquis de
Dautricourt, quoique vous ayez agi seul alors que l’esprit de notre petite
société est celui du groupe, quoique vous fûtes bien téméraire avec adversaires
condéens plus forts en nombre à défaut de valeur, quoique je vous trouve fol, et
depuis longtemps déjà, moi, comte de Nissac, général en l’artillerie du roi, je
fais de vous, sans regret, en ne balançant point un seul instant…
    Le comte sourit et reprit d’une voix plus
fraternelle :
    — … et même avec fierté, membre de la
société des Foulards Rouges où n’entrent que les braves parmi les braves.
    Nissac se pencha légèrement sur sa selle et
noua le foulard rouge autour du cou du jeune homme qui pleurait de joie, de
bonheur et de fierté.
    Nissac lui donna une petite claque sur la joue
en précisant :
    — Remettez-vous donc, monsieur, que nous
vous disions vos privilèges ! Allons, Melchior !
    Le baron Melchior Le Clair de Lafitte, amusé, expliqua :
    — Vous avez le droit d’être pendu ou roué…
    Sébastien de Frontignac

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