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Les galères de l'orfêvre

Les galères de l'orfêvre

Titel: Les galères de l'orfêvre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Christophe Duchon-Doris
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rez-de-chaussée.
    — Nous sommes face à deux puissances, dit-il à la fin en lui caressant les cheveux, celle de l’Orfèvre et celle de l’intendant. Elles nous menacent toutes deux. Et la seule façon de nous sortir de l’impasse dans laquelle nous sommes, c’est de jouer l’une contre l’autre. Mais laquelle choisir ?
    — Nous ne pouvons faire aucune confiance à Montmor, dit-elle très vite et à voix basse. Il est notre ennemi alors que l’Orfèvre nous a protégés l’un et l’autre et nous permet de nous réunir.
    — C’est vrai. Mais vous oubliez une chose, Delphine : l’Orfèvre est un assassin et je ne partirai pas d’ici tant que je n’aurai pas vengé Mme de Saintonges.
    Il se leva, le sang fouetté par le souvenir de son serment et par la douleur qui de nouveau lui serrait le ventre. Il enfila son caleçon et sa chemise de toile. Il se mit à marcher de long en large dans la pièce et ses pommettes s’emplirent de l’ombre rouge des chandelles.
    — Voilà ce que nous devons faire, dit-il à voix basse. Découvrir l’identité de l’Orfèvre. J’en sais assez sur ses réseaux pour rédiger un rapport qui satisfera Sa Majesté. Nous l’échangerons à M. de Montmor contre notre liberté. Et la justice du roi punira l’assassin comme il le mérite.
    — Elle l’enverra aux galères ?
    Des mèches de cheveux tombaient sur son visage qu’elle écarta aussitôt d’un mouvement nerveux de la main. Ce n’était pas le bon choix, elle le sentait. Pour rien au monde, elle ne voulait être redevable envers l’intendant général.
    — Vous devez tout me raconter, dit-il. Tout ce que vous savez de ce Jean Gallion. En recoupant nos informations, je suis certain que le visage de l’Orfèvre apparaîtra.
    Elle reprit lentement ce qu’elle lui avait déjà révélé : le couvent dont les moeurs étaient dénoncées, la réaction de l’évêché, l’envoyé de Jean Gallion puis sa révocation, la fermeture du couvent.
    — Bien, dit-il sans cesser d’arpenter la pièce. Nous avons là des informations précieuses. Tout laisse à penser que ce Jean Gallion est bien notre Orfèvre. L’un et l’autre, on le sait, parlent latin et grec et connaissent les Écritures. Mme de Saintonges et ses amis ont dénoncé Jean Gallion alors qu’il avait été envoyé comme l’ange de l’épisode biblique punir une nouvelle Sodome. Il leur doit sa condamnation aux galères. Et il s’est vengé d’elles en envoyant ses forçats les assassiner.
    — Je sais aussi, ajouta-t-elle en levant l’index, qu’il a une jambe de bois. Sophie, la fille qui m’a recueillie, est formelle là-dessus.
    Il se retourna, le sourcil levé, l’oeil en ébullition.
    — Une jambe de bois ? Ce serait inespéré. Si c’est vrai, nous le tenons ! Nous connaissons son nom d’origine, son année d’entrée aux galères et un détail physique qui a dû être consigné sur l’un des registres de l’écrivain du 5 e  bureau. Il suffit d’y aller voir !
    — Il y a quelque chose qui cloche, dit Delphine. Voilà près de trente ans, à ce que vous me dites, que l’Orfèvre tisse sa toile, qu’il rend des services et, en échange, exige qu’on lui en rende. Il aurait pu cent fois envoyer des tueurs. Pourquoi avoir attendu maintenant pour se venger de ces femmes ?
    — Je ne sais pas. Vous le lui demanderez.
    Il lui sourit aussitôt, regrettant ce mouvement d’humeur. Mais elle ne lui en tenait pas rigueur. Elle se leva, soucieuse, en secouant ses cheveux blonds. Elle aurait voulu le convaincre de ne pas jouer la carte de M. de Montmor. Et puis, il y avait une autre crainte, diffuse, qui était là au fond d’elle à grimacer et dont elle n’arrivait pas à arracher le masque.
    — Et ne trouvez-vous pas bizarre, dit-elle encore, que votre Orfèvre soit si peu méfiant ? Qu’il nous laisse là tranquillement à comploter contre lui ? Que cet homme qui cherche partout et toujours à tirer bénéfice n’ait pas, en découvrant l’intérêt que nous porte l’intendant, songé à nous négocier auprès de lui ?
    Elle avait raison, il le savait. Il l’observa en train de s’habiller. Les lignes claires de ses épaules et de ses reins se détachaient avec des sécheresses félines. Elle penchait légèrement la tête pour nouer son corsage et sa nuque s’offrait, lisse et luisante comme l’eau du port tout à l’heure sous la lune.
    — De toute façon, dit-il, il nous faut identifier

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