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Les grandes dames de la Renaissance

Les grandes dames de la Renaissance

Titel: Les grandes dames de la Renaissance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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semaine…
    Alors la reine se désola.
    — Ne donnerai-je donc jamais d’héritier au roi ? disait-elle en pleurant. Sans doute sommes-nous l’objet d’une malédiction céleste.
    Cette idée, elle n’était pas la seule à l’avoir ; dans le menu peuple, la mort des petits princes était même considérée comme un châtiment du ciel.
    — Le roi et la reine paient aujourd’hui la faute qu’ils ont commise tous les deux à leur mariage, disait-on. Charles, en renvoyant sa fiancée et en enlevant la femme de Maximilien, a provoqué la colère de Dieu… Jamais de pareils parjures n’auront d’enfants vivants…
    Pourtant, il y avait quelques personnes qui expliquaient les choses différemment.
    — Ces morts subites sont bien curieuses, disaient-elles, et ressemblent fort à des empoisonnements. Un certain duc, qui a tout intérêt à voir disparaître les enfants du roi, ne serait-il pas pour quelque chose dans cette affaire ? Souvenez-vous de ce qu’on a raconté à propos du bal qui a suivi la mort du dauphin Charles. Ce duc avait l’air si joyeux que la reine dut le chasser de la Cour.
    Les accusations contre Louis d’Orléans prenaient parfois une curieuse tournure. On ne le soupçonnait pas d’« éliminer » les princes pour monter sur le trône, mais pour épouser, un jour, la reine Anne qu’il n’avait pas cessé d’aimer. Et l’on rappelait la clause du contrat de Langeais, qui précisait qu’au cas où Charles VIII mourrait le premier, sans laisser d’héritier, Anne devrait épouser son successeur…
    — On commence par empoisonner les enfants, puis, un jour, on empoisonne le père… Après quoi on n’a plus qu’à entrer dans le lit de la belle, disaient certains en riant.
    Mais de telles suppositions étaient trop horribles et les âmes pieuses les faisaient taire.
     
    Les mois passèrent, et un matin d’octobre 1497 Louis d’Orléans, voulant se réconcilier avec la reine, lui envoya un bijou. Touchée, Anne, qui n’attendait au fond qu’une occasion pour aimer de nouveau son ancien fiancé, lui fit cadeau de deux magnifiques lévriers.
    Dès lors, le duc d’Orléans fut sans cesse auprès de la petite reine de vingt ans. « Je suis votre protecteur, lui disait-il parfois en souriant, votre chevalier… » Et ses yeux devenaient incroyablement doux. Bientôt, l’amour et le désir que lui inspirait Anne finirent par être tellement visibles que toute la Cour en parla.
    Aussi est-on en droit de se demander si c’est uniquement pour des raisons politiques que le roi chassa à ce moment Louis d’Orléans, de son conseil d’abord, puis d’Amboise.
    Quoi qu’il en soit, le duc se rendit près de Blois, aux Montils et, furieux, renoua des relations avec les Vénitiens qui complotaient de sombres machinations, selon leur habitude…
    Or un matin le bruit courut que Charles VIII avait l’intention de faire arrêter le duc d’Orléans.
    La nouvelle était-elle exacte ? On ne le saura jamais, car deux jours plus tard, le 7 avril 1498, le roi mourait subitement après s’être cogné le front contre un linteau d’une porte basse, dans un couloir du château d’Amboise.
    Aussitôt, on parla d’assassinat. Des familiers de la Cour révélèrent qu’une demi-heure avant de s’assommer le roi avait reçu une orange d’un Italien et qu’il l’avait mangée.
    Cette orange était-elle empoisonnée ?
    On ne tarda pas à le murmurer. Surtout lorsqu’on vit Louis d’Orléans – que cette mort faisait monter sur le trône – se précipiter, rayonnant de joie, chez la reine pour lui dire des paroles de réconfort avec une tendresse un peu prématurée…
     
    Anne de Bretagne, nous dit un chroniqueur, montra un « vif déplaisir » à la mort du roi. Pendant deux jours, enfermée dans sa chambre, elle se roula par terre en poussant des hurlements et en se tordant les mains. À ceux qui venaient frapper à sa porte, elle déclarait qu’elle « avait résolu de prendre le chemin de son mari »… Et elle refusait toute nourriture.
    Sa douleur fut telle que les personnes de nature peu exubérante purent croire à quelque exagération de sa part.
    — Elle pleure bien fort un mari qui a passé sa vie à la tromper vilainement avec toutes les joueuses d’échine qu’il rencontrait, disaient certains.
    — Il est vrai, répondait-on, que ce n’est peut-être point le roi qu’elle pleure, mais la couronne…
    Quand elle consentit à sortir de sa

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