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Les guerriers fauves

Les guerriers fauves

Titel: Les guerriers fauves Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Viviane Moore
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d’années, pieds nus, la tignasse rousse en bataille, les habits rapiécés.
    — M’avez fait demander, mon maître ?
    — Oui, fit Giovanni. Le capitaine m’a dit que tu étais venu proposer tes services comme mousse. Tu as déjà navigué ?
    — Non, mon maître.
    — D’où es-tu ?
    Le gamin leva la main pour indiquer les terres derrière le château de Barfleur.
    — De la ferme des Roches, là au-dessus.
    — Et tu veux embarquer ?
    — On est trop là-haut. Et une petite soeur est née.
    — Alors, il faut que tu t’en ailles, conclut le Lombard en hochant la tête. Si tu travailles bien, tu mangeras bien, sinon...
    La mine chiffonnée s’éclaira d’une grimace qui se voulait un sourire. Manger bien, il n’avait jamais su ce que cela voulait dire.
    — J’suis point feignant, mon maître.
    — Nous verrons ça... Quel est ton nom ?
    — Bertil.
    — Eh bien, Bertil, retourne à bord, je demanderai au capitaine qu’il te fasse donner des habits en meilleur état. Allez !
    Le gamin ne se le fit pas dire deux fois et partit en courant vers le knörr. Le capitaine qui le croisa regarda son maître, la mine interrogative.
    — Ça ira pour celui-là, fit le Lombard.
    Ces deux-là se pratiquaient depuis un peu plus d’un an. Le capitaine Corato, petit homme nerveux, nature inquiète, avait toujours travaillé pour la famille Délia Luna, voyageant tout d’abord en Méditerranée avec Renato, le fils aîné, avant de se voir confier le cadet. Ils étaient aussi différents l’un de l’autre que chien et chat. L’un était insouciant, l’autre se souciait de tout. Pourtant Giovanni respectait le marin et, sans vouloir se l’avouer, craignait ses critiques. Quant à Corato, il vouait une admiration sans bornes au patriarche Délia Luna et à Renato à qui il envoyait à chaque escale des rapports détaillés. Après les démêlés administratifs ou les avaries, les agissements du cadet – relations avec les puterelles, duels, argent gaspillé – constituaient le principal objet de ses missives à ses maîtres.
    — Il nous en reste combien à bord, des mousses ?
    Le capitaine maugréa :
    — Y reste P’tit Jean et le Bigorneau. Ça sera pas de trop pour la cuisine et le lessivage du pont.
    — Et le cuistot ?
    — Toujours le même.
    Le visage de Giovanni s’éclaira :
    — C’est bien. Un homme qui sait vous faire prendre des sardines ou des harengs pour des pastieri est précieux ! Mais tu as la mine soucieuse, que se passe-t-il ?
    — Il nous manque un rameur.
    — Encore !
    — On l’a vu partir hier avec une gueuse. Et ce matin, il ne répond pas à l’appel.
    — Eh bien, nous nous en passerons !
    — Non, maître, protesta l’autre. J’ai besoin de tous mes gars. Nous sommes lourdement chargés, et je ne peux me permettre d’avoir un banc incomplet. À moins que vous ne vouliez faire travailler vos passagers.
    Giovanni haussa les épaules.
    — Que proposes-tu ?
    — Un gars de Barfleur m’a parlé d’un gaillard avec qui il a fait les derniers mois d’hiver. Bon rameur, à ce qu’il dit, avec le sens de la mer, et qui connaît cette côte jusqu’au Mont-Saint-Michel.
    — Où est-il ?
    — Il vous attend sur le bateau.
    — Prends-le ! S’il ne nous convient pas, on le jettera à l’eau. Va, je te fais confiance.
    Au lieu de se féliciter de cette remarque flatteuse, le capitaine pinça davantage les lèvres.
    — Je voulais aussi vous dire, ajouta-t-il, qu’il manque toujours la dame et son serviteur.
    — Oui, oui... Qu’est-ce qu’ils font ?
    Au moment où il disait ces mots, un char à bancs déboucha sur le quai.
    — Enfin, les voilà ! s’exclama Giovanni. Et où en est Harald avec l’esnèque ?
    — Il est prêt, lui aussi.
    — Parfait. Les droits du port ?
    — Tout est en règle, maître. Je m’en suis occupé.
    Pour un peu, Corato aurait haussé les épaules.
    Comme s’il ne savait pas où étaient ses devoirs !
    — La cargaison ?
    — Bien arrimée dans la cale, et serrée dans des toiles goudronnées.
    — Les rats ?
    — A priori aucun, et puis nous avons notre mascotte.
    — Ah oui, je l’oubliais, celui-là, marmonna Giovanni qui ne se tenait plus d’impatience. Parfait, nous allons pouvoir partir, sauf qu’il faut que je passe encore à la prévôté.
    — Un problème ? s’inquiéta le capitaine.
    Mais déjà Giovanni s’avançait, le sourire aux lèvres, à la rencontre

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