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Les hommes naissent tous le même jour - L'aurore - Tome I

Les hommes naissent tous le même jour - L'aurore - Tome I

Titel: Les hommes naissent tous le même jour - L'aurore - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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Anna.
    Quelques semaines plus tard, à l’ambassade de Berlin, il reconnut en Probichev l’un de ces hommes du N.K.V.D . Il se souvint des longs couloirs du bâtiment de la rue Sadovaia à Leningrad, des soldats rencontrés dans la petite gare alors que brûlaient les moissons, il se souvint de la question d’Anna Spasskaia. Le pire était-il sûr déjà ?
    Mais à Berlin, comment s’interroger longtemps ? La ville résonnait sous le pas cadencé des parades. Les prisons étaient pleines de camarades. Un jour les nazis attaqueraient la Russie. Ils tueraient peut-être Probichev mais aussi Marek, Ivan, Anna.
    Contre cet ennemi-là, d’abord, dresser les poings.
    Après on réglerait leurs comptes aux Probichev.
    Kostia fut le premier à remercier Karin Menninger de sa soirée. Il inclina la tête en direction du colonel Klein, dit à Karl Menninger :
    — J’espère, commandant, que vous accepterez de dîner à l’ambassade ?
    Puis il descendit rapidement l’escalier, évita les chauffeurs qui attendaient dans la cour, près de leurs voitures.
    Il avait demandé à Serguei, l’un des employés de l’ambassade, de se garer quelques pâtés de maisons plus loin, Jägerstrasse. Il reconnut la voiture, se dirigea vers elle lentement, ouvrit brusquement la portière, « roule, roule », dit-il.
    Serguei démarra. Personne ne les suivait.
    Berlin était désert malgré la tiédeur de la nuit. Quelques voitures sur Unter den Linden, les façades éclairées des cafés, des couples qui bavardaient devant l’entrée de l’hôtel Monopole : une ville inquiète ou assoupie.
    Kostia guidait Serguei, quelques mots à mi-voix, comme si on avait pu l’entendre : « Droite, attention ralentis. » Il apercevait les bâtiments de l’Opéra.
    La camarade qu’il allait rencontrer pour la première fois devait marcher dans Oberswallstrasse, s’arrêter au bout de cette rue, et à minuit quinze Kostia la rejoindrait. En une dizaine de minutes, il pouvait lui transmettre les consignes puis chacun pour soi, elle jusqu’à son hôtel – sur Unter den Linden – lui, à l’ambassade comme un diplomate qui rentre à pied après une soirée.
    David Wiesel, à Varsovie, avait fixé les conditions du rendez-vous. Aux objections de Kostia Loubanski, « elle est juive, à Berlin, elle sera surveillée », David répondait que les concerts de Sarah Berelovitz étaient arrêtés deux ans à l’avance, que sa réputation de pianiste la mettait à l’abri de tout soupçon.
    — Vous n’êtes pas mélomane, Loubanski, continuait Wiesel, mais Sarah est connue dans le monde entier, et depuis une quinzaine d’années. Elle est communiste depuis peu, Kostia, mais soliste depuis longtemps…
    Kostia avait appris par les journaux français que Sarah Berelovitz était bien arrivée à Berlin comme prévu, mais le concert qu’elle devait donner était annulé. Les autorités prétendaient que la salle retenue ne présentait pas les garanties de sécurité contre l’incendie exigées par la loi. Ils n’avaient pas osé expulser Sarah. La presse internationale eût crié au scandale.
    — Ralentis, dit encore Kostia.
    Oberwallstrasse vide, ligne droite dans laquelle maintenant la voiture s’engageait. Kostia aperçut la silhouette d’une femme qui marchait lentement, se dirigeant vers le bout de la rue.
    — Je descends, dit Kostia.
    Serguei ne s’arrêta que quelques secondes. Kostia avait déjà atteint le trottoir quand la voiture redémarra. Il vit que la jeune femme portait comme convenu un chapeau de pluie en caoutchouc plié sous le bras gauche. Elle l’entendait marcher derrière elle mais elle ne se retournait pas, cependant elle avançait plus lentement encore, laissant Kostia arriver à sa hauteur lui demander :
    — Vous craignez la pluie ?
    Elle le regarda alors. Elle portait les cheveux mi-longs, les mèches frisées comme en ont souvent les juifs d’Europe centrale et à Berlin cette coiffure était une provocation.
    — Je ne crains que les pianos désaccordés, dit-elle.
    Kostia sourit, hocha la tête, lui prit le bras.
    — Idiot, dit-il. Ces phrases de reconnaissance sont toujours comiques.
    Elle sourit à son tour, s’appuyant à son bras.
    — C’est la première fois, dit-elle, je suis très émue.
    Kostia lui serra le poignet.
    — Merci, dit-il.
    Elle retira son bras, mit son chapeau dont elle releva le bord.
    — Je ne fais pas cela pour être remerciée.
    Kostia sourit à

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