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Les hommes perdus

Les hommes perdus

Titel: Les hommes perdus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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mille combattants.
    Trois mille, à peu près, munis de canons, veillaient aux barrières. Six mille garnissaient le réduit central. Berruyer et ses « patriotes de 89 », dotés de quatre pièces, tenaient les Feuillants, le débouché de la place Vendôme dans la rue Saint-Honoré, les passages du Manège : en somme tous les points par lesquels les rebelles de la rive droite tenteraient peut-être une attaque en flanc.
    À l’ouest, le général Monchoisy couvrait les arrières en occupant le fond du Jardin national, devant le Grand bassin sali de feuilles mortes, le Pont-Tournant, les terrasses. Il poussait des postes sur la place et le pont de la Révolution, ainsi qu’au sortir de la ci-devant rue Royale. Comme au 9-Thermidor, Barras se souciait de ménager à la Convention une retraite vers Saint-Cloud en cas de défaite. Cette mission incombait au 21 e  chasseurs rangé, carabine au poing, sur la place de la Révolution, à l’endroit même où la guillotine avait tranché les têtes de Marie-Antoinette, de Danton et de Robespierre.
    Au long de la Seine, sur la terrasse du Bord-de-l’Eau, inaccessible, on ne voyait qu’une dizaine d’invalides en sentinelles. Plus haut, le général Verdière, établi sur le Pont-National (autrefois Royal) avec un bataillon de ligne et quatre canons, fermait l’accès vers les Tuileries aux sections de la rive gauche, spécialement à celles du faubourg Saint-Germain peuplé d’émigrés. Plus haut encore, Carteaux, fort des mêmes effectifs, avait mis en batterie ses quatre canons au milieu du Pont-Neuf, sous les fenêtres de Jean Dubon. Gabrielle et Claudine, inquiètes, se demandaient si les scènes du 14Juillet et du 10Août allaient se reproduire.
    Carteaux devait interdire toute jonction entre insurgés arrivant les uns du Théâtre-Français par la rue de Thionville – ci-devant Dauphine –, les autres de la section Poissonnière et de la Chaussée d’Antin par la rue de la Monnaie.
    Enfin, une attaque de front se heurterait à Brune installé sur le Carrousel, avec l’état-major, devant les grilles de la Convention. Sa troupe fermait les rues du Carrousel, de l’Échelle, Saint-Nicaise ; et les obusiers de la batterie divisionnaire amenée de Marly menaçaient tout autour de la place les maisons où l’ennemi se risquerait à s’embusquer pour tirer dans les cours des Tuileries. Brune commandait également la réserve générale : deux bataillons et dix pièces, qui attendaient de l’autre côté du Palais national, dans le jardin.
    Le système défensif ne présentait aucune faille. Le danger c’était que, malgré l’artillerie, la position fût submergée par le flot des vingt-cinq à vingt-sept mille hommes sur lesquels, selon les renseignements du bureau de police à la Commission des cinq, le comité insurrectionnel pouvait compter. Vingt-trois à vingt-cinq mille gardes nationaux seulement, des sections cossues, répondaient à son appel, sur les quarante mille de Paris. Le reste se composait de chouans, d’émigrés, de muscadins.
    « Bah ! remarqua Claude, causant devant chez lui avec Brune, au premier coup de canon les boutiquiers s’égailleront comme volées de moineaux.
    — Peut-être, mais les chouans ont mainte fois affronté la mitraille, et les muscadins ne sont pas tous des incroyables. Si ton ami Delmay était ici, il te dirait que des fantassins déterminés et en nombre réussissent fort bien à enlever des canons, à les tourner contre l’ennemi. Alors les bourgeois et les paole d’honneu reprendront courage. »
    Étonné de ne rencontrer nulle part Bernard parmi les généraux dévoués à la Convention – car son reste d’infirmité ne l’empêchait plus d’intervenir dans une telle circonstance –, Claude était monté le voir au bureau topographique. « Peu m’importe qu’on bataille dans Paris ! avait répondu Bernard. J’ai d’autres chats à fouetter. Pour nous, ici, la chose capitale, c’est de ramener Jourdan en sûreté. Au lieu de s’emparer d’Heidelberg, Pichegru l’a traîtreusement laissé à Kasdanovich après un simulacre d’attaque. L’armée de Sambre-et-Meuse, si l’on n’y remédie pas très rapidement, va se trouver prise entre le vieux Wurmser et Clerfayt, lequel, aux dernières dépêches, viole la ligne de neutralité prussienne. Tu juges si j’ai du temps à perdre ! Buonaparte, dit-on, s’occupe des royalistes ; leur affaire est donc réglée d’avance. »
    Il

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