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Les larmes du diable

Les larmes du diable

Titel: Les larmes du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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connaissaient le sort du petit mendiant. Elles ont eu grand-peur, messire Shardlake, mais elles savent se contrôler, ainsi qu’il sied à des jeunes filles comme il faut. Elles ont l’étoffe de véritables dames de qualité.
    — Elles ont l’étoffe de monstres diaboliques, comme leur frère ! » s’exclama Barak.
    La vieille femme l’ignora et poursuivit. « Nous avons attendu un jour ou deux pour voir si Elizabeth parlait, mais elle a gardé le silence. Joseph est venu nous dire qu’elle refusait de se défendre. Aussi avons-nous décidé que, si elle était disposée à mourir, autant la laisser faire. » Elle parlait d’une voix calme, comme s’il s’agissait d’une transaction commerciale.
    J’eus une quinte de toux sèche, puis lançai : « Eh bien ! madame, maintenant que vous nous avez tout dit, que comptez-vous faire ? »
    Elle sourit sans répondre. Je me rendis compte que mon cœur cognait à un rythme rapide, sans comprendre pourquoi. J’entendis des voix dans le vestibule, puis la porte d’entrée qui se refermait.
    « Peste ! fit Barak. Mes yeux ! J’y vois trouble ! »
    Je le regardai. Il avait le regard fixe, les pupilles dilatées. Je me souvins alors des yeux de Sabine, la première fois que j’étais venu. La belladone était terriblement toxique. J’en avais déjà vu les effets au monastère de Scarnsea.
    « On nous a fait boire du poison, soufflai-je.
    — Il agit rapidement », déclara la vieille dame d’une voix calme. Needler se dirigea vers la porte et tourna la clef dans la serrure, puis s’y adossa et se tourna vers nous, ses lourdes mâchoires crispées, l’air hostile.
    « Vous avez renvoyé les domestiques ? demanda dame Wentworth.
    — Je leur ai dit qu’il n’y avait plus rien à faire pour ce matin, et qu’ils pouvaient sortir prendre l’air pendant qu’il faisait encore frais après l’orage. » Il se tourna vers moi. « Vous pensiez que personne ne vous avait observés, la nuit où vous êtes descendus dans le puits. Mais ma maîtresse a entendu un bruit dans le verger. Elle m’a dit de me poster à la fenêtre pour regarder ce qui se passait. Je vous ai vus vous introduire dans le jardin, et le déplumé descendre dans le puits. »
    La vieille femme laissa fuser un vilain caquet : « Les aveugles ont l’ouïe très fine, messire Shardlake. Après cela, nous avons craint de voir arriver le constable. Comme rien ne se produisait, nous avons compris qu’Elizabeth devait toujours refuser de parler. »
    Barak voulut se lever, mais retomba sur son siège. « Je n’y vois plus », s’exclama-t-il. Sa tête se mit à dodeliner. Quel que fût le poison, il en avait bu plus que moi.
    Je voulus répondre, ma voix refusa de sortir de ma gorge. Je me revis debout près du buisson de belladone à Scarnsea, avec Guy qui me décrivait les effets du poison. La seule façon de les combattre, pourvu qu’on agisse très vite après l’absorption, était de prendre un émétique.
    Needler retourna prendre place derrière le fauteuil de sa maîtresse.
    « Nous nous sommes doutés que vous viendriez nous rendre visite, reprit celle-ci. C’était inévitable. » Elle eut un mauvais sourire en m’entendant respirer profondément pour essayer de calmer les battements de mon cœur. « À propos, le puits est vide et les cadavres dans la Tamise. Il est prêt à vous accueillir. Ensuite, nous nous occuperons de Joseph. » Elle avait baissé la voix, et chuchotait maintenant, attendant que nous glissions sur le sol. « Une vieille femme de la campagne connaît beaucoup de plantes vénéneuses, et nous avons un grand jardin aux simples. Ils s’affaiblissent, David, tuez-les à présent. »
    Le majordome avala sa salive. Le visage dur, il sortit un poignard et vint se placer derrière mon fauteuil avec une lenteur délibérée.
    C’est alors que je me souvins de la moutarde et de ses propriétés émétiques dont m’avait parlé Guy le jour où j’avais évoqué l’affaire Wentworth pour la première fois devant lui. Sachant que c’était ma dernière chance, je réussis à me lever, tremblant des pieds à la tête. Au prix d’un effort surhumain, Barak se mit debout lui aussi, chancelant, et dégagea maladroitement de son fourreau son épée. Il semblait avoir toujours la vue aussi brouillée. Les yeux de Needler allaient de l’un à l’autre et il parut soudain hésiter. Saisissant le pot de moutarde, j’en avalai une cuillerée sous le regard médusé de

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