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Les Lavandières de Brocéliande

Les Lavandières de Brocéliande

Titel: Les Lavandières de Brocéliande Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edouard Brasey
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rendez-vous.
    – Tiens donc… Et depuis quand fréquentes-tu Philippe de Montfort ? Car il s’agit bien de ce Philippe-là, je suppose ?
    Dahud avait adopté un ton ironique, presque cassant. La simple idée que sa fille puisse se trouver dans le même lieu que le jeune aristocrate, en pleine nuit et au bord du lavoir par surcroît, lui paraissait si absurde qu’elle était davantage disposée à en rire qu’à s’en émouvoir.
    – Oui, c’est bien lui, répondit Annaïg en essayant de ne pas se laisser désarmer par l’attitude insolente de sa mère. Et ce n’est pas la première fois qu’il me rejoint là-bas. Je l’aime…
    Le sourire de Dahud s’effaça instantanément. Son regard devint aussi noir que de l’encre. Avec une vivacité stupéfiante, elle leva sa main droite et l’abattit en une gifle retentissante sur la joue d’Annaïg. Sous le choc, celle-ci se releva d’un bond, faisant choir le banc avec fracas. Elle se tenait la joue et fixait sa mère avec une expression de haine.
    – Oui, je l’aime ! Et personne ne pourra m’en empêcher. Pas même toi ! Surtout pas toi !
    – Ma pauvre fille, si tu te voyais…, lâcha Dahud d’un ton méprisant.
    – Eh bien quoi ? se mit à hurler Annaïg, les nerfs à vif. Qu’est-ce que ça veut dire encore ? Que je ne suis pas assez bien pour lui ? Pas assez belle ? Pas assez riche ? Cela ne l’a pas empêché de me faire la cour et même plus. D’ailleurs, j’attends un enfant de lui !
    Le visage de Dahud devint blême. Les moqueries et la colère laissaient place à la stupéfaction. Sa tête dodelinait de nouveau et son regard redevint flou, comme si elle cherchait à se réfugier dans l’ivresse.
    – Non…, bégayait-elle. Ce n’est pas vrai… Ce n’est pas vrai…
    – Si, c’est vrai ! martelait Annaïg en frappant le sol de son sabot. Je ne voulais pas te le dire, car je savais bien que tu ne comprendrais pas. Mais le père Jean a insisté…
    – Quoi ? Tu es allée parler au recteur ?
    – À qui veux-tu que j’en parle ? Je suis allée me confesser, si tu veux savoir. Il m’a écoutée, lui, au moins. Il ne m’a pas traitée en pestiférée !
    – Mon Dieu…, chuchota Dahud, prenant enfin conscience de la situation. Et… tu l’as dit à Philippe ?
    – Bien sûr que je le lui ai dit ! rugit Annaïg. Je le lui ai dit tout à l’heure, au doué . Il s’est enfui sans un seul mot. Il m’a abandonnée…
    À présent qu’elle avait tout avoué, la jeune fille était à bout de nerfs. Elle éclata en sanglots. Dahud continuait à hocher la tête comme une folle.
    – C’est toujours la même histoire qui se répète, marmonnait-elle. C’est toujours la même histoire, encore et encore…
    Puis elle parut revenir à la réalité et considéra sa fille. Son regard s’attarda sur son ventre.
    – Ça fait combien de temps ?
    Annaïg répondit entre deux hoquets.
    – Trois lunes… Trois lunes entières…
    Dahud réfléchit un instant, puis reprit d’un ton assuré :
    – Trois lunes… Il n’y a pas de temps à perdre.
    Elle se leva de son siège avec une étonnante vélocité et se précipita vers l’étagère où elle rangeait ses flacons. Elle était à présent totalement maîtresse d’elle-même.
    – Annaïg, va chercher de l’eau au puits et mets-la à bouillir. Trois litres, pas un de moins.
    La jeune fille marqua un temps d’arrêt.
    – De l’eau ? Mais pour quoi faire ?
    – Pose pas de questions, la rabroua Dahud. Trois lunes, c’est beaucoup, mais je connais des potions qui peuvent encore faire effet… Allez, dépêche-toi !
    Annaïg commençait à comprendre quelles étaient les intentions de Dahud et la regardait avec effroi.
    – Mais… Tu ne vas pas…
    – Trois lunes, c’est beaucoup trop, répéta Dahud en ouvrant un à un les pots en verre pour y choisir des extraits de plante, des morceaux d’écorce et de racine. T’aurais pas dû attendre si longtemps. Un mois, six semaines, ça va encore. Mais trois lunes… Douze semaines… Enfin, on va toujours essayer… Cours chercher l’eau, je te dis !
    Annaïg restait plantée là, la bouche ouverte. Elle se refusait à admettre ce que sa mère était en train de manigancer.
    – Mais… Le père Jean m’a dit… enfin, il m’a expliqué que c’était un cadeau du Ciel… Que je devais l’accepter… Que Philippe allait assumer ses responsabilités…
    Dahud se retourna d’un bloc dans sa

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