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Les Lavandières de Brocéliande

Les Lavandières de Brocéliande

Titel: Les Lavandières de Brocéliande Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edouard Brasey
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avait jadis commis des actes que Philippe était parfaitement capable de commettre à son tour. Et si ce dernier avait franchi certaines limites que Hubert, parlâcheté plus encore que par conscience, avait respectées, cela ne rendait pas ce dernier moins coupable. Tous deux étaient solidaires des actes répréhensibles qu’ils avaient perpétrés, ils étaient même complices, en quelque sorte, et le même scandale les éclabousserait.
    – J’ai appris une terrible nouvelle ce matin, poursuivit Hubert. Annaïg Le Borgne a été tuée la nuit dernière au lavoir. On dit que tu la fréquentais, est-ce vrai ?
    Philippe cilla à peine à l’annonce du décès de sa maîtresse. Il aurait dû être surpris, choqué même, mais sa première réaction fut de se dire que cela n’avait rien d’étonnant. La pauvre fille, sans doute, n’avait pas supporté sa réaction lorsqu’elle lui avait appris qu’elle était enceinte de lui. Sous le coup du désespoir, elle avait mis fin à ses jours en se jetant dans le bassin. C’était bien triste, il est vrai, sordide, même, mais Philippe n’y était pour rien. Qu’aurait-il pu faire pour aider la malheureuse ? Rien. Ils n’étaient pas de la même classe ni du même monde. Ils ne pouvaient espérer aucun avenir ensemble. Il s’était amusé avec elle, certes, mais il pensait que ces divertissements étaient réciproques. Jamais il n’aurait songé qu’Annaïg ait pu prendre leur liaison au sérieux, jusqu’à accepter de porter un enfant de lui. Et se donner la mort lorsqu’elle avait réalisé que sa passion était impossible. Oui, Philippe regrettait la triste fin de la pauvre Annaïg. Mais il devait bien reconnaître que sa disparition arrangeait bien des choses. Leurs relations étaient demeurées discrètes, et personne au village n’était au courant de leur idylle, même si la rumeur circulait au sein des lavandières. Mais une rumeur n’est rien d’autre qu’un vent qui flotte sur les lèvres puis s’envole et disparaît. Une rumeur n’est pas une preuve. Pour ne pas l’accréditer, et se tenir en dehors de cette sombre affaire, il suffisait à Philippe de tout nier en bloc.
    – Je ne sais pas dans quel cloaque vous avez été puiser ces racontars, père, mais sachez qu’ils sont diffamants. Je vous rappelle que je suis fiancé…
    Hubert ne put s’empêcher de laisser transparaître un sourire narquois sur ses lèvres minces.
    – Rozenn ? Je suis ravi que tu te souviennes de son existence. Je n’ai guère constaté ton empressement à son égard, ces derniers temps…
    – À qui la faute ? se rebiffa Philippe. Vous avez décidé de la retenir prisonnière entre ces vieux murs et de lui interdire toute sortie. Devrais-je en faire autant et demeurer cloîtré ici comme un moine ?
    – Un moine qui sera bientôt père, je te le rappelle, Philippe. Père et mari.
    Le visage du jeune homme s’empourpra et ses mains commencèrent à trembler d’une rage contenue.
    – Vous n’avez pas à me le rappeler, père ! Je sais exactement quelles sont mes responsabilités.
    – Vraiment ? s’emporta Hubert en haussant le ton. Es-tu bien sûr de ne pas avoir eu à l’égard d’Annaïg les mêmes responsabilités que celles qui t’incombent avec Rozenn ? Es-tu bien sûr de ne pas avoir cherché à y échapper d’une façon… drastique ?
    – Que voulez-vous dire ? répliqua Philippe, de plus en plus tendu.
    – Si tu veux que je te protège, tu dois me dire la vérité, Philippe ! Es-tu responsable de la mort d’Annaïg Le Borgne ?
    Le jeune homme fixa son père d’un air incrédule. Cette question, aussi directe qu’inattendue, le laissait stupéfait.
    – Comment osez-vous proférer de telles accusations ? se rebiffa-t-il.
    – Ces accusations, ce n’est pas moi qui les ai formulées,Philippe. Sache que tu es dans une situation périlleuse, et je ne pourrai te défendre si tu ne m’aides pas. Il s’agit d’une affaire sérieuse, et les gendarmes ne vont sans doute pas tarder à t’interroger. Que leur diras-tu à propos de ton emploi du temps d’hier soir ?
    Philippe semblait enfin réaliser que, loin de faciliter les choses, la mort subite d’Annaïg risquait de le mettre en mauvaise posture. Mais de là à l’accuser de meurtre !
    – Je… Je suis allé faire une promenade à cheval après souper, comme vous le savez. Voilà ce que je leur dirai.
    – Et leur diras-tu que tu as profité de cette balade

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