Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les Lavandières de Brocéliande

Les Lavandières de Brocéliande

Titel: Les Lavandières de Brocéliande Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edouard Brasey
Vom Netzwerk:
sûr. Mais je ne pense pas que ta détermination soit suffisante pour les éloigner. Nous serons arrêtés comme complices, voilà tout. Et cela n’empêchera pas Loïc d’être pris. Non, Gwenn, il faut trouver une autre idée…
    – Une idée ? Mais laquelle ? Le temps presse… Sa tête est mise à prix, je te le rappelle.
    – Au fait, tu l’as vue, cette affiche ? De quoi Loïc est-il accusé, au juste ? s’enquit le vieil homme.
    – Les Allemands affirment qu’il fait partie de ceux qu’ils appellent les terroristes…
    – Les jeunes gens réfractaires au S.T.O. qui se sont réfugiés dans la forêt, c’est bien ça ? continua Yann avec un éclair de malice dans les yeux.
    – Oui, confirma Gwenn. On dit qu’ils sont rattachés à l’Armée secrète… Ce ne sont pas des terroristes, mais des résistants.
    – Je le sais, ma fille, je le sais. Et cela me donne une idée. Puisque les Allemands soupçonnent Loïc d’être un résistant, il ne sera en sécurité qu’au sein du groupe auquel il est censé appartenir.
    Gwenn jeta un regard incrédule au garde forestier.
    – Mais… Ce serait avouer qu’il…
    – … qu’il fait partie de l’Armée secrète ? C’est plus glorieux que d’être un criminel ou un collaborateur, tu ne penses pas ?
    – Tout le monde ignore où ils se cachent, Yann. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ils n’ont pas encore été arrêtés.
    – C’est bien pourquoi Loïc doit les rejoindre, affirma Yann d’un ton vainqueur. Sans le vouloir, les Allemands auront provoqué une nouvelle vocation de résistant. Loïc, es-tu prêt à intégrer l’Armée secrète ?
    Le charbonnier cligna des yeux, déglutit et se mit enfin à parler avec précipitation. Les mots trop longtemps contenus se bousculaient dans sa bouche.
    – Je les connais… On s’est croisés plusieurs fois dans les bois… De braves garçons… Vingt ans, à peine… Maisrespectueux… Eux ne se moquaient pas de moi, au moins. Peut-être parce qu’ils savaient ce que c’est, que d’être rejeté… Ils m’ont même donné la main pour les fouées … Mais ils ne m’ont pas dit où était leur camp. C’est un secret, ils ont dit… Personne doit le savoir.
    – Et si je t’y conduisais ? reprit Yann sur un ton mystérieux.
    – Tu sais où ils se trouvent ? interrogea Gwenn d’un ton de reproche. Si c’est le cas, tu as bien caché ton jeu…
    Le garde forestier la gratifia d’un sourire ouvert et franc.
    – Non, je l’ignore, ma fille… Mais je connais quelqu’un qui doit le savoir. Du moins je l’espère.
    – Et de qui s’agit-il ? Quelqu’un en qui nous pouvons avoir confiance ?
    Le sourire de Yann s’élargit jusqu’aux commissures de ses yeux.
    – C’est une vieille histoire… Mais nous pourrons avoir toute confiance, je peux te l’assurer. Allez, il ne s’agit pas de moisir ici. Mettons-nous en chemin sans tarder. Il ne faudrait pas que les Allemands ou les gendarmes trouvent Loïc ici. Vous allez venir avec moi.
    – Mais où cela ? s’étonna encore Gwenn.
    – De l’autre côté de la forêt. À Tréhorenteuc.

33
    L’église de Tréhorenteuc était en ruine depuis si longtemps qu’il était difficile d’imaginer qu’elle ait pu un jour être dotée d’une charpente complète, de murs solides ne menaçant pas de s’écrouler et de vitraux colorés laissant filtrer la lumière du jour en place de ces ouvertures nues par lesquelles s’engouffraient la pluie et les courants d’air. Insalubre et impropre à la tenue de la plus humble liturgie, le bâtiment religieux avait été abandonné depuis de nombreuses années. À la mort du dernier prêtre, à l’issue de la Première Guerre mondiale, le diocèse avait jugé inutile de le remplacer. Les travaux de restauration auraient coûté trop cher, et Tréhorenteuc n’était guère qu’un hameau. La paroisse comptait à peine cent cinquante habitants ne parlant que le gallo, ne connaissant ni Dieu ni diable, ni latin ni français.
    Pourtant, un nouveau recteur avait été désigné un an plus tôt, le jour de Pâques 1942, pour prendre en charge la paroisse fantôme et son église exposée à tous les vents. Il s’agissait de l’abbé Ernest Guilloux, un petit homme fluet d’une quarantaine d’années qui s’était mis à dos la hiérarchie ecclésiastique à cause de son caractère frondeur. Entre autres manquements aux dogmes en usage, le prêtre n’avait pas

Weitere Kostenlose Bücher