Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
et cliquetis de harnois et des tintements des bassines décrochées du bât de Tencendur et dans lesquelles Tinchebraye, Joubert, Courteille, Desfeux et Sapienza s’en iraient quérir la mangeaille.
    — Demain, Ogier, nous commencerons à les voir.
    — Sans doute… S’il m’advenait de ne pas revenir au pays, pour cause de malemort, prends bien soin de Blandine et de notre enfant.
    — Tu y reviendras ! Tu appartiens à ceux qui trépassent grands-pères !
    — Champartel a raison, dit Raymond tout en aidant Jaucourt à soulager Artus de sa selle. Dieu veille sur vous avec bienveillance.
    — Qui sait ? Qui sait si je mérite un tel soutien… Qui sait ce qu’est la mort pour Lui : une punition ou une récompense ?
    Chaque fois qu’il avait dû guerroyer, il avait accueilli cette nécessité d’un cœur tranquille sans éprouver le sentiment que son âme s’avilirait. Verser le sang, verser son sang en hurlant «  Montjoie-Saint-Denis ! » était une obligation à laquelle bien peu de nobles – et de gens du commun – pouvaient se soustraire. Avant que d’assaillir l’ennemi ou d’être assailli par lui, il se gavait la vue des contrées traversées pour se dire que la France était belle et valait la peine qu’on la défendît, même affligée sur son trône d’un Philippe VI de Valois. Ces jours-ci, rien ne l’avait intéressé : ni les arbres, ni les prés, ni les ruisseaux, ni le ciel pommelé. Rien ou presque. Il suivait l’armée sans plaisir, se préparant à la prochaine épreuve que le roi lui réserverait avec une bonne volonté qui peut-être était l’acceptation d’un châtiment mérité : «  Tu as fait du mal à Blandine, tu vas le payer. » Absurdité. Il attendait de l’affrontement de Calais, quel qu’en fut le jour, et surtout quelle que fut la forcennerie des adversaires, qu’il lui permît d’aller jusqu’au bout de lui-même.
    Jusqu’au bout de ses forces. Aurait-il à les employer ? Il se pouvait qu’avant la mêlée, un boulet de bombarde lui arrachât la tête ou lui ouvrît le ventre. On ne cessait de parler de ces armes qu’il trouvait, lui, déshonorantes, parce qu’elles tuaient de loin et sans aucun risque…
    « Voilà que je pense à elles comme si j’appartenais à un monde révolu ! »
    Se battre d’homme à homme à grands fracas d’épée : c’était beau, c’était mâlement beau… Se battrait-il d’homme à homme ?
    — Si nous ne nous quittons pas dans la presse, dit Crescentini, aucun de nous ne mourra !
    — Y aura-t-il seulement bataille ? interrogea Jaucourt en insérant la bannière de Thierry, roulée, dans sa custode. Je n’ai jamais vu la guerre de près, mais le roi Philippe, je le crains, ne m’en fournira pas l’occasion.
    — Tant mieux pour toi, peut-être, dit Tinchebraye.
     
    *
     
    Avant l’aube, les trompes sonnèrent et les tambours, pour la première fois, envahirent la nuit d’un long bourdonnement. Il y eut des protestations : «  Déjà ! – Merdaille ! – On ne peut plus dormir son soûl ? » Thierry et Ogier s’adoubèrent puis se joignirent aux chevaliers qui, certains une torche au poing, se dirigeaient vers le pavillon royal afin de savoir, disaient-ils, comment l’armée aborderait Calais.
    Le roi tenait conseil en plein air tandis que l’Henri, aux lueurs de quatre flambeaux, le revêtait de son armure.
    — Allons, allons, sergent, hâtez-vous de restraindre [327] ces plates !
    — Remuez moins, sire, et je me hâterai davantage.
    Philippe était nerveux. Chez ce mou qui, sans être un valétudinaire, semblait sécher sur pied, était-ce un bon ou mauvais signe ? Il souriait du bout de ses grosses lèvres, et quand il eut le torse pris dans son fer, il se cambra autant qu’il le pouvait puis tapota de l’index un parchemin étalé sur une table basse :
    — Messires, nous allons y aller… Mais en bonne et belle ordonnance, et malheur à tous ceux qui contreviendront aux mandements que je donnerai.
    C’était un ton nouveau. La leçon de Crécy avait-elle été salutaire ? Des barons, des grands seigneurs arrivaient, tels les ducs d’Athènes et de Bourbon qui ceignaient leur épée tout en trottinant dans leur fer. Les fils du roi apparurent l’un, Jean, prêt à combattre, l’autre, Philippe, vêtu d’une huque de lin sous laquelle il était nu. Puis vint Geoffroi de Charny, l’oriflamme au poing et le sire d’Offémont, qui ne s’était rasé

Weitere Kostenlose Bücher