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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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suffisamment aux Flamands pour nous engager dans une aventure avec les Goddons… » Pendant ce temps, confits dans leur coûteuse armure de fer, le roi, ses fils, les maréchaux et des centaines d’autres dissertaient peut-être sur les vertus de quelque vin, de quelque femme ou du dernier lai d’amour… Et Thierry ? Il devait s’angoisser. Raymond et les autres également.
    « Et moi, Argouges ? »
    C’était parce qu’il était différent de ces nobles outrecuidants que le roi, pour complaire à Charny, l’avait envoyé sur ces lieux avec les gens des communes… S’il mourait, il serait un preux ; s’il vivait, il aurait remporté une piètre victoire.
    Le fossé. Celui-ci avait-il des épieux au fond ? Il retint l’homme au pavois par sa ceinture :
    — Allez, demeure ici… Tu cherras le dernier.
    Il sauta, entraînant avec lui une coulée de sable et de mottes de terre et sentit aussitôt une odeur de charnier. C’était là, peut-être, qu’on avait enseveli au printemps les affamés de l’hiver dont les édiles de Calais s’étaient débarrassés peut-être sans remords et auxquels, sans remords non plus, Édouard avait refusé d’accorder le passage. Morts de faim et de froid. Morts l’estomac vide et le cœur plein de haine.
    Des hommes tombaient, par trois ou quatre, en criant. Ce fossé, plus profond que le précédent, rendait leur chute dangereuse. On se rompait un membre, on se coupait aux armes de ceux d’en-bas, et les tirs des Goddons étaient si efficaces qu’on ne se souciait point de la façon dont on atteindrait le creux, l’essentiel étant de se mettre à l’abri.
    Ogier ferma les yeux et les cris, les plaintes lui parurent excessifs.
    — Pas trop de morts ? Tinchebraye.
    — Moult moins que si nous avions couru !
    Ogier serra les dents, éprouvant soudain la sensation physique d’être vu – mais par qui  ? – et la certitude que si la tour, bientôt, serait française, le destin – mais ce pouvait être aussi la male chance – lui réservait une épreuve. Pourquoi ? Parce qu’il avait fait souffrir Blandine ? Il déraisonnait et fut soulagé de voir paraître le Borgne de Bapaume à sa gauche, comme il l’avait prévu. Ratbold et Le Doulx l’accompagnaient ; Marie, Trassignies et DeConinck arrivaient de l’autre côté.
    — Oh ! ils vous ont atteint.
    — L’épaule, messire, dit Trassignies. Ce n’est rien… Le plus gros reste à faire.
    — Nous le ferons, compères, et prouverons au roi que la ribaudaille vaut mieux que sa chevalerie !
    Présomption ? Effet d’une exaspération légitime ou d’une volonté de venger Joubert ? Les chefs tournaisiens avaient ri. Et approuvé.
    — Nous sommes des ribauds, des bidaus et gens de peu, messire, dit le Borgne. Mais à la Blanche-Tache, alors que la chevalerie tournait bride, nous avons tenu bon devant Northampton et ses démons… avant de nous jeter dans la Somme pour échapper à leur fureur. Nous avons l’honneur chevillé au cœur… Que faisons-nous ? Bientôt la nuit nous couvrira…
    — Une échelle…
    On en apporta une. Ogier y grimpa et, sa tête au ras du sol :
    — Nous sommes à dix toises de la tour… Juste devant la porte… As-tu quelques arbalétriers, le Borgne ?
    — Une vingtaine.
    — Fais-les chercher. Vingt sur quinze cents, la proportion me plaît, et pour une fois, ils seront utiles.
    Ils vinrent. Ils avaient des armes différentes : arbalètes à moufle, à tour, à cranequin. C’étaient des jeunes, Ogier s’en félicita :
    — Êtes-vous habiles ?
    — La plupart d’entre nous, messire, dit un brun, sont les meilleurs de par chez nous au papegai.
    — Bien !… Vous allez vous répartir autour de ce maudit beffroi, monter sur une échelle et pointer vos carreaux sur les archères… Tandis qu’autour de vous les autres courront à l’assaut, vous berserez [381] sur ces ouvertures. Ou vous occirez les archers qui sont derrière, ou vous gênerez leur tir.
    — Ils feront merveille ! affirma le Borgne.
    — Tirez coiteusement [382] au premier coup de trompe… On va vous donner le temps de vous aposter…
    Puis à nouveau tourné vers le Borgne et ses compères :
    — Nous disposons de grands pavois… J’en veux une trentaine ici, avec moi. Faites dégager l’aire autour de nous, faites amener cinq ou six échelles… Et réunissez ici vos meilleurs pavescheurs [383] …
    Il s’adossa au fossé tandis que Ratbold, Le Doulx

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