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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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haute si Tinchebraye et Joubert n’étaient réapparus.
    — Elle va mieux ? demanda le pennoncier.
    — Bien mieux… Qu’avez-vous vu ?
    — Des Goddons… Point trop, mais en suffisance pour nous cerner… Il faut guerpir !
    Ogier se releva, regarda tout autour, surtout le Clain éclaboussé de pourpre et d’or plus qu’aux précédents moments.
    — Voyez, dit Tinchebraye, le doigt tendu.
    Au bord de la rivière, à deux cents toises à peine, des guerriers de Derby allumaient un feu. Certains chantèrent tandis qu’aigrement, une cornemuse miaulait.
    — Guerpissons ! insista Tinchebraye.
    Ogier saisit les mains tendues de Blandine et l’aida à se relever.
    — Êtes-vous prête ?
    — Oui, Ogier.
    Cette façon chuchotée de dire son nom ! Elle l’aimait. Elle lui appartenait. Quand il la contemplait ou l’écoutait, son cœur s’emballait comme un destrier abroché au sang !
    — Et vous, êtes-vous prête à nous suivre ?
    Dame Berland soupira, se leva et frotta ses genoux sans répondre. Elle avança entre les hommes d’armes tandis qu’Ogier sentait à nouveau la main de Blandine dans la sienne, vivante et pressante comme cette hanche qui le touchait parfois.
    « Sitôt à Chauvigny, retrouve frère Isambert et fais-lui célébrer votre mariage. Pourquoi attendre ?… Tu te passeras du consentement d’Herbert Berland… Un consentement qu’il t’aurait refusé… Son épouse, elle, ne dira rien… Tu viens de lui sauver la vie. »
    Il fut englouti par l’ombre des ruines sans avoir eu conscience du chemin parcouru, sans même s’être méfié d’une possible escarmouche. Des murs dégradés s’élevaient parmi les buissons, et quatre gros moignons rudoyés par les vents et les pluies, vestiges de tours flanquantes, déchiraient de leurs dents ébréchées le grand suaire d’un nuage. De loin en loin un mur, deux ou trois piliers alignés, certains soutenant une arche aux dentelles mouillées d’argent, évoquaient un cloître mort, et quelques arbres droits, peu branchus, semblaient vouloir suppléer les colonnes absentes. C’était un lieu propice au repos malgré les cris et les chants tout proches.
    — Je n’en peux mais… gémit dame Berland.
    — Asseyons-nous un moment sur ces pierres… Vous deux, faites le guet.
    — Messire Ogier, vous avez tort ! reprocha Joubert.
    C’était du temps perdu, nul ne le savait mieux que lui. Il surprit le coup d’œil irrité que Tinchebraye adressait au pennoncier. Le rejoignant, il leur dit :
    — Il le faut… Vous-mêmes, vous croyez-vous si solides ?
    Si ses gestes, sa voix et sa détermination restaient nets, il sentait, lui aussi, ses capacités de vigueur et d’esprit endommagées par le lugubre cheminement sous terre. Il vit dame Berland prendre pour siège un socle de colonne. « Viens », dit-elle à sa fille, mais Blandine s’assit à même l’herbe. S’étant agenouillé, il la serra contre son flanc et la baisa sur la tempe sans qu’elle désapprouvât cette hardiesse. Il frissonnait autant qu’elle, mais pour une raison différente : elle, c’était le froid, et lui l’amour comblé. « Oui, tu dois l’épouser à Chauvigny… Frère Isambert en sera même réjoui ! » Le jour où il l’avait rencontrée, il s’était senti pris au piège le plus ancien et le plus simple pour devenir, de loin en loin, son propre inquisiteur : ce besoin lancinant de savoir si l’on plaît, si l’on vous chérit autant que vous chérissez, si l’on vous admire en dépit des imperfections nombreuses qu’on se trouve… Devant Blandine, il s’était découvert niais, sans ressources et dans l’incapacité d’aligner des mots doux, prenants, voire enchanteurs. Désempêtré de ce passé, sûr de l’amour qu’elle lui vouait, il demeurait anxieux. Pourtant, elle acceptait qu’il lui touchât un sein puis s’éloignait tandis que d’un clin d’œil elle montrait sa mère.
    — Êtes-vous déjà venue en ce lieu ?
    — Je suis parfois passée devant. Les Romains ont bâti ces temples. Ils ne sont plus qu’une carrière où les manants viennent emplir leurs charretons.
    Du fait, sans doute, de la présence de Blandine, Ogier sentait la grandeur de ces ruines. Peu importait comment ce sanctuaire avait été détruit. Refuge comme au temps de son intégrité, il les aidait à reprendre des forces.
    — Êtes-vous bien aise ainsi ?
    — Oui, Ogier… Mais vous tremblez !
    — Le

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