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Les noyés du grau de Narbonne: une enquête d'Erwin le Saxon

Les noyés du grau de Narbonne: une enquête d'Erwin le Saxon

Titel: Les noyés du grau de Narbonne: une enquête d'Erwin le Saxon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
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voile et s'engagea à la rame, avec précaution, sur un bras à demi mort de l'Aude. Il par≠vint de la sorte jusqu'à un débarcadère en piteux état.
    -
    Nous voici arrivés, annonça-t-il en désignant un édifice en pierre, flanqué d'une roue à aubes. C'est, comme tu t'en rends compte, un moulin. Le débit de cette déviation n'est plus assez abondant pour mettre ses meules en mouvement. Aussi n'est-il plus habité. Depuis peu. Nous y serons à l'aise, et tranquilles. Les chiens de chasse de tes missi ne risquent pas de nous débusquer ici. Allons !
    Passe devant moi, veux-tu! Je n'ai aucune
    confiance en toi et ne veux pas t'avoir derrière mon dos.
    A ta guise !
    Emmeran, Agnès sur ses talons, atteignit rapidement la b‚tisse qui se révéla en un meilleur état qu'on .n'aurait pu l'attendre d'une maison abandonnée. Néan≠moins l'endroit, avec ses eaux stagnantes, ses rives marécageuses et sombres, les coassements, les chuinte≠ments, les bruits furtifs qui troublaient le silence de cette nuit noire, exprimait des mystères qui, loin d'angoisser Agnès, lui remirent en mémoire, avec une vigueur enchanteresse, le temps point si lointain o˘, dans les marais de la Brenne, elle en était la gardienne ïet l'amie, o˘ elle les servait et les célébrait de tout son être. Alors, entourée de tous ses alliés et complices, forces de la terre, de l'eau et de l'air, tandis qu'Emme-ran frissonnait, en proie à une sourde angoisse, elle se sentit heureuse et invulnérable.
    Après avoir inspecté le logement du moulin à la lueur du falot qu'il avait apporté, Emmeran alluma trois lanternes dans la pièce d'habitation et alla ensuite chercher sur le bateau des fourrures et de la nourriture. Puis il entreprit de faire du feu dans la cheminée pour réchauffer la salle, fort humide. Il jeta tout à coup un regard sur sa captive qui s'était approchée du foyer et dont le visage était éclairé par les flammes. Il ne la reconnut plus. Elle se tenait, debout, immobile et hié≠ratique. Ses yeux luisaient étrangement, escarboucle et aiguÎ-marine, ses cheveux frémissaient et ondulaient comme des serpents flamboyants, ses lèvres étaient couleur de sang...
    Mal à l'aise, il se h‚ta de disposer sur un matelas de paille les fourrures destinées à la couche d'Agnès et il décida de s'installer en un autre endroit de la salle.
    Elle n'alla pas s'étendre immédiatement mais sortit du moulin pour humer l'air de la nuit et reconnaître les senteurs et odeurs qui émanaient de chaque lieu o˘ la vie, sous les aspects les plus divers et les plus surpre≠nants, continuait son úuvre inlassable. Il était déjà couché quand elle rentra et, à demi endormi, il l'aper≠çut vaguement qui gagnait son lieu de repos comme une forme légère, effleurant le sol.
    Le lendemain, à l'aube, quand il se réveilla, elle était déjà debout. Elle était allée faire sa toilette en un point o˘ coulait encore un filet d'eau fraîche. Elle avait repris un aspect à peu près rassurant. Pendant qu'ils déjeunaient, elle lui demanda pour quelle raison il l'avait attendue sur cette extension du port o˘ elle avait peu de raisons de se rendre. En fait, pendant toute sa déambulation sur les quais, il l'avait suivie à bord de son bateau en ramant. Il ne s'était amarré à l'endroit o˘ il avait attiré
    son attention que peu de temps avant qu'elle n'y arrive.
    Et puis, précisa-t-il, si je n'étais pas parvenu à
    mes fins de cette façon-là, j'aurais trouvé autre chose pour te capturer.
    Tu y tenais tellement?
    Eux, ils y tenaient! Mais moi...
    Sais-tu que j'aurais pu m'enfuir tout à l'heure, tandis que tu dormais encore? Une sente, presque entièrement envahie par les ronciers, il est vrai, part vers le nord, vers Narbonne vraisemblablement, tout près d'ici.
    que ne l'as-tu fait ! murmura-t-il.
    As-tu donc si peur de moi?
    C'est-à-dire... Mais je t'expliquerai... J'entends hennir un cheval.
    J'avais déjà entendu son galop.
    Emmeran reçut sur le pas de la porte l'émissaire quj lui avait été dépêché.
    Il s'entretint un moment avec luj et le renvoya sans l'avoir invité à
    pénétrer dans le moulin. Il revint vers Agnès avec un air sombre.
    Tes seigneurs, lui fit-il savoir, ont été prévenus de ton enlèvement. Le marché qui leur a été mis en main est le suivant : si l'enquête n'est pas immédiate≠
    ment arrêtée, aucune poursuite n'étant entamée, tu seras mise à mort de la même façon que les

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