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Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
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lieutenant », grommela Wilson.
    Red ne dit rien. Irrité et maussade, son regard accompagna Hearn qui remontait l’échelle.
    Croft avait fini d’aiguiser son couteau de tranchée, et tandis que Hearn et Wilson étaient encore en train de parler il se fraya un chemin vers l’abri sur le devant du canot. Sautant sur l’occasion, Stanley l’y rejoignit. C’était une place relativement confortable pour engager une conversation ; le pont y était inondé, certes, mais l’étrave en surélévation protégeait contre le vent. L’embrun qui embarquait dans le canot s’écoulait vers la poupe sans laisser des flaques.
    Stanley se mit. à parler d’abondance. « Si c’est pas une sacrée honte de nous avoir collé un officier sur le dos. Personne peut mener la section mieux que toi, et on aurait dû te donner le commandement avant de nous coller un de ces blancs-becs. »
    Croft haussa les épaules. Le transfert d’Hearn l’avait atteint plus profondément qu’il n’osait se l’avouer. Il commandait la section depuis si longtemps qu’il lui était un peu difficile de se rendre compte qu’il se trouvait dorénavant sous les ordres d’un supérieur. La présence d’Hearn l’obligeait de se rappeler à tout instant que s’il pouvait encore donner des ordres, le commandement de la section ne lui appartenait plus.
    Hearn était son ennemi. Sans qu’il en eût conscience, l’idée était implicite dans tout ce qu’il faisait. Automatiquement, il le considérait fautif de son transfert, et il lui en voulait d’instinct. Ses sentiments étaient d’ailleurs très confus. Pris depuis trop longtemps dans l’engrenage de l’obéissance militaire, il ne pouvait pas s’avouer son animosité. S’irriter d’un ordre, refuser d’y obéir, était immoral aux yeux de Croft. De plus, il n’y pouvait rien. « Ferme ta gueule si t’y peux rien », était une de ses rares maximes.
    Le discours de Stanley lui fit plaisir, mais il garda le silence.
    « Je pense que je connais comme qui dirait la nature humaine, disait Stanley, et je te dis sans mâcher mes mots que je préfère que toi tu commandes cette patrouille au lieu d’un lieutenant quelconque qui nous arrive tout cuit sur un plateau. »
    Croft cracha. « Stanley a la langue bien pendue, se dit-il. Sûr, c’est un lèche-cul, mais si à part ça un gars marche recto, j’y vois pas de mal. » « P’t’être », admit-il.
    « Bon, maintenant prends cette patrouille qui va être drôlement dure. On a besoin de quelqu’un qui s’y connaît.
    – – Toi, qu’est-ce que tu penses de la patrouille ? » demanda Croft doucement. Il fit un plongeon pour éviter un coup d’embrun.
    Stanley n’ignorait pas que Croft serait content s’il acceptait la patrouille sans rechigner. Mais il savait qu’il lui fallait répondre avec prudence. S’il se montrait enthousiaste alors qu’aucun des hommes ne l’était, Croft se délierait de lui. Il tripota sa moustache, fine et inégale malgré les soins qu’il y apportait. « Je ne sais pas, fallait bien qu’elle se fasse cette patrouille, alors pourquoi pas nous autres. Pour te dire la vérité, Sam, se risqua-t-il, ça peut te sembler une connerie de ma part, mais je regrette pas qu’on a décroché le morceau. On finit par se fatiguer à ne rien fiche, on a envie de faire des choses. »
    Croft se toucha le menton. « C’est ce que tu penses, hein ?
    – Eh bien, je l’aurais pas dit à tout le monde, mais, oui, c’est ce que je pense.
    –  Heu-hème. » A moitié délibérément Stanley venait d’effleurer une des passions essentielles de Croft. Après un mois de corvées et de patrouilles de sécurité sans histoires, ses nerfs étaient à nu dans l’attente d’une action. N’importe quelle patrouille digne de ce nom lui aurait souri. Mais celle-ci… rien que sa conception l’impressionnait. Encore qu’il ne le montrât pas, il était impatient ; les heures étaient longues à bord de ce canot. De tout l’après-midi. il n’avait pas arrêté d’agiter la question des routes à suivre, passant et repassant en esprit la topographie du terrain. Il n’y avait qu’une seule carte aérienne de cette région, mais il la connaissait par cœur. Et une fois de plus il ressentit une désagréable secousse en se. souvenant que la patrouille et la section n’étaient plus sous son commandement.
    « Oui, c’est ça, dit-il. Si tu veux savoir, c’est quelqu’un ce général

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