Les panzers de la mort
entendre, claironnante dans l’obscurité.
– Polémique au club des officiers de Tscherkassy, lieu d’excursion provisoire pour l’armée nazie. Heil ! Baise-moi le cul !
Le lieutenant Weber, fou de rage, brandit le Conseil de guerre dès qu’on serait sorti de la marmite. Porta gloussa, moqueur :
– Encore un qui croit au Père Noël ! Vous entendez les gars ; « dès qu’on sera sorti de la marmite » !
– Un duel au couteau de tranchée, mon lieutenant ? Ricana Petit-Frère. Je vous préviens, je coupe tout ce qui dépasse !
Weber perdit tout contrôle : – C’est de la mutinerie ! Je dis bien de la mutinerie ! Porcs, vous menacez ma vie ! – Il brandissait son revolver et parlait à mots entrecoupés. – Cette compagnie n’est pas digne de porter l’uniforme allemand et j’en aviserai notre bien-aimé Führer Adolf Hitler.
Toute la 5 e compagnie partit d’un éclat de rire et Porta Cria :
– On vous fait cadeau des loques d’Adolf, et tout de suite ! Et avec plaisir ! Mais elles sont un peu usées à la longue !
– La moitié des miennes sont pas à Adolf, renchérit Petit-Frère, elles viennent d’Ivan.
– Lieutenant, je vous prends à témoin ! hurla Weber à Bender.
– Témoin de quoi ? dit Bender.
– De ce que vient de dire cet homme et des avanies que cette invraisemblable compagnie fait subir à un officier du Parti.
– J’ignore de quoi vous parlez, lieutenant. Vous devez être sous le coup d’un choc. Le capitaine von Barring sera sûrement stupéfait de votre jugement sur sa compagnie, pour ne rien dire du colonel Hinka, notre chef de corps. Ils considèrent tous deux, à juste titre, la 5 e compagnie comme la meilleure du régiment, répartit tranquillement Bender. – Il jeta nonchalamment sa mitraillette sur son épaule et s’en fut.
L’avance des jours suivants, vers Podapinsky, devint un cauchemar. La nature se hérissait d’embûches ; à chaque instant un homme épuisé tombait dans la neige, refusait d’aller plus loin, et restait là, si les coups de pied et les coups de Crosse n’avaient eu finalement raison de ces hommes à bout de force.
En outre, nous avions affaire à des Russes fanatisés qui combattaient avec une sauvagerie et une bravoure indescriptibles et, même en petites unités isolées, se faisaient tuer jusqu’au dernier homme. La nuit, Ils nous attaquaient par commandos qui infligeaient des pertes continuelles à nos sentinelles. Des prisonniers nous apprirent qu’il s’agissait de la 32 e division de tirailleurs de Vladivostok et de quelques unités de la 82 e division d’infanterie soviétique, appuyée de deux brigades de blindés.
Contre ces troupes d’élite, on nous envoya en. renfort la 72 e division d’infanterie, et pourtant nous avions tout le temps la hantise d’être encerclés par l’ennemi.
Ils capturèrent un soir deux sous-officiers de la 3 e compagnie, que nous entendîmes hurler le lendemain matin, à en donner la chair de poule ; c’étaient de longs râles montant de cet enfer de neige. Nos yeux s’exorbitèrent, lorsque nous vîmes s’élever, pas très loin, deux croix sur lesquelles étaient crucifiés les deux sous-officiers. On leur avait enfoncé à chacun, un morceau de barbelé en couronne autour de la tête et, quand Ils perdaient connaissance, les Russes leur piquaient la plante des pieds avec une baïonnette, pour le plaisir de les entendre Crier.
Au bout de quelque temps, entendre ces cris dépassa la limite de ce que nous pouvions supporter. Porta et le légionnaire rampèrent jusqu’à un trou de grenade et envoyèrent une balle miséricordieuse à chacun des deux crucifiés.
Lorsque les Russes s’en aperçurent, Ils nous bombardèrent à coups, de lance-grenades, en guise de représailles, ce qui nous coûta huit tués. Ils réussirent ensuite, près de Podapinsky, la capture de toute la 4 e section de la 7 e compagnie, et peu après, nous entendîmes un commissaire crier dans un mégaphone :
– Soldats du 27 e blindé, nous allons vous montrer ce que nous faisons de ceux qui ne déposent pas volontairement les armes et ne désertent pas pour rejoindre l’année soviétique des travailleurs et des paysans.
Un hurlement inarticulé, celui d’un être humain soumis à une torture atroce, ponctua ces paroles puis s’éteignit lentement.
– Vous avez entendu ? Le soldat Halzer a bien Crié, n’est-ce pas ? Nous allons voir maintenant, si le
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