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Les Piliers de la Terre

Les Piliers de la Terre

Titel: Les Piliers de la Terre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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père était très sourcilleux en matière
d’hospitalité, mais il n’excellait pas personnellement sur ce point : les
gens le trouvaient souvent froid, distant. C’était Aliena qui apportait la
chaleur et le sourire qui manquaient à son père.
    Tout le
monde respectait le comte. Les plus hauts personnages venaient le voir :
l’évêque, le prieur, le prévôt, le chancelier du roi, les barons de la cour.
Elle se demandait combien la reconnaîtraient aujourd’hui, marchant pieds nus
dans la boue de cette même grand-rue. Cette pensée toutefois n’assombrissait
pas son optimisme. Elle était de nouveau dans un monde régi par des règles et
des lois, elle allait reprendre sa vie en main.
    Ils
passèrent devant leur ancienne maison, vide et verrouillée. Les Hamleigh ne
s’en étaient donc pas encore emparés. Un moment Aliena fut tentée d’y pénétrer.
C’est ma maison ! se dit-elle. Mais l’idée d’y passer la nuit lui rappela
la façon dont elle avait vécu au château, les yeux fermés à la réalité. Elle
poursuivit son chemin avec détermination.
    L’autre
avantage d’être en ville, c’était qu’il s’y trouvait un monastère. Les moines
fournissaient toujours un lit à quiconque le demandait. Cette nuit, Richard et
elle dormiraient sous un toit, au sec et à l’abri. Elle trouva la cathédrale et
entra dans la cour du prieuré. Deux moines debout derrière un tréteau distribuaient
du pain et de la bière à une centaine de nécessiteux. Aliena n’aurait jamais
pensé que tant de gens mendiaient l’hospitalité des moines. Richard et elle
prirent place dans la file. Étonnant, pensa-t-elle, de voir comment des gens
qui en temps normal se battent pour un peu de nourriture gratis soient capables
de rester tranquilles et en ordre à cause de la présence d’un moine. Elle et
son frère reçurent leur souper et l’emportèrent dans l’hôtellerie. C’était un
grand bâtiment de bois, une sorte de grange, sans meubles, vaguement éclairé
par des torches, et où régnait la forte odeur d’un grand nombre de gens
entassés. Ils s’assirent par terre pour manger. Le sol était couvert de roseaux
pas trop frais. Aliena se demanda si elle devrait se présenter aux moines. Le
prieur se souviendrait peut-être d’elle. Dans un aussi grand prieuré, il
existait sûrement une autre hôtellerie pour les visiteurs de haut rang. Mais
elle répugnait à se faire connaître. D’abord parce qu’elle craignait d’être
éconduite, mais surtout par refus de remettre son sort entre les mains de
quelqu’un d’autre. Bien qu’elle n’eût rien à craindre d’un prieur, elle se
sentait plus à l’aise dans l’anonymat et la discrétion.
    Les autres
hôtes étaient pour la plupart des pèlerins, ou quelques artisans en déplacement
– reconnaissables aux outils qu’ils portaient –, quelques colporteurs qui
allaient de village en village vendre aux paysans des choses que ceux-ci ne
pouvaient pas fabriquer eux-mêmes : épingles, couteaux, marmites, épices.
Certains étaient accompagnés de leur femme et d’enfants bruyants, excités, qui
couraient partout, se battaient, tombaient. Aliena en vit plusieurs, pas encore
éduqués, uriner sur le sol. Ces choses-là étaient probablement sans importance
dans une maison où bétail et humains partageaient la même pièce, mais, dans une
salle commune, c’était plutôt écœurant, estima Aliena.
    Elle se
mit alors en tête que les gens la regardaient comme s’ils savaient qu’elle
avait été déflorée. C’était ridicule, bien sûr. Elle s’assura qu’elle ne
saignait pas. Mais chaque fois qu’elle regardait autour d’elle, elle surprenait
quelqu’un qui lui lançait un coup d’œil pénétrant. Elle détournait aussitôt la
tête ; un peu plus tard, c’était le tour d’un autre. Pourtant, il n’y
avait rien à regarder : elle n’était pas différente d’eux : elle
était aussi sale, aussi mal vêtue et aussi épuisée. Mais l’impression demeurait
et elle finit par se mettre en colère. Il y avait un homme dont elle ne cessait
de surprendre le regard, un pèlerin d’un certain âge avec une nombreuse
famille. Elle finit par perdre patience et par lui crier :
« Qu’est-ce que vous regardez ? Cessez de me dévisager ! »
    Embarrassé,
il détourna les yeux sans répondre.
    « Aliena,
fit doucement Richard, pourquoi as-tu dit ça ? »
    Elle le
fit taire.
    Peu après
le souper, les moines vinrent enlever les

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