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Les porteuses d'espoir

Les porteuses d'espoir

Titel: Les porteuses d'espoir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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pis…
    La fureur de Georges explosa. Se levant brusquement, il s’appuya sur la table
     et se pencha devant son filleul en crachant ces mots :
    — Pour qui tu te prends, espèce de morveux, pour venir me dire, dans ma maison,
     ce qu’il faut que je fasse !
    François-Xavier essaya de le calmer :
    — Ben voyons, Georges, c’était pour ton bien. Y a pas pensé à mal.
    — Christ de Rousseau à marde. Tous pareils, du père aux fils. Ça se prend pour
     le nombril du monde ! C’est bon à faire des grands sermons sur la montagne, mais
     ça se regarde pas de trop proche, par exemple.
    — Georges !
    — Un fils qui va se cacher dans un trou…
    — Mononcle…
    — Pierre, va m’attendre dans le char, lui ordonna son père d’une voix blanche.
     Obéis, laisse-moi tout seul avec lui.
    Estomaqué, Pierre sortit du logement. Il resta au pied de la porte et attendit.
     Qu’allait-il se passer ? Allaient-ils se battre ? Il écouta les bruits, prêt à
     intervenir s’il le fallait. Il eut beau tendre l’oreille, il ne réussissait pas
     à entendre quoi que ce soit.
    La porte refermée sur Pierre, d’une voix sourde, François-Xavier dit :
    — Si t’as une crotte sur le cœur, c’est le temps de me le dire, Georges. Mais
     tu passeras pas ta rage sur mon fils.
    — Vous avez du front tout le tour de la tête de débarquer icitte.
    — Écoute Georges, je peux comprendre que t’as passé des bouts durs mais…
    — C’est ça ton problème, tu penses tout le temps tout comprendre. Mais c’est
     pas vrai. Tu vas-tu finir juste par comprendre ça ?
    — Tu penses-tu qu’on est pas capables d’imaginer la peine que
     ça doit faire de perdre toute sa famille d’un coup ? Julianna pis moi, on a
     perdu Barthélémy !
    — Ah ben ! c’est la meilleure. T’as perdu un fils, la belle affaire !
    — C’est pas plus facile pour nous autres. Il faut continuer pour ceux qui
     restent.
    — Justement, moé, il me reste plus personne.
    — C’est pas vrai ! Maudit, Georges, ça fait quand même presque sept ans. Tu
     pourrais au moins parler avec Jean-Marie.
    Dans un accès de rage, Georges renversa la table.
    — Je veux plus jamais que tu oses prononcer son nom, plus jamais, tu
     m’entends-tu ?
    — Mais c’est toujours ben pas lui qui a mis le feu pour que tu l’haïsses
     autant !
    Georges eut presque un rire dément.
    Semblant retrouver son calme, mais un calme pas naturel, Georges remit le
     meuble sur ses pattes et entreprit de ramasser les peppermints et de les
     remettre une à une dans leur bol.
    — Pauvre François-Xavier, ça a aucun rapport, reprit-il d’une voix sourde. J’ai
     toujours su que le feu, c’était un accident, voyons donc. C’est moé qui aurais
     dû aller voir à ce que les deux quêteux attachent pas leur chien après le
     naphta. Je le savais, moé, que c’était dangereux. J’aurais dû voir à ma
     famille.
    Sa voix n’était plus qu’un murmure. Il se rassit et resta un long moment les
     yeux dans le vide. François-Xavier était complètement perdu. Il prit place en
     face de son beau-frère. Il demanda :
    — Ben je vois pas d’abord… Pourquoi t’en veux à Jean-Marie ?
    Georges leva vers lui un regard éteint.
    — C’est ce que je disais. Tu comprends rien... J’ai jamais aimé une femme comme
     ma deuxième épouse. Rolande… Rolande me donnait une jeunesse que j’avais jamais
     eue. Quand a me touchait, j’me sentais le Bon Dieu en personne, le seul homme
     sur la terre,le seul, le plus important. J’me sentais grand,
     fort, beau. Pour une fois, dans ma chienne de vie, j’ai senti que j’avais de la
     valeur. C’est ça que mon fils m’a volé. Il a tué le regard que Rolande avait
     rien que pour moé avant. Il m’a privé de son amour. Si elle était morte en me
     laissant ça au moins…
    — Georges… commença François-Xavier.
    — Non… Laisse-moi tranquille.
    Georges avait presque chuchoté ces dernières paroles sur un ton implorant, les
     yeux fermés. Quand il les rouvrit, il s’adressa à son vis-à-vis d’une voix
     tranchante.
    — Je suis plus capable de te voir la face… As-tu compris François-Xavier
     Rousseau ? Je veux plus jamais avoir affaire à toé.
    François-Xavier resta sans voix. Lentement, il se leva et sortit rejoindre son
     fils. Au visage défait de son père, Pierre n’osa rien demander. Pendant qu’il
     conduisait, François-Xavier resta absorbé dans ses

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