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Les prisonniers de Cabrera

Les prisonniers de Cabrera

Titel: Les prisonniers de Cabrera
Autoren: Michel Peyramaure
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méfiaient. Masson et ses complices trouveraient l’embarcation dépourvue de mât, de voilures, d’agrès et de cordes.
    — Ça ne me semble pas être le cas pour celle-ci : elle a encore son mât, et la voilure n’est sans doute pas loin. Il doit même y avoir des rames. Elle est retenue au navire par un câble, mais nous trancherons facilement ce cordon ombilical, et vogue la galère !
    — Si j’étais croyant, je ferais brûler un cierge à votre intention. Quoi qu’il en soit, mes vœux vous accompagnent.
    — Il vous suffira, cette nuit, d’avoir une pensée pour moi. Je vais nager jusqu’à cette chaloupe, estimer l’épaisseur du câble et voir ce qu’il reste de ses gréements pour gagner le large…
    Masson choisit bien son moment : la frégate n’avait pas bougé, la nuit était profonde et la mer suffisamment agitée pour dissimuler les mouvements et le bruit du nageur. Je restai au milieu de ses hommes, au sommet de la falaise, quitte à ne rien percevoir de l’opération.
    Elle prit environ une heure. Lorsque, grelottant de froid, Masson fut de retour, il nous dit :
    — Le câble d’amarrage est robuste, et il faudra du temps pour le scier. Je n’ai pas trouvé d’agrès ni de voile. Il faudra en confectionner, en priant pour que la frégate reste quelques jours encore en place.
    Dès le lendemain, l’équipe se mit au travail.
    Les uns cardaient de vieux câbles récupérés sur des épaves, pour tresser des cordages ; d’autres, pour confectionner une voile, cousaient des enveloppes de vieux matelas pris à l’infirmerie… La panique s’empara des prisonniers lorsqu’ils constatèrent la disparition de la frégate, mais ils exultèrent en la voyant reparaître, deux jours plus tard, et jeter l’ancre au même endroit, avec la chaloupe toujours attachée à tribord, comme un chien.
     
    Le 19 août, par une nuit sans lune et une mer agitée, Masson et un caporal nagèrent jusqu’à la chaloupe, se hissèrent à son bord et, en se relayant, parvinrent péniblement à trancher le câble goudronné. Ils se remirent à l’eau et poussèrent l’esquif à la côte, en un endroit où l’équipage désigné par le sort avait dissimulé un baril d’eau douce et des vivres pour trois ou quatre jours.
    Mettre la chaloupe en état de naviguer prit quelques heures. Il faisait presque jour lorsqu’elle se détacha de la coque sans que les occupants de la frégate l’eussent remarqué. Au moment d’embarquer, saisis de transes, quelques prisonniers firent marche arrière.
    On arma les avirons, on tendit la voile, on vérifia le bon fonctionnement du gouvernail. Par chance, le vent soufflait avec force, si bien que les fugitifs ne se tuèrent pas à ramer.
    Lorsque l’aube pointa, la chaloupe avait disparu.
    La mer étant houleuse, elle embarquait des paquets de vagues, à tel point qu’il fallait écoper en permanence, avec des fonds de barrique. Une fois au large, Masson recensa les provisions : il en manquait une bonne partie, certains, pour compenser le mauvais sort, s’étant servis subrepticement avant de remonter dans la caverne. Il ne restait de biscuit et de poisson séché que pour deux jours, en comptant juste.
    Par chance, le vent se maintenant, une terre apparut à l’aube du troisième jour, puis disparut sous la brume. Les fugitifs se retrouvèrent au large et durent naviguer à l’aveuglette une demi-journée de plus avant qu’une grève de sable doré ne se dessinât, sur laquelle on se dirigea à la rame, comme des esclaves.
    L’équipage fut à la fois surpris et rassuré en constatant qu’ils venaient d’accoster… en Afrique ! À peine la chaloupe engravée, ils virent apparaître sur une butte de sable des indigènes vêtus de burnous, qui brandissaient des bâtons, vomissaient des imprécations et leur jetaient des pierres, comme s’ils eussent été dérangés dans leur sieste.
    Réembarquer ? Nul n’y songea. Masson rassembla ses hommes en file par deux pour les diriger vers le village de pêcheurs dont il avait aperçu les palissades à une centaine de mètres. Une foule furieuse les accompagna, mais, à peine avaient-ils franchi la palissade au milieu d’un troupeau de chèvres que des femmes de pêcheurs s’avancèrent pour leur offrir des figues et de l’eau.
    Informé dans les minutes qui suivirent de la présence de soldats
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