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Les prisonniers de Cabrera

Les prisonniers de Cabrera

Titel: Les prisonniers de Cabrera Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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châtiments qu’ils méritent !
    Wagré lui remit une liste des remèdes et des objets nécessaires à l’infirmerie. Don Joaquim Pons y jeta un bref regard et glissa la feuille dans sa veste.
    Le lendemain, alors que ce grand personnage s’apprêtait, après une nuit dans les appartements du gouverneur, à reprendre la mer, un officier italien s’approcha de lui, salua en faisant claquer ses talons et lui demanda, pour une cinquantaine de ses compatriotes et en leur nom, qu’ils soient incorporés dans l’armée espagnole.
    Cette requête fut accueillie dans le Conseil par des murmures et des imprécations. Nous n’avions jamais de rapports avec ces Piémontais et ces Napolitains, qui faisaient bande à part et qui n’apparaissaient que lors des distributions. En fin de compte, ayant été enrôlés de force dans une armée étrangère, qu’ils souhaitent déserter me parut logique. Don Joaquim Pons lui répondit qu’il était sensible à cette proposition et qu’il en ferait part à qui de droit. Une semaine plus tard, une canonnière vint les prendre pour les conduire sur la Péninsule. Quant aux requêtes de Wagré, elles sombrèrent dans l’oubli.

3
Le Théâtre de la Misère
    À la fin de l’année 1809 et au début de 1810, la réputation d’organisateur de Louis-Joseph Wagré allait atteindre son empyrée. Il allait devenir un personnage plus important que le gouverneur Burguillos et autant que le padre Damian Estelrich, en raison d’un charisme, d’un dévouement et d’une énergie exceptionnels.
    J’ai assisté à la montée en puissance irrésistible de l’ancien mitron de la rue du Vertbois. Sur les pontons de Cadix, déjà, il était connu et réputé pour sa débrouillardise : il avait amassé quelque argent en blanchissant le linge des officiers de son bord.
    À Cabrera, misant sur la rareté de l’eau et la recherche des sources, il allait trouver sa voie, non pour en tirer profit mais pour le bien de la communauté.
    En prospectant à travers la montagne, il avait découvert sous le  castillo , dans un monceau de caillasses et de détritus végétaux, une  fuente  relativement abondante. Son accès malaisé avait protégé son secret. Il entreprit seul de débarrasser de ses déblais l’entrée du couloir voûté large de trois pieds qui menait au réservoir de la dimension d’un fond de barrique et à la margelle taillée par des hommes, peut-être les anciens augustins.
    Pour éviter une invasion, il se garda de divulguer sa découverte, dans le but d’organiser la distribution du précieux liquide, notamment pour l’infirmerie.
    Un tel trésor ne pouvait et ne devait, malgré ses précautions, rester longtemps sa propriété.
    Fier de sa découverte, comme Robinson de celle de sa première source, il décida d’en faire part au  capell á n , qu’il n’aimait guère mais en qui il avait confiance. Ils choisirent d’un commun accord, ce que je leur reprochai par la suite, d’en informer Desbrull. Sa réponse, une semaine plus tard, n’avait pas de quoi nous faire sauter de joie : il complimentait le découvreur et lui recommandait de faire clore la source par une palissade dotée d’un cadenas et de la faire garder nuit et jour. Des conseils superflus…
    Wagré fit placarder à l’entrée de la cavité un ordre de service en trois articles précisant les heures d’ouverture, de façon à permettre au bassin de continuer à se remplir.
    Les prisonniers des alentours, un récipient à la main, en file sur deux rangées, piétinaient d’impatience, une heure avant l’ouverture, et certains revenaient après la clôture implorer du maître de l’eau un rabiot qui leur était refusé.
    Une redoutable sécheresse allait s’abattre sur l’île, en cette année 1810.
    La  fuente  de Wagré et les autres donnèrent des filets d’eau si parcimonieux que la junte nous envoya deux commissaires, le marquis de La Bastide et don Francisco March, afin d’étudier les moyens de pallier cette pénurie. Autant frapper la montagne avec une baguette pour lui faire cracher son eau, comme dans les Écritures !
    Tout ce qu’ils purent nous promettre, c’est qu’une fontaine publique de Palma serait affectée en priorité à notre alimentation, en plus des barriques que nous livrait Palmer.
     
    Notre détresse était si intense qu’une dizaine de marins de la Garde décidèrent

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