Les quatre livres des stratagèmes
assiégés par
les Romains, qui faisaient bonne garde autour de la place,
envoyèrent dans le camp ennemi, comme déserteur, un soldat qui,
moyennant une récompense, cacha une lettre dans son baudrier, et la
porta aux Carthaginois aussitôt qu’il trouva l’occasion de
s’échapper.
3 Quelques-uns écrivirent des lettres sur
des parchemins, qui furent cousus dans des pièces de gibier et dans
le corps de certains animaux.
4 D’autres ont introduit leurs dépêches
dans le derrière de leurs bêtes de somme, pour traverser les postes
ennemis.
5 D’autres ont écrit sur la partie
intérieure des fourreaux, de leurs épées.
6 L. Lucullus voulait informer de son
arrivée les habitants de Cyzique, assiégés par Mithridate, dont les
troupes occupaient le seul chemin qui conduisît à la ville :
c’était un pont étroit, qui l’unissait au continent. Il chargea de
ce message un soldat, bon nageur et habile nautonier, qui, porté
sur l’eau par deux outres remplies d’air, contenant des lettres de
Lucullus, et adaptées en dessous à deux traverses séparées l’une de
l’autre, fit un trajet de sept milles. Telle fut l’adresse de ce
simple soldat, que, se servant de ses jambes comme de rames, il
trompa les sentinelles ennemies, qui crurent, en l’apercevant, que
c’était quelque monstre marin [106] .
7 Le consul Hirtius envoya de temps en
temps à Decimus Brutus, assiégé dans Mutine par Antoine, des
lettres écrites sur des plaques de plomb, que l’on attachait aux
bras de soldats qui traversaient à la nage la rivière de
Scultenna.
8 Le même consul avait des pigeons qu’il
tenait quelque temps dans l’obscurité, sans leur donner à
manger ; puis il leur attachait des lettres au cou, à l’aide
d’un crin, et les lâchait le plus près possible des murailles. Ces
oiseaux, avides de nourriture et de lumière, gagnaient les plus
hauts édifices, et là étaient pris par Brutus, qui savait de cette
manière tout ce qui se passait, surtout lorsqu’il les eut habitués
à s’abattre en de certains lieux où il faisait déposer pour eux de
la nourriture.
XIV. Faire entrer des renforts et des
vivres dans la place.
1 Pendant la guerre civile, Ategua, ville
d’Espagne du parti de Pompée, étant investie, Munatius, chef
temporaire de ce pays, alla dans le camp de César, où il se fit
passer pour le secrétaire d’un tribun, demanda d’autorité le mot
d’ordre à quelques sentinelles, ce qui lui servit à en tromper
d’autres, et, persévérant dans son artifice, introduisit du renfort
dans la place, en passant ainsi au milieu des troupes de César.
2 Pendant qu’Hannibal tenait Casilinum
assiégé, les Romains emplirent de farine des tonneaux qu’ils
abandonnèrent au courant du Vulturne, pour les faire parvenir aux
habitants. Hannibal ayant arrêté ces tonneaux au moyen d’une chaîne
tendue sur le fleuve, les Romains répandirent des noix que les eaux
apportèrent à la ville, et qui fournirent aux assiégés un soutien
contre la famine.
3 Hirtius, sachant que ceux de Mutine,
assiégés par Antoine, étaient dans une extrême disette de sel, en
remplit des barils, qu’il fit entrer dans la ville par le fleuve
Scultenna.
4 Le même général confia au courant d’une
rivière des troupeaux que reçurent les assiégés, et qui remédièrent
à la disette.
XV. Comment on paraît avoir en abondance
les choses dont on manque.
1 Les Romains, assiégés dans le Capitole
par les Gaulois, et déjà en proie à la famine, jetèrent du pain
vers les postes ennemis. En faisant croire par là qu’ils avaient
des vivres en abondance, ils purent traîner le siège en longueur
jusqu’à l’arrivée de Camille.
2 On dit que les Athéniens en firent
autant à l’égard des Lacédémoniens.
3 Ceux qu’Hannibal tenait enfermés à
Casilinum, et que l’on croyait réduits à une extrême disette,
voyant que le Carthaginois, pour leur ôter jusqu’à l’herbe comme
aliment, avait fait passer plusieurs fois la charrue sur le terrain
qui séparait son camp de leurs murailles, jetèrent des semences sur
ces terres labourées, et par là persuadèrent à l’ennemi qu’ils
avaient de quoi se nourrir jusqu’à la récolte.
4 Les troupes qui avaient échappé au
désastre de Varus, étant investies par l’ennemi, qui les croyait
dépourvues de blé, promenèrent pendant toute une nuit dans leurs
magasins les prisonniers qu’ils avaient faits, et les
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