Les Rapines Du Duc De Guise
jeune
Hauteville emprunte la rive droite de la Seine jusqu’à la rue des Arcis, pour
rentrer à son logis et ils voulaient arriver avant lui.
Ils empruntèrent le pont au Change puis, malgré
l’inconfort du siège de Cassandre, ils mirent leurs chevaux au trot dans la rue
Saint-Denis. Caudebec en tête faisant dégager sans ménagement les marchands
ambulants et les passants qui gênaient leur passage. En même temps, il restait
vigilant, car il craignait de découvrir brusquement devant eux les trois hommes.
Passé les Innocents, Cassandre et Caudebec
tournèrent à droite dans la rue Aubry-le-Boucher, puis remontèrent la rue
Saint-Martin vers le logis des Hauteville. Arrivés à proximité, Caudebec
aperçut en bas de la rue une silhouette à cheval qui pouvait bien être le garde
du corps gascon. Ils remontèrent un peu la rue Saint-Martin pour mieux le voir
venir et quand ils distinguèrent, au milieu de la voie encombrée par toutes
sortes de montures, de charrettes et d’animaux, que le cavalier était
accompagné d’un homme sur une mule, avec une troisième personne en manteau noir
qui tenait la bride de l’animal, ils jugèrent que c’étaient certainement
Hauteville et ses compagnons.
Ils redescendirent alors lentement la rue de
manière à les croiser juste devant la maison que Vivepreux leur avait décrite, facilement
reconnaissable avec sa tourelle et la courette couverte.
Comme le garde du corps mettait pied à terre, Cassandre,
passant près de lui, glissa de son siège en amazone et tomba de son cheval en
poussant un cri. Olivier sauta aussitôt de sa mule pour la secourir.
— Madame, êtes-vous blessée ? s’inquiéta-t-il.
— Je… je ne crois pas, fit-elle, en se
relevant… Aïe… Je me suis tordu une cheville en tombant. Je ne sais pas ce qui
est arrivé, j’ai glissé de la selle.
Sa robe était maculée de neige et de ce
mélange de crotte et de boue puant qui couvrait les pavés des rues.
— Cela arrive souvent avec les sambues [48] , fit Cubsac qui s’était approché pour examiner la selle. Regardez, c’est
la fourche qui ne tient plus !
Caudebec avait pris la précaution de la
desserrer de son socle.
— Puis-je vous proposer d’entrer un
instant chez moi, pour vous reposer, madame, demanda Olivier, apparemment
fasciné par le charme de la jeune fille. (Il faut dire qu’il n’en connaissait
aucune dans son entourage.) Ma domestique pourra nettoyer votre manteau.
— Ma foi, je ne sais, monsieur… Monsieur
Caudebec, croyez-vous que je puisse ? minauda-t-elle. Ma robe est salie.
— Je serai avec vous, madame, répondit
Caudebec, qui avait aussi mis pied à terre.
— Dans ces conditions, j’accepte, Je me
nomme Cassandre Baulieu, j’arrive d’Angers avec mon cousin. Nous venons voir ma
tante malade, qui est religieuse au couvent des Filles-de-Sainte-Élisabeth.
— Mon nom est Olivier Hauteville, madame.
C’est ma maison et je suis bourgeois de Paris. Ce monsieur est mon garde du
corps, il se nomme M. de Cubsac, et voici mon commis M. Le Bègue.
— Mon père est procureur au présidial d’Angers,
précisa-t-elle, comme pour lui faire comprendre qu’ils étaient de la même
roture.
Olivier ouvrit la porte avec sa clef, leva la
herse et la fit entrer. Pendant ce temps, Cubsac proposa à Caudebec de conduire
leurs montures à l’écurie du Fer à Cheval.
Depuis qu’il était le chef de la maison, Olivier
utilisait l’ancienne chambre de son père et avait conservé la chambre de la
gouvernante comme cabinet de travail. Crédence, bahut et même le lit y étaient
encombrés de piles de documents mais, comme c’était la seule pièce où un feu
était allumé, c’est là qu’il fit entrer Cassandre. Jacques Le Bègue alla
prévenir Perrine, leur servante, de venir avec des linges et une brosse pour nettoyer
la robe et le manteau de leur visiteuse.
En l’attendant, ils s’assirent sur deux
chaises à haut dossier, très inconfortables, et échangèrent platement quelques
informations sur leur vie. Olivier expliqua qu’il vivait seul, son père étant
mort récemment, et qu’il contrôlait les tailles avec son commis. Elle lui dit
que son grand-père était drapier et juge-consul à Angers.
La servante vint et Olivier laissa les deux
femmes pendant que Cassandre ôtait sa robe pour qu’on enlève les taches qui la
souillaient. Quand elle se fut nettoyée et rhabillée, Olivier revint près d’elle
et lui proposa de dîner. Il
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