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Les Rapines Du Duc De Guise

Les Rapines Du Duc De Guise

Titel: Les Rapines Du Duc De Guise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean (d) Aillon
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Grand-Châtelet était la prison du
prévôt et vicomte de Paris, c’est-à-dire celle d’une justice prévôtale ou
présidiale, la Conciergerie accueillait en principe les détenus qui devaient
être jugés par les cours souveraines [62] donc au niveau de juridiction supérieur. Chambon savait que, contrairement
au Châtelet, peu de parlementaires penchaient pour la sainte union et que ses
prisonniers seraient serrés dans une geôle d’où personne ne pourrait les
libérer. Il expliqua d’ailleurs au greffier, qui le nota dans le registre d’écrou,
que les deux hommes devaient être enchaînés et ne recevoir aucune visite.
    Quant au fait qu’un commissaire au Châtelet
conduise des détenus à la Conciergerie, cela n’étonnait nullement les geôliers
car il n’était pas rare que des prisonniers de l’une des juridictions soient
transférés dans la prison de l’autre, la Conciergerie ayant (relativement) un
meilleur confort et une meilleure réputation.
    Après le départ de ses deux hommes de main, Salvancy
ne sut que faire. Devait-il prévenir Louchart ? Ce commissaire Chambon lui
était apparu comme un individu falot et sans envergure, mais il ne pouvait
rejeter la possibilité que ses hommes ne confient trop de choses au procureur
quand ils seraient interrogés.
    Devait-il fuir ? Ou au moins quitter sa
maison quelque temps pour se cacher ?
    La Chapelle ne le voudrait pas chez lui, ni
son protecteur. Ce serait trop risqué pour eux. Peut-être Louchart, ou Le Clerc…
mais ils n’avaient guère de place dans leur petite maison. Il devrait coucher
dans leur lit, et leur femme protesterait [63] . Il décida de sortir les papiers importants de son coffre de fer et de
brûler tout ce qui était compromettant.
    Il venait de finir de se préparer avec l’aide
de son valet de chambre qui ranimait le feu quand un enfant apporta un pli qu’il
laissa à une servante par le judas (Salvancy avait entre-temps interdit qu’on
ouvre la porte d’entrée).
    C’était une lettre au cachet de M. de Mayneville.
    Il l’ouvrit fébrilement. La missive ne contenait
que quelques mots. Sa maison allait être fouillée sur ordre de M. de Bellièvre.
Pour éviter qu’on ne l’arrête, cinq gentilshommes de M. de Mayenne
allaient se présenter chez lui pour le protéger et le conduire à l’hôtel de
Guise. Qu’il prépare tous les papiers importants en sa possession pour les
emporter.
    Salvancy était tellement inquiet après l’arrestation
de ses deux gardes du corps qu’il ne perçut pas l’incohérence de la démarche de
Mayneville. Pourquoi n’était-il pas venu lui-même ? Pourquoi ne pas avoir
simplement envoyé des gens de M. de La Chapelle pour l’aider à
transporter ses affaires ? Pourquoi même ne pas lui avoir écrit de se
rendre directement à l’hôtel de Guise avec ses domestiques ? Terrifié par
la perspective de finir comme ce commis qu’il avait vu pendu, rue des Arcis, Salvancy
ne pensa à rien de tout cela.
    Il rassembla registres, quittances et
bordereaux dans deux gibecières qu’il s’était fait apporter. Restaient encore
deux épais registres. Ne devrait-il pas les brûler ? Jusqu’à présent, il
les avait conservés comme une protection puisqu’ils prouvaient qu’il n’était
pas l’instigateur de la fraude. Finalement, il décida de les détruire et jeta
le premier dans le foyer.
    Mais le registre était très épais et, avec sa
couverture de cuir, il ne brûlait pas. Il le ressortit du foyer et commença à
en arracher les pages quand son valet de chambre gratta à la porte. S’interrompant,
il le fit entrer.
    — Monsieur, il y a là cinq gentilshommes
qui se disent envoyés par M. de Mayneville…
    — Je sais, faites-les monter tout de
suite !
    Il abandonna le feu et arrangea un peu sa
tenue avant de redresser son bonnet noir. Il devait paraître comme un honnête
bourgeois auprès de ces gentilshommes.
    Ils entrèrent. Le premier avait un visage
sévère sous une chevelure coupée court et une barbe noire taillée en pointe
comme la portait le duc de Guise. Son regard de braise était celui d’un homme à
qui on devait obéir. Sous sa cape noire doublée et finement brodée, on
apercevait un pourpoint de soie noire et des hauts-de-chausses de velours. Ses
bottes montaient à mi-cuisse.
    Celui qui le suivait ne pouvait être plus
différent. Un physique de soudard, avec corselet de cuivre bosselé, toison en
broussaille, hautes bottes râpées

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