Les Rapines Du Duc De Guise
Nicolas Poulain. Perrine, la
servante, fit chauffer de l’eau et rasa son maître, ne laissant qu’un filet de
barbe autour de son menton. Puis, ayant revêtu des habits bien brossés, Olivier
se rendit chez Nicolas Poulain accompagné de Le Bègue.
La nuit tombait.
Nicolas Poulain et son épouse les reçurent
fort aimablement. Le lieutenant du prévôt raconta à Olivier qu’il avait parlé
de lui au père Boucher en présence du commissaire Louchart (sans dire où il les
avait rencontrés) et que le prêtre avait reconnu avoir oublié le rendez-vous. N’ayant
plus de charge contre lui, Louchart avait accepté de le libérer.
— C’est incompréhensible ! s’exclama
Olivier, en secouant la tête. Le père Boucher ne pouvait avoir oublié. Il avait
ma lettre, et la soutenance de ma thèse à la Sorbonne était pour la fin du mois…
mais quoi qu’il en soit, maintenant que je suis libre et innocenté, je vais
trouver ceux qui ont tué mon père et Margotte, menaça-t-il les poings serrés.
— Je comprends que vous vouliez retrouver
ces assassins, mais pour y parvenir il vous faudra savoir pourquoi on a tué
votre père.
— Ce devaient être des rôdeurs, des gens
sans aveux à la recherche de picorée, répliqua Olivier en haussant les épaules.
— Comment seraient-ils entrés, monsieur ?
intervint Le Bègue. Votre père n’ouvrait jamais à des inconnus !
— C’est vrai. Sur ce point, Louchart
avait raison, reconnut Olivier après un instant de réflexion.
— J’ai interrogé le tailleur, poursuivit
le commis. Il a vu trois hommes qu’il ne connaissait pas frapper à la porte de
votre père le jour des meurtres. L’un était un bourgeois et les autres des
traîneurs d’épée.
— Ce seraient eux les assassins ?
— Pas forcément, monsieur, dit Le Bègue, car
le tailleur m’a dit aussi que quand il était dans l’ouvroir, dans l’arrière-boutique,
il n’avait pas de vue sur la cour. D’autres personnes ont pu se présenter sans
qu’il les voie.
— Il n’empêche… Qui pouvaient être ces
trois visiteurs ? s’interrogea Olivier. Que venaient-ils faire ? Si
mon père leur a ouvert, c’est qu’il les connaissait ! Peut-être les
attendait-il ?
— Si je peux vous donner un avis, monsieur
Hauteville, examinez les papiers de votre père, et particulièrement ceux
concernant les contrôles qu’il effectuait. Je crois que c’est là que vous
trouverez la solution, proposa Poulain.
Olivier resta silencieux. Il n’y avait pas
songé. Au bout d’un instant, il se tourna vers Le Bègue.
— Mon père m’avait dit qu’on l’avait
chargé d’un important travail de vérification des registres des tailles…
— Oui, monsieur, c’était à la demande de M. Antoine
Séguier qui s’occupe du contrôle général des tailles à la surintendance. Il
venait de terminer un mémoire à ce sujet.
— Il faut que je lise ce mémoire, où
est-il ?
— Je l’ignore, monsieur. Je l’ai aidé
dans les vérifications et les copies des registres de l’élection mais il a
rédigé ce mémoire tout seul. Il devrait encore être dans sa chambre.
— Je vais rechercher dans ses papiers, et
j’irai voir M. Séguier lundi, décida Olivier.
Le lendemain dimanche,
la messe fut consacrée à M. Hauteville et aux autres victimes du crime. Mais
cette fois, Olivier était fièrement placé devant l’autel, lavé de tout soupçon,
comme le déclara le curé de la paroisse. Après l’office, nombreux furent les
voisins et les amis de son père qui vinrent témoigner de leur tristesse. Parmi
eux, un homme d’une cinquantaine d’années attendit d’être le dernier pour se
présenter.
— Monsieur Hauteville, vous ne devez pas
vous souvenir de moi, car la dernière fois que je vous ai vu, vous deviez avoir
quinze ans et vous rentriez du collège. Je travaillais avec votre père lorsqu’il
avait repris la charge de son père à la Grande chancellerie. Nous sommes tous
deux clercs-notaires et secrétaires du roi. Je suis à présent premier clerc de M. Sardini.
Il y a trois jours, il a appris la mort de votre père et m’a suggéré de venir
vous présenter nos condoléances.
Olivier le remercia. Il rentra chez lui, avec
Le Bègue et leur servante, le cœur plein de reconnaissance envers tous ces gens
qui prenaient part à sa douleur. Après le dîner, il travailla avec Le Bègue à
classer les papiers de son père, en mettant de côté sa correspondance
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