Les refuges de pierre
exerçait
un pouvoir étrange sur les animaux, mais le voir de ses propres yeux, ce n’était
pas la même chose. Le trio se fraya un chemin entre les camps sous des regards
ébahis, et même ceux qui connaissaient Joharran ou Jondalar demeuraient bouche
bée au lieu de leur retourner leurs salutations.
Ils marchaient derrière des broussailles basses qui cachaient le
loup quand un homme approcha dans leur direction.
— Jondalar, j’ai appris que tu étais rentré de ton Voyage
avec une femme, cria-t-il en courant vers eux. J’aimerais que tu me la
présentes.
Il avait un défaut d’élocution bizarre qu’Ayla n’arriva pas à
identifier tout de suite ; puis elle se rendit compte qu’il parlait un peu
comme un enfant, mais avec une voix d’homme. Il zézayait.
Jondalar leva les yeux, fronça les sourcils. Ce n’était pas
quelqu’un qu’il désirait voir. En fait, c’était, de tous les Zelandonii, le
seul qu’il espérait ne pas rencontrer. Bien que cette affectation d’amitié ne
lui plût pas, il ne pouvait se dérober aux présentations.
— Ayla des Mamutoï, voici Ladroman de la Neuvième Caverne.
Il avait pris le ton le plus neutre possible mais Ayla détecta
aussitôt une désapprobation sous-jacente et lui lança un coup d’œil. La tension
des muscles de la mâchoire, la posture hostile constituaient autant indices.
Ladroman tendit les deux mains vers Ayla et sourit, révélant qu’il
lui manquait deux incisives. Elle croyait avoir deviné qui était cet homme, et
l’espace vide de la denture le lui confirma. C’était avec lui que Jondalar s’était
battu ; il l’avait frappé et lui avait brisé deux dents. En conséquence,
il avait dû quitter la Neuvième Caverne pour aller vivre un moment chez
Dalanar, ce qui était sans doute la meilleure chose qui lui fût arrivée. Cela
lui avait donné la possibilité de connaître l’homme de son foyer et d’apprendre
l’activité qui finirait par le passionner – la taille du silex – auprès
de celui qui en était le maître incontesté.
Ayla en savait assez sur les tatouages faciaux pour se rendre
compte que l’homme était un acolyte, destiné à devenir Zelandoni. A sa grande
surprise, elle sentit Loup frôler sa jambe pour venir se placer entre elle et
Ladroman, entendit son grognement sourd, celui qu’il poussait quand il la
croyait menacée. Peut-être perçoit-il le rejet de Jondalar, pensa-t-elle ;
en tout cas, Loup n’aime pas cet homme.
Ladroman hésita, recula, les yeux écarquillés de peur.
— Loup ! Reste derrière, ordonna-t-elle dans la langue
mamutoï en avançant d’un pas pour les présentations. Je te salue, Ladrrroman de
la Neuvième Caverrrne.
Elle prit les deux mains tendues. Elles étaient moites.
— Ce n’est plus Ladroman, ni la Neuvième Caverne. Je suis
maintenant Madroman de la Cinquième Caverne des Zelandonii, acolyte de la
Zelandonia. Sois la bienvenue, Ayla des... des quoi ? Muh, Mutoni ?
fit-il, jetant un coup d’œil au loup, dont le grondement s’intensifiait.
L’homme lâcha aussitôt les mains d’Ayla. Il avait remarqué son
accent, mais, troublé par l’animal, il n’y prêta guère attention.
— Elle n’est plus Ayla des Mamutoï, elle est maintenant
Ayla de la Neuvième Caverne des Zelandonii, corrigea Joharran.
— Tu as déjà été acceptée par les Zelandonii ? En tout cas,
Mamutoï ou Zelandonii, je suis heureux de faire ta connaissance, mais il faut
que j’aille... à une réunion, maintenant, zézaya-t-il.
Il se retourna et partit presque en courant. Ayla regarda les
deux frères, qui arboraient des sourires quasiment identiques.
Joharran avisa le groupe qu’il cherchait et où se trouvait
Zelandoni. Elle fit signe au trio d’approcher, mais ce fut Loup qui retint
surtout l’attention. Craignant qu’il ne réagisse comme avec Madroman, Ayla lui
ordonna de rester en arrière pendant les présentations. Plusieurs personnes
eurent l’air surprises quand l’étrangère au curieux accent fut présentée comme zelandonii,
anciennement mamutoï, mais on leur expliqua que, puisque la question de l’endroit
où elle vivrait après son union avec Jondalar ne se posait pas, la Neuvième
Caverne l’avait déjà acceptée.
La décision la plus importante, hormis celle de s’unir,
concernait le lieu où s’installerait le couple : l’homme irait-il vivre
parmi le peuple de la femme, ou la femme vivrait-elle chez le peuple de l’homme ?
Dans
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