Les refuges de pierre
lanière qu’il devait être
difficile de défaire. Le souvenir de l’enchevêtrement de bras provoqué lorsque
Levela s’était avancée pour la serrer contre elle, lui fit comprendre que cela
contraignait chacun à tenir compte de l’autre avant de se précipiter sans
réfléchir. Une bonne première leçon sur la difficulté d’être unis.
— J’aimerais qu’ils se pressent un peu, dit à voix basse l’un
des nouveaux compagnons. Je meurs de faim. Avec le jeûne qu’on nous a imposé,
je suis sûr qu’on entend mon estomac gronder depuis là-bas.
Ayla, elle, n’était pas mécontente de la longue récitation de
noms et de liens, qui lui donnait le temps d’être seule avec ses pensées. Elle
était unie. Jondalar était son compagnon. Elle pouvait commencer à se sentir
vraiment Ayla des Zelandonii, bien qu’elle fût heureuse qu’Ayla des Mamutoï fît
partie de ses noms. Leur vie à la Neuvième Caverne n’impliquerait pas qu’elle
devînt une autre personne. Ayla avait simplement de nouveaux noms et liens à
ajouter à sa liste. Elle n’avait pas perdu son totem du Clan.
Son esprit vagabond retourna à l’époque où, fillette, elle
habitait avec le Clan. Quand ils s’unissaient, ses membres n’attachaient pas
une lanière rituelle à leurs poignets, ils n’en avaient pas besoin. Dès leur
plus jeune âge, on apprenait aux femmes à être attentives aux besoins des
hommes, en particulier de ceux à qui elles étaient unies. Une femme devait devancer
les demandes et les souhaits de son compagnon parce qu’un homme apprenait très
tôt à ne jamais prêter attention ou à ne jamais paraître prêter attention aux
désagréments qui l’importunaient, gêne ou souffrance. Il ne pouvait demander l’aide
de sa compagne, elle devait savoir quand il en avait besoin.
Broud n’avait pas besoin de l’aide d’Ayla mais exprimait sans
cesse ses exigences. Il inventait des choses à faire dans le seul but de lui
donner des ordres : apporter un bol d’eau, attacher ses jambières. Il
prétendait qu’elle était jeune et qu’elle devait apprendre, mais en réalité il
se moquait qu’elle apprenne ou non, et cela ne changeait rien lorsqu’elle
essayait de lui être agréable. Il voulait éprouver son pouvoir sur elle parce
qu’elle lui avait résisté et que les femmes du Clan ne désobéissaient pas aux
hommes. A cause d’elle, il se sentait moins qu’un homme et il la haïssait pour
cela, ou peut-être savait-il à un niveau instinctif qu’elle appartenait à une
espèce différente. La leçon n’avait pas été facile à apprendre mais elle l’avait
apprise. Broud, avec ses exigences constantes, la lui avait fait entrer dans la
tête, mais c’était Jondalar qui en bénéficiait. Ayla était toujours attentive à
ses besoins, à sa présence. Il lui vint à l’esprit que c’était pour cette
raison qu’elle se sentait inquiète quand elle ignorait où il était. Elle
éprouvait la même chose pour ses bêtes.
Soudain, comme si cette pensée l’avait fait apparaître, Loup
surgit près d’elle. Elle se baissa et, sa main droite étant liée à celle de
Jondalar, elle caressa l’animal de la main gauche.
— Je m’inquiétais, avoua-t-elle à son compagnon, mais il a
l’air content de lui.
— Il a peut-être une raison pour ça, répondit Jondalar avec
un grand sourire.
— Quand Bébé a trouvé une compagne, il est parti. Il
revenait nous voir de temps en temps mais il vivait avec les siens. Si Loup a
une compagne, tu crois qu’il partira pour vivre avec elle ?
— Je ne sais pas. Tu dis toi-même qu’il considère les
humains comme sa meute, mais il ne trouvera de compagne que chez les loups.
— Je souhaite qu’il soit heureux. Il me manquerait
beaucoup, pourtant, s’il ne revenait pas, soupira-t-elle en se relevant.
La plupart des Zelandonii qui les entouraient les observaient,
en particulier ceux qui connaissaient mal Ayla. Elle fit signe à l’animal de
rester près d’elle.
— C’est un très grand loup, fit une des femmes en reculant
un peu.
— Oui, dit Levela, mais ceux qui le connaissent disent qu’il
n’a jamais menacé personne.
A cet instant, une puce décida de tourmenter le loup, qui s’assit
sur son arrière-train et entreprit de se gratter. La femme eut un gloussement
nerveux.
— Ce n’est pas très menaçant, ça, dit-elle.
— Sauf pour la bestiole qui l’embête, répondit Levela. Loup
cessa soudain de se gratter,
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