Les refuges de pierre
Zelandoni à partager avec elle les lagopèdes en
précisant qu’elle les préparerait comme elle le faisait autrefois pour Creb.
Elle creusa une petite fosse dans la Vallée des Bois, au pied du sentier menant
à la corniche, la tapissa de pierres et y alluma un bon feu. Pendant que le
bois brûlait, elle pluma les lagopèdes – y compris les pattes, que
leurs plumes empêchaient d’enfoncer dans la neige – puis prit une
brassée de foin pour les envelopper.
Si elle avait trouvé des œufs, elle en aurait farci les
volatiles, mais ce n’était pas la saison. Les oiseaux n’essayaient pas d’avoir
des petits à l’entrée de l’hiver. Elle les remplaça par une ou deux poignées d’herbes
aromatiques, et Marthona lui offrit un peu de ce qu’il lui restait de sel, ce
dont elle lui fut reconnaissante. Pendant que les lagopèdes cuisaient dans le
four, Ayla passa quelque temps à s’occuper des chevaux puis chercha d’autres
activités.
Elle décida d’aller voir si elle pouvait aider Zelandoni. La
doniate lui dit qu’elle avait besoin d’ocre rouge et Ayla répondit qu’elle se
ferait un plaisir d’aller en chercher. Elle reprit donc le chemin de la Vallée
des Bois, siffla pour appeler Loup, qu’elle avait laissé en train de renifler
de nouveaux trous intéressants, et marcha vers la Rivière. Elle creusa pour
trouver l’argile colorée, repéra sur la berge une pierre ronde qui lui
servirait de pilon. Puis elle rappela Loup et commença à remonter le sentier
sans prêter attention à la personne qui le descendait.
Elle fut stupéfaite quand elle faillit heurter Brukeval. Il l’évitait
depuis la réunion de la Zelandonia concernant Echozar et le Clan, mais il l’épiait
de loin. Il observait avec plaisir la progression de sa grossesse et imaginait
que l’enfant qu’elle portait était de son esprit. Tout homme pouvait croire que
n’importe quelle femme enceinte portait un enfant de son esprit, et la plupart
se demandaient parfois si c’était le cas de telle ou telle femme mais, pour
Brukeval, c’était devenu une obsession. La nuit, lorsqu’il ne trouvait pas le
sommeil, il se voyait passant toute une vie avec Ayla, reproduisant pour l’essentiel
ce qu’il la voyait faire avec Jondalar, mais quand il se retrouva face à elle
dans le sentier, il ne sut quoi dire. Impossible cette fois de l’éviter.
— Brukeval, commença-t-elle en ébauchant un sourire, justement,
j’avais l’intention de te parler.
— Eh bien, c’est le moment.
— Je veux que tu saches que je n’ai pas cherché à t’insulter,
à la réunion. Jondalar m’a raconté que certaines personnes te taquinaient en te
traitant de Tête Plate, jusqu’à ce que tu les fasses taire. J’admire ton
courage. Tu n’es pas un Tête Plate... pas un membre du Clan. Tu n’arriverais
jamais à vivre chez eux. Tu fais partie des Autres, comme tous les Zelandonii.
L’expression de Brukeval se radoucit.
— Je suis content que tu le reconnaisses.
— Tu dois cependant comprendre que, pour moi, les membres
du Clan sont des êtres humains, s’empressa-t-elle de poursuivre. Je ne les ai
jamais considérés autrement. Ils m’ont trouvée seule et blessée, ils m’ont
recueillie, élevée. Sans eux, je ne serais pas vivante aujourd’hui. Je les juge
admirables. Je n’avais jamais pensé que tu te sentirais injurié lorsque j’ai
suggéré que ta grand-mère avait peut-être vécu parmi eux quand elle s’est
perdue.
— Tu ne pouvais pas savoir, répondit-il en souriant.
Soulagée, elle lui rendit son sourire et tenta de rendre ses
explications plus claires.
— Tu me rappelles quelqu’un que j’ai connu au Clan, un
petit garçon que j’aimais beaucoup...
— Arrête ! Tu persistes à penser que j’ai quelque
chose du Clan en moi ? Tu viens pourtant de dire que je ne suis pas un
Tête Plate.
— Ni toi ni Echozar. Ce n’est pas parce que sa mère était
du Clan qu’il l’est lui-même. Il n’a pas été élevé par eux et toi non plus...
— Mais tu crois toujours que ma mère était une
abomination ! Ce n’est pas vrai ! Ni ma mère ni ma grand-mère n’ont
quoi que ce soit à voir avec ces bêtes répugnantes. Et moi non plus, tu m’entends ?
vociféra-t-il, cramoisi de colère. Je ne suis pas un Tête Plate ! Ce n’est
pas parce que tu as été élevée par ces animaux que tu peux me rabaisser.
Loup montrait les dents, prêt à sauter sur l’homme qui semblait
vouloir
Weitere Kostenlose Bücher