Les refuges de pierre
castors. Le tronc fut coupé une seconde fois, juste en
dessous des branches les plus basses. Le reste de l’arbre ne serait pas
perdu : les sculpteurs et les fabricants d’outils lorgnaient déjà sur
cette abondance de bois, et les menus morceaux alimenteraient les feux. Selon
la coutume sharamudoï, des pignes furent enterrées près de l’arbre abattu pour
remercier la Grande Mère, et Zelandoni fut impressionnée par cette cérémonie
simple.
Ayla et Jondalar montrèrent aux autres comment tirer des
planches du tronc, à l’aide de coins et de maillets. Les plaques de bois
obtenues, qui s’amincissaient de l’extérieur vers le centre, trouvaient de
nombreuses utilisations, notamment comme étagères. Les boîtes rainurées étaient
une idée ingénieuse. Avec un burin de silex ou un outil comparable, ressemblant
à un ciseau, ils aplanirent une planche sur toute sa longueur puis tracèrent
des rainures en travers, à trois endroits. Passée à la vapeur, la planche fut
ensuite pliée à l’endroit des rainures pour former une boîte rectangulaire.
Pour le fond, ils aplanirent une autre planche, la taillèrent au
couteau et la polirent à la pierre pour qu’elle vînt se loger dans une rainure
creusée sur le bord inférieur de la boîte. Trempé dans l’eau, le bois gonflait,
ce qui rendait la boîte étanche et permettait d’y conserver des liquides ou des
graisses. Il était probable que beaucoup de ces boîtes seraient fabriquées plus
tard.
Marthona regardait Ayla gravir le sentier. Les joues rouges,
la jeune femme exhalait un nuage blanc à chacune de ses expirations. Elle avait
chaussé des mocassins à semelle épaisse, surmontés de sortes de guêtres qui lui
entouraient le mollet par-dessus ses jambières, et portait la veste doublée de
fourrure que la mère de Matagan lui avait offerte. Le vêtement ne cachait pas
sa grossesse, encore soulignée par la ceinture nouée haut, à laquelle pendaient
son couteau et quelques bourses. La capuche était rabattue, la chevelure
emprisonnée en un chignon dont quelques mèches s’échappaient, fouettées par le
vent.
Ayla continuait à utiliser son sac mamutoï, de préférence à la
poche de style zelandonii. Elle s’était habituée au sac porté sur une épaule et
l’emportait souvent dans ses petites chasses. Il laissait une épaule libre pour
le gibier abattu. Ce jour-là, trois lagopèdes blancs attachés par leurs pattes
duveteuses faisaient contrepoids dans son dos aux deux lièvres blancs de bonne
taille qui ballottaient sur sa poitrine.
Loup trottait derrière elle. Ayla l’emmenait souvent quand elle
sortait. Non seulement il excellait à débusquer les oiseaux et d’autres
animaux, mais il lui montrait aussi où les petites bêtes blanches étaient
tombées dans la neige.
— Je ne sais pas comment tu fais, dit Marthona en lui
emboîtant le pas quand elle atteignit le bord de la corniche. Quand j’étais
aussi avancée que toi dans ma grossesse, je me sentais énorme, malhabile. L’idée
de continuer à chasser ne me serait jamais venue. Toi, tu chasses et tu
rapportes presque toujours quelque chose.
— Je me sens énorme et malhabile, répondit Ayla en
souriant, mais lancer un bâton ou utiliser une fronde n’exige pas beaucoup d’efforts,
et Loup m’aide plus que tu ne peux l’imaginer. Je serai coincée ici bien assez
tôt.
Marthona sourit à l’animal qui marchait entre elles à pas
feutrés. Bien qu’elle se fût inquiétée pour lui lorsqu’il avait été attaqué par
une meute, elle aimait bien son oreille un peu tombante, maintenant. Cela
permettait en outre de le reconnaître plus facilement. Elle attendit qu’Ayla
eût déposé le gibier devant son habitation, sur un bloc de calcaire parfois
utilisé comme siège.
— Je n’ai jamais été très bonne pour chasser de petits
animaux, lui confia Marthona, sauf avec un piège. Il fut un temps où je prenais
plaisir à me joindre à un groupe pour une grande chasse. Je n’ai pas chassé
depuis si longtemps que je dois avoir tout oublié, mais j’avais l’œil, autrefois,
pour repérer une trace. Je n’y vois plus très bien, comme tu le sais.
— Regarde ce que je rapporte d’autre, dit Ayla en ouvrant
son sac.
Elle avait trouvé un pommier dépourvu de feuilles mais encore
décoré de petites pommes rouge vif, moins dures et moins acides après les
premières gelées.
Les deux femmes se dirigèrent vers l’abri des chevaux. Ayla ne
Weitere Kostenlose Bücher