Les refuges de pierre
belle de toutes les femmes, la plus
désirable, à toutes les Réunions d’Été. Je crois que c’est pour cette raison qu’on
s’attendait à notre union.
— Parce que tu étais le plus beau et elle la plus
belle ?
— Je suppose, répondit Jondalar. (Il se sentit rougir et se
félicita qu’il fît sombre.) Je me demande pourquoi elle n’a pas de compagnon.
— Elle a dit qu’elle en a eu un mais que cela n’a pas duré.
— Je sais, mais pourquoi n’a-t-elle pas trouvé quelqu’un d’autre ?
Ce n’est pas comme si elle avait soudain oublié comment donner du plaisir à un
homme, ou comme si elle était devenue moins attirante, moins désirable.
— Qui sait ? Puisque tu n’as pas voulu d’elle, les
autres hommes ont peut-être commencé à la regarder différemment. Une femme
prête à blesser quelqu’un qu’elle ne connaît même pas peut être moins attirante
que tu ne penses, expliqua Ayla en défaisant la jambière.
— J’espère que ce n’est pas ma faute. L’idée qu’il lui est
impossible de trouver un autre compagnon à cause de moi...
— Pourquoi serait-ce ta faute ?
— Ne viens-tu pas de dire que, comme je n’avais pas voulu d’elle,
les autres hommes... ?
— L’ont regardée différemment ? S’ils n’ont pas aimé
ce qu’ils ont vu, est-ce ta faute ?
— Eh bien... euh...
— Tu peux te reprocher d’être parti sans explications.
Marona en a été vexée. Mais elle a eu cinq ans pour dénicher quelqu’un d’autre,
et tu dis toi-même qu’on la trouve très désirable. Non, ce n’est pas ta faute.
Il réfléchit, finit par hocher la tête.
— Tu as raison, approuva-t-il en achevant de se dévêtir.
Dormons, maintenant. Les problèmes nous paraîtront plus simples demain. En se
coulant sous les fourrures chaudes et confortables, Ayla eut une autre
idée :
— Si Marona est tellement douée pour le Plaisir, je me
demande pourquoi elle n’a pas d’enfants.
— J’espère que tu as raison et que c’est le Don de la Mère
qui fait les enfants. Ce serait comme un double don, fit Jondalar avec un petit
rire... (Il relevait la fourrure de son côté quand il arrêta soudain son
geste.) C’est vrai ! Elle n’a pas d’enfant.
— Ne soulève pas la couverture comme ça, protesta Ayla à
voix basse. Il fait froid. Il se hâta de la rejoindre, colla son corps nu
contre le sien.
— C’est peut-être pour cette raison qu’elle n’a pas de
compagnon, reprit-il. Quand un homme prend une compagne, il cherche
généralement une femme qui peut apporter des enfants à son foyer. Une femme
peut avoir des enfants et rester au foyer de sa mère, ou même fonder son propre
foyer, mais la seule façon pour un homme d’avoir des enfants dans son foyer, c’est
de s’unir à une femme qui puisse y apporter des enfants. Si Marona s’est unie
et n’a pas eu d’enfants, cela l’a peut-être rendue moins désirable.
— Ce serait triste, dit Ayla avec une soudaine bouffée de
pitié. Elle connaissait son propre désir d’enfant. Elle avait voulu un bébé à
elle dès qu’elle avait vu Iza enfanter Uba, et la haine de Broud lui en avait
donné un. C’était cette haine qui l’avait poussé à la forcer ; s’il ne l’avait
pas forcée, aucune nouvelle vie n’aurait grandi en elle.
Elle ne le savait pas à l’époque, bien sûr, mais elle l’avait
compris en regardant son fils. Le Clan de Brun n’avait jamais vu un enfant
comme celui d’Ayla, et puisque son fils n’était pas tout à fait comme elle – comme
les Autres – ses membres avaient cru que c’était un rejeton déformé
du Clan, mais elle voyait bien, elle, que son fils était un mélange. Il présentait
certains caractères propres à sa mère, certains autres propres au Clan, et par
intuition elle en avait déduit que, lorsqu’un homme mettait son organe à l’endroit
d’où venaient les bébés, cela faisait naître une nouvelle vie. Ce n’était pas
ce que le Clan croyait, ce n’était pas ce que croyait le peuple de Jondalar ou
aucun des Autres, mais Ayla était persuadée que c’était la vérité.
Étendue à côté de son compagnon, sachant qu’elle portait en elle
le bébé de cet homme, elle ressentit de la pitié pour la femme qui avait perdu
Jondalar et, peut-être, ne pouvait avoir d’enfants. Pouvait-elle reprocher à
Marona d’en souffrir ? Qu’éprouverait-elle si elle perdait Jondalar ?
Ses yeux s’embuèrent mais, en même temps,
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