Les reliques sacrées d'Hitler
culturel des nations alliées. Mais elle était également chargée de préserver lâhéritage culturel de lâAllemagne. Les vaincus devaient être protégés. Cela ne voulait pas dire que les criminels nazis ne seraient pas jugés ni que des dommages ne seraient pas exigés. Les Alliés reconnaissaient que si lâAllemagne devait renaître de ses cendres, elle ne devait pas seulement être aidée économiquement, mais son patrimoine culturel devait être préservé pour les générations futures. La MFAA en était chargée.
Toutefois, comme Horn le savait en raison de son travail de compilation des dossiers pour les prochains procès, protéger et préserver le patrimoine culturel de lâAllemagne était un sujet politiquement brûlant au quartier général de lâUSFET, et rien nâavait encore été décidé concernant les dommages de guerre. Les conservateurs du musée du Louvre à Paris voulaient obtenir des Åuvres dâart allemandes en dédommagement partiel de celles que les nazis avaient perdues ou détruites. De leur côté, les Soviétiques, ainsi que de nombreux officiers alliés, trouvaient juste et raisonnable que lâAllemagne rembourse sa dette de guerre par tous les moyens possibles, notamment en abandonnant une partie de son patrimoine culturel. En plus, de nombreuses complications avaient surgi à cause des alliances que le gouvernement nazi avait conclues avec lâItalie et lâAutriche â deux nations qui avaient fourni à la fois des hommes et des armes à lâeffort de guerre du III e Reich. Beaucoup dâofficiers américains et britanniques partageaient lâopinion des Français, des Belges et des Soviétiques, selon laquelle les partenaires de guerre dâHitler ne méritaient pas de recouvrer leurs Åuvres dâart et autres biens dans les mêmes conditions quâeux.
Dans cet interminable débat, sans règles précises, la chambre forte de lâallée du Forgeron constituait une véritable boîte de Pandore.
Dâun point de vue historique, les joyaux de la Couronne nâappartenaient à aucune nation en particulier, mais plutôt à un empire qui, comme le III e Reich, sâétait effondré et avait disparu. Ces symboles étaient indissociables dâun concept médiéval de gouvernement mondial qui avait débuté avec le couronnement de Charlemagne au VIII e  siècle et pris fin, mille ans plus tard, au début du XIX e  siècle lorsque lâempereur François II avait abdiqué après avoir été vaincu par Napoléon Bonaparte. Au début de lâère médiévale, les joyaux de la Couronne étaient la propriété personnelle de lâempereur et le suivaient de ville en ville à travers un empire qui, à son apogée, englobait lâensemble de lâEurope occidentale moderne. En 1424, lâempereur Sigismond mit fin à la tradition en remettant la collection à la ville impériale de Nuremberg, où, par décret royal, elle devait être mise à lâabri pour lâéternité. Les saintes reliques auraient pu rester définitivement à Nuremberg si les édiles locaux ne les avaient pas cachées à Vienne en 1796 pour empêcher quâelles ne tombent entre les mains de Napoléon, qui pillait la Rhénanie dans sa quête de domination du monde. Maintenant quâHitler avait fait revenir les joyaux de la Couronne en Allemagne, leur terre dâélection, on ignorait ce que les Alliés conquérants allaient décider dâen faire.
Horn sâabstint dâinterroger Hammond pour comprendre lâintérêt que portaient les généraux Patton et Eisenhower à la récupération ou la restitution des Åuvres dâart du bunker de Nuremberg, et leurs priorités. Des rivalités existaient parmi les Alliés, comme parmi les nazis. Horn était heureux en tout cas de savoir que deux des officiers les plus gradés du commandement allié prenaient au sérieux son désir de mettre en sécurité les joyaux de la Couronne, et il se sentait honoré que Hammond lui fasse confiance pour une tâche dépassant les capacités de ses collaborateurs les plus expérimentés.
Il restait un seul point de désaccord.
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